Chapitre 40

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Mercredi 11 mai, 1943
Marie




-Je vais être ici même, à vingt-et-une-heure, demain soir.

Thomas hocha la tête.

-Tu sauras comment venir ici pendant la nuit? demandai-je, déjà inquiète par la soirée à venir.

-Oui, ne t'inquiète pas. Je vais trouver une solution.

J'étais quand même inquiète. Il devait s'enfuir du camp pour venir jusqu'à la brèche dans la clôture. Il risquait sa vie. Par contre, il semblait sûr de lui et il venait de prendre la décision de venir avec moi.

Nous avions convenu qu'il serait mieux de nous enfuir demain soir. La nuit nous couvrirait et nous aurions toute la journée pour nous préparer.

Je n'avais plus rien à faire dans ce village, même si je l'aimais beaucoup. Ce que mon père avait fait était contre ma manière de penser et, pour une fois, je n'allais pas obéïr à ses ordres, j'allais disparaître de la vie de mes parents.

J'avais pensé à ma mère qui était prête à me défendre et parler à mon père à propos du mariage, mais elle était certainement au courant et en accord avec ce que mon père avait fait.

De toute manière, j'avais Thomas maintenant, et même si j'avais mal de perdre ce que j'avais de plus précieux, je ressentais un bonheur encore plus grand de pouvoir compter sur Thomas et d'imaginer un avenir avec lui, mais surtout, un avenir pour lui qui n'en avait plus depuis quelques années.

-Je vais préparer un sac de nourriture et de vêtement de rechanges pour toi et un autre pour moi. Je vais aussi voler de l'argent à mes parents et t'apporter de bonnes chaussures. Ah! Et aussi des médicaments.

-D'accord, répondit-il avec un petit sourire.

-Et il ne faut pas que j'oublie des feuilles de papiers et des crayons pour que tu...

-Marie, me coupa Thomas.

Je tournai la tête vers lui et encrais mon regard dans le siens. Il pencha sa tête et nos fronts se rencontrèrent. Nos nez se frôlaient et nos souffle se mélangeaient alors que nos regards ne se quittaient pas. Les grandes mains de Thomas encadrèrent mon visage. Ses pouces effectuèrent de petit cercles sur mes joues et un milliers de picotements se formèrent sur ma peau.

Je fermai les yeux en profitant de la présence de Thomas. Qu'est-ce que je ferais sans lui? Et s'il mourrait en tentant de s'enfuir?

Thomas sembla remarquer mon malaise et fronça les sourcils en signe de questionnement.

-J'ai peur, je murmurai en réponse à sa question silencieuse.

Ses yeux se tintèrent de pitié et un petit sourire se forma sur ses lèvres charnues. C'était un regard compatissant.

-Moi aussi, mais il ne faut pas abandonner notre plan. Ce n'est pas si difficile que ça, n'est-ce pas?

J'hochais la tête en mordant ma lèvre inférieure.

-Le début est beaucoup plus difficile: nous nous préparons chacun de notre côté. Après on se rejoint ici-même et nous partons. Tous les deux, sans personne pour nous arrêter...

Sa voix rauque et profonde me rassura et ses yeux avaient un lueur de je fit un minuscule sourire à Thomas et entourai sa taille de mes bras pour le serrer contre moi. Ses bras passèrent sur mes épaules et je fus complètement collée contre son torse. J'entendis son cœur battre régulièrement et cela me réconforta.

-Nous quitterons le pays, continua doucement Thomas. Nous marcherons sans arrêt pour être aussi loin que possible de l'Allemagne.

Je souris à cette idée: ne plus jamais revoir l'Allemagne.

La fille à l'écharpe rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant