Jeudi 11 avril, 1943
Marie
Il y avait un magnifique soleil dans le ciel lorsque je l'ai vu pour la toute première fois, une magnifique journée du mois d'avril, une journée comme les précédentes et comme celles qui auraient dû suivre. Les oiseaux gazouillaient de joie le retour de la chaleur, la neige ayant fini par fondre complètement et cela faisait le bonheur de chacun, en particulier des habitants de mon village.
Je me promenais tranquillement dans les rues de mon quartier, profitant déjà au maximum du soleil chaleureux. Je venais de terminer une longue journée de travail à la boulangerie du village et rien ne me faisait plus plaisir que de respirer le grand air printanier, sentant déjà la liberté qu'apportait l'été arriver à grand pas.
Je faisais une promenade de ce genre à chaque jour. Toujours le même trajet. C'était devenus une routine et il n'y avait pas un jour qui passait sans que je fasse ce petit tour dans les rues grises autour de chez moi.
Après une bonne heure de marche, j'arrivais toujours près de la forêt. Cette forêt qui nous est interdite d'accès, sombre et dont personne ne veut parler. Cette forêt sur cette rue dénudée de toute civilisation, de commerce et de maisons. Personne ne peut vivre près de ce boisé et je ne connais personne qui soit vraiment certain de ce qui se trouve de l'autre côté, mais tout le monde sait qu'il est strictement interdit d'y entrer. Ordre du Führer.
On racontait bien des choses sur cet endroit et plusieurs légendes et histoires toutes aussi intéressantes et excitantes les unes que les autres avaient pris naissance à la suite de cette règle.
Je longeais les arbres à travers desquels le soleil commençait déjà à disparaitre, comme à chaque fois, mes bottes noires claquant sur le sol humide. C'est cette journée là que je l'ai vu pour la première fois.
Quand on regardait ces arbres, on avait l'impression qu'ils s'étendaient à l'infini, que les troncs gris se succédaient sans relâche. La forêt m'avait toujours intriguée, mais je n'avais jamais osé en parler ou poser des questions à ce sujet. Je ne prenais pas même le risque de la regarder et, au fil des jours, je ne la voyais plus, m'étant habituée à l'ombre qu'elle projetait sur le chemin terreux que j'empruntais à chacune de mes promenades.
Mais, ce jour-là, l'envie était beaucoup plus forte. Je ne saurai l'expliquer, mais cet après-midi-là, une envie irrésistible d'y entrer m'a soudainement traversée l'esprit. Que cachait ces bois ? Pourquoi ne pouvions-nous pas y entrer sous peine de sentences très graves ?
À ma connaissance, personne n'avait été punis après y être aller. En fait, c'était plutôt dû au fait que personne, probablement, n'y était jamais entré.
Mes parents ne m'e avait pas soufflé mots. En revanche, je me rappelle encore le jour où des membres du gouvernement sont venus à l'école nous parler de la nouvelle règle concernant ce bois. Ils étaient entrés dans la classe et ils avaient seulement dit que ces terres appartenaient maintenant au parti nazi et que quiconque y entrait aurait de grands problèmes avec le Führer lui-même.
Cet événement avait fini par effrayer toute la classe, surtout les garçons qui avaient habitude de s'y aventurer pour s'amuser à construire des abris et se fabriquer des épées de bois. Personne n'osait en parler, pas même Eve Ribben qui, habituellement, ne se gênait pas pour faire courir toutes sortes de rumeurs et d'histoires.
Cela faisait maintenant deux ans que cette règle était instaurée.
Quand je me suis finalement aventurée dans ces sombres passages que les arbres créaient avec leurs troncs rapprochés, je pensais ne jamais arriver à quelque part de significatif, le bois était sans fin. Plusieurs fois, j'avais presque rebroussé chemin tellement j''étais nerveuse et je n'avais pas arrêté de regarder furtivement autour de moi pour vérifier que personne ne m'avait suivie.
VOUS LISEZ
La fille à l'écharpe rouge
Narrativa StoricaUne fille avec une écharpe rouge, un garçon avec une feuille de papier et un crayon. Un grillage entre les deux pour les séparer mais, pourtant, ils réussiront à faire disparaître ce grillage, à faire tomber les murs, à faire taire jugements et inju...