Ma Naïs,
Tu as le droit tu sais ? D'être effondrée, de crier, de pleurer, d'avoir mal.
Ne pense pas que j'ignore ta douleur. Je sais aussi combien c'est dur de voir disparaître quelqu'un, ici il n'y a pas de mort mais tant de disparition que cela ne nous est pas inconnu. Il est parti, c'est un fait. Mais toi tu es toujours ici. C'est un autre fait. Je te connais Liberty, je sais bien que tu fais semblant d'aller bien et de te battre. Je sais donc aussi qu'au fond de toi tu as envie d'abandonner. Mais tu dois continuer d'être forte, pour autant il te reste le droit de crier, de pleurer, d'être malheureuse. Personne n'est invincible. Quoi qu'il arrive tient toi droite, en criant haut et fort que rien ne t'atteint tu cours aux problèmes : les gens qui se disent invincibles sont les premiers à démontrer qu'ils ne le sont pas.
Je serais toujours derrière toi, qu'importe ce que tu fasses je te soutiendrai. Parce que je t'aime autant qu'il m'est permis d'aimer Naïs.
Connor
°°°°
– Astryd...
Sa voix murmure mon prénom. Je ne me réveille pas, parce que j'ai besoin qu'il le dise encore. Sur l'instant, entendre mon nom tomber de ses lèvres me paraît vital.
– Astryd ?
Il hausse légèrement la voix. Il faut que je me réveille. Il me secoue l'épaule, doucement, parce qu'il a peur de me réveiller trop brusquement. Il agit comme si il avait peur de sa force, comme si il pouvait me blesser. Je sais que c'est impossible. Astley ne me fera jamais de mal.
Je dois me réveiller.
Je n'ouvre pas les yeux mais je me relève dans mon lit et je me love dans ses bras et contre son torse, comme d'habitude, brûlant. Il rit et ma tête cogne gentiment lorsque sa poitrine se soulève.
– Ouvre les yeux Princesse...
– Peut-être que c'est ce que je ferai si tu ne m'appelais...
– Puisque tu n'es pas certaine, rien ne m'empêche de t'appeler comme ça.
Je grogne et puis, j'ouvre enfin les paupières. Je me dégage de mes couvertures et me lève. Encore ensommeillée, j'entreprends de retirer mon haut de pyjama (un vieux tee-shirt d'Assam).
Astley s'éclaircit la gorge :
– J'y vais moi.
– Tu vas pas me dire que je t'impressionne quand même ?
Il ne répond pas et referme sur lui la porte, toujours aussi doucement.
Je jette mes vêtement au sol et commence à brosser mes cheveux rouges...
°°°°
J'ai enfilé une chemise rouge et un pantalon de cuir noir. Mes cheveux sont attachés en une couette sur le sommet de ma tête. Je lève le menton, pour donner à mon reflet dans la glace, un air audacieux, confiant. Je vais y arriver. Après tout, j'ai juste quelques mots à dire à un vieux bonhomme... Ça ne devrait pas poser problème.
C'est ainsi que je quitte la maison : en m'auto-persuadant que tout sera simple. Ça le sera. Je dois avoir confiance.
Le chemin jusqu'à la Grande Maison est long à pied, mais aujourd'hui, je n'ai pas envie de courir. Je regarde le paysage et les rues que je traverse. Je mémorise ces visages inconnus des autres comme moi... Des gens de ma race. Ceux pour qui je vais à la rencontre du Grand.
J'ai jamais été comme ça, l'altruisme, le don de soi, c'est plus Assam. Ça a toujours été Assam. Mais aujourd'hui c'est moi, c'est Astryd qui est engagée aux côtés de rebelles qui œuvrent pour "libérer" notre peuple.
Je ne saurais pas dire si cela me rends fière. Je crois, en fait, que je ne me rends pas bien compte de ce que ça représente et du type d'actions que mènent les Enragés. Moi, j'ai juste à parler au Grand.
Non, ce qui me rends fière et heureuse c'est de marcher dans les pas de ma mère. De la découvrir, elle et les gens qui l'ont connus.
Je me demande d'ailleurs, si Assam aimerai savoir tout ça. Il m'a toujours semblé qu'il n'étais pas très curieux du passé de nos parents. Pour lui, il n'y a que l'avenir qui compte. Assam pense toujours à notre avenir, à la façon dont nous allons affronter la vie, tout ce qui touche à Demain avec un grand D. Il a pardonné nos parents, il a fait une croix sur eux, sur notre vie avec eux. Pourquoi ? Parce que c'est du passé. Assam ne s'encombre pas du passé.
Moi je fais plutôt l'inverse. J'ai tendance à vivre dans le présent. Mais j'ai besoin du passé. J'ai besoin du passé pour entrevoir un avenir, pour essayer de le construire. Et aujourd'hui plus que jamais, j'ai besoin de savoir d'où je viens et qui ont étés mes prédécesseurs.
Je le sens, le Grand avait raison. Pour faire mon Choix, j'ai besoin d'avoir toutes les cartes en mains, or bien qu'il se soit récemment enrichi, pour l'instant mon jeu est très pauvre. Je n'ai que six cartes pour jouer mon avenir, six cartes qui mélangent passé et présent : mon frère et ma soeur, que j'aime plus que tout, pour qui je donnerai tout. Mon père et ma mère, tels qu'ils sont dans mes souvenirs et tels que je les déteste aujourd'hui. Les lettres de ma mère, ce que j'apprends sur elle jours après jours. Le Choix de mon père et tout ce que le Grand pourra me dire là-dessus. Les Enragés, mes nouveaux amis et cette nouvelle cause qui me fait me sentir importante. Et enfin Astley, un simple inconnu qui prends, comme une tâche d'encre, de plus en plus de place dans mon coeur et dans ma tête.
Ce sont ces six cartes et celles que j'espère trouver avant la date fatidique qui me permettront de faire le meilleur choix. J'espère donc en trouver le plus possible, car avec celles que j'ai maintenant, aucun choix ne me semble évident.
Devenir humaine ? Abandonner ma famille en vue d'une vie meilleure ? J'ai toujours été égoïste mais là c'est trop.
Tomber amoureuse et faire comme mes parents ? De qui tomber amoureuse ? De plus, la disparition de mes parents a été bien trop douloureuse pour que je la fasse subir à Assam une nouvelle fois.
Suivre le Grand un an avant de mourir ? Pour quoi faire ? Je ne veux pas mourir si bêtement.
Choisir quelqu'un d'autre ? Qui serais assez fou pour se sacrifier pour moi si ce n'est Assam ? Et si lui disparaît, ni moi ni Ariel ne serions plus rien.
Finalement, ce qui m'inquiète plus que mon propre choix, c'est celui d'Astley. Une petite voix me répète que quel que soit le choix qu'il fasse, il finira loin de nous. Loin de moi.
Les maisons défilent pendant que mes pensées se perdent sur des chemins différents. Les rues se mélangent devant mes yeux, heureusement mes pieds savent où aller. Je sens que je suis presque arrivée, je vois de plus en plus de gens habillés du bleu gendarme de la Grande Maison.
M'y voilà enfin, la place s'étend devant moi et devant une telle immensité je me sens toute petite. Les gens vont et viennent, seuls eux savent où ils vont. Ce ballet aux nuances bleues m'impressionne chaque fois. Je suis anonyme. Je ne suis rien d'important ici. D'ailleurs, je le sais, je suis quelqu'un qu'on voudrait oublier.
On ne fais pas beaucoup de publicité autour de L'Immense parce que tout le monde préfère oublier la vérité qu'elle représente. Je suis la preuve de notre malédiction.
Ils médiatisent L'Immense pour inquiéter puis font de même pour le moment du Choix pour rassurer : ça y est c'est fini, la prochaine fois que vous serez obligés de vous rappeler d'où vous venez c'est dans 120 ans... Entre ces deux instant, tout le monde oublie ceux qui ont étés choisis, comme une respiration qu'on retient avant le soulagement. Et ceux qui sont choisis eux, comptent leurs respirations...
J'entreprends alors de traverser la place. Je fends la foule et marche droit devant. Je me souviens des instructions du Grand et je me met en quête d'un petit garçon habillé en blanc. D'abord je ne vois pas. Puis, me voilà maintenant tout prêt de l'immense bâtisse, j'aperçois une petite silhouette qui contraste avec les autres par sa taille et sa corpulence menue. Ce dois être lui. Je m'approche donc et en effet, un petit enfant cherche quelqu'un du regard, habillé d'un costume blanc un peu trop grand pour lui. Je le reconnais. C'est le même petit bonhomme qui m'a conduite près du Grand la première fois.
Je lui souris et quand il croise mon regard il fait de même.
– Je m'appelle Gustave, vous êtes bien Mademoiselle Astryd Aldawn ?
– C'est moi. Tu dois me guider jusqu'au Grand ?
– Oui, c'est ma fonction.
Et il affiche un air sérieux qui va assez mal avec son visage poupin. Il se redresse pour avoir l'air plus digne parmi tous ces messieurs en bleu et m'attrape le bras.
– Suis moi.
Nous contournons alors la Grande Maison et nous rentrons par une toute petite porte cachée de la même couleur que le mur. C'est par cette porte que j'étais sortie lors de ma première entrevue avec le Grand, je m'en souviens bien.
La pièce vert émeraude est aussi impressionnante que la dernière fois. Tout est majestueux, luxueux, extravagant et pourtant parfaitement sérieux.
Des étagères de grimoires s'étendent le long des murs et la pièce est si grande que je ne vois pas toutes les extrémités. Il y a une dizaine de grandes fenêtres totalement occultées par de grands rideaux de velours vert. Les murs qui ne sont pas des bibliothèques, semblent taillés dans de la pierre précieuse. Les reflets créés sur leur surface lisse par l'imposant lustre de cristal qui flotte en l'air illuminent le pièce d'une lumière émeraude et mystérieuse.
La pièce est parsemée de fauteuils du même velours que les rideaux et de petites tables en marbre vert. Le même marbre qui recouvre le sol et fait que chacun de mes pas résonne. Je regrette de ne pas avoir enfilé de chaussons tant le bruit que je fais me parait déplacé dans cette immensité d'émeraude luxueuse.
Le plus impressionnant, le clou du spectacle, c'est ce bassin.
De grandes dalles de carrelages partent des quatres coins de la pièce pour se rejoindre en son centre et ce centre n'est autre qu'un bassin d'eau claire, rond, et entouré de cristal. Les faisceaux lumineux créés par la réflexion de la lumière du lustre sur les murs précieux se dirigent tous vers l'eau du bassin qui scintille comme si il contenait des milliers de diamants et comme si il était la réponse à tout.
La place centrale de ce chef d'œuvre de lumière ne pouvait pas être un hasard.
Soudain, m'interrompant dans ma contemplation du lieu, Gustave se pencha vers le sol en un salut trop solennel pour son jeune âge : le Grand venait d'apparaître d'un coin reculé de la pièce. J'esquissai alors une courbette.
Le Grand sourit et sans qu'il ai eu aucun mot à prononcer le petit Gustave traversa la salle et sorti par une autre lointaine extrémité. Ni l'un ni l'autre ne dis rien tant que le garçon ne fut pas sorti mais lorsque la porte verte se referma sur la petite silhouette le Grand lâcha :
– Astryd Aldawn, tu as à me parler.
– En effet, voilà...
Il leva la main pour me faire taire, malgré son âge et sa petite taille, cet homme possédait un si grand pouvoir que sa main ouverte faisait taire n'importe qui.
– Assied toi jeune fille, cela risque d'être long n'est-ce-pas ?
Je m'assis sur le fauteuil de velours le plus proche et il s'assit en face de moi.
– Parle Astryd.
– Voilà, je suis venue vous trouver parce-qu'on m'a confié une mission, je viens au nom de Connor Ciez. Je fais depuis peu partie d'un groupe nommé les Enragés dont il dirige la branche installée ici, dans la Grande Ville. Il m'a envoyé pour vous informer de son existence mais aussi des actions qu'elle dirige. Son but, en clair, est de protéger la population des manigances des hauts dirigeants mais initialement il est de libérer la population de la Sphère. En clair, de ruiner le travail que vous faites et l'accord passé avec le Créateur.
Pourquoi aujourd'hui je suis la ? Parce que la branche d'Aldawn surveille une des portes et qu'elle est rentrée en activité récemment. En effet, quelqu'un de la Sphère a communiqué, ou a tenté, de rentrer en contact avec l'Enfer. Aussi, les supérieurs on jugé qu'en vu de la gravité de la situation il valait mieux vous en informer. C'est ce que je viens de faire.
Je marquai un temps d'arrêt pour revenir, dans ma tête, sur ce que je venait de dire et cela me semblait plutôt bien. J'avais réussi ma mission.
Pourtant le Grand eu une drôle de rréaction, le genre à laquelle je ne m'attendait pas vraiment : il fut prit d'un rire franc puis il déclara :
– Je sais déjà tout ça Astryd. Mais cela me fait plaisir que tes supérieurs ai enfin jugé bon de me mettre au parfum.
– Quoi ? Vous savez ?
– Crois-tu vraiment qu'il y ai quoi que ce soit qui m'échappe dans la Sphère et encore moins dans ma capitale. Connor est discret, certes, mais mes Officieux le sont encore plus.
Les Officieux, c'est la police personnelle du Grand, ses agents secrets en quelque sorte. Ils ne sont pas si secrets que ça car tout le monde sait qu'ils existent, ils sont juste anonymes. Personne ne sait qui est un Officieux qui ne l'est pas. La plupart, parait-il, font partie de la garde de la Grande Capitale, mais d'autres sont des ministres, des scientifiques, des agriculteurs... N'importe qui. Leur anonymat n'est important que pour cacher leur nombre car personne ne peut rien contre eux : le Grand les protège quoi qu'il fassent.
– Vous faites espionner les Enragés ?
– Depuis assez longtemps oui.
– Et vous n'avez rien dit ?
– Dans l'espionnage tout est question de secret mademoiselle Aldawn.
J'étais... Outrée, déçue, choquée...
Il nous prenait pour des imbéciles. Et depuis longtemps.
De plus, moi qui en étais si fière, ma mission ne servait à rien.
– Mais, votre démarche à un sens.
– Je suis curieuse d'entendre lequel.
– Voyez, maintenant que je suis officiellement mis au courant par vous services, je ne vais plus être obligé d'en venir aux faits par le biais de moyen détournés. Vous me tiendrez au courant directement et je pourrais mettre mes forces à votre service. Étant au courant de ces communications dont vous m'avez parlé, je me doutais que vous n'alliez pas tarder à vous dévoiler. C'est pourquoi j'ai déjà pensé aux forces que je peux vous prêter et je tiens à la chose suivante : deux de mes Officieux, Léo et Louis Ly, vous suivrons désormais lors des missions menées par les Enragés de Monsieur Connor Ciez.
– J'en parlerai mais je ne pense pas que cela lui plaira.
– Ce n'était en aucun cas une proposition d'aide. C'était un ordre. Un placement de pion si vous préférez.
Il semblait sérieux. Plus que jamais, le pouvoir émanait de cet homme. Et je compris pourquoi il s'appelait comme ça. Si son enveloppe charnelle était petite et peu impressionnante, son âme et sa puissance s'élevait si haut au dessus de ma tête qu'il m'était impossible de ne pas le voir : ce vieil et petit homme était grand, le plus grand d'entre nous.
– Mademoiselle, vous ne tarderez pas à rencontrer les frères Ly. Quand à cette histoire de communication, je serai au courant si les choses avancent mais soyez sûr d'une chose : je ne communique plus avec l'Enfer depuis bien avant votre naissance.
– Nous savons que ce n'est pas vous, pourquoi est-ce qu'on vous en aurait parlé sinon ?
Il dut décider que c'était là la fin officielle de la conversation car il reprit un air simple, de gentil petit vieux, abandonnant politique et espions.
– Cela me fait plaisir que vous soyez une Enragée, un de mes Officieux a connu ta maman comme cela. Elle était très douée Naïs N'ewt. Quel dommage, elle n'a jamais accepté de travailler pour moi.
°°°°
Je suis rentrée. L'entrevue avec le Grand m'a secoué plus que prévu et je ne sais plus trop quoi penser. Une chose est sûre : je dois prévenir Connor de la réussite de ma mission et c'est ce que je fais grâce au moyen de communication assez particulier des Enragés.
Quelques minutes plus tard, il me réponds : tout le monde et prévenu et une réunion est prévue pour le lendemain.
Je ne sais pas comment iils vont réagir à l'idée que deux Officieux intègrent notre équipe... Mal sans doute...
Me coupant dans mes pensées, on toque à la porte.
– Oui ?
Astley entre, un peu timidement comme si il savait quelles pensées il venait d'interrompre. Je lui souris. Et il propose :
– Je comptais aller me promener, tu veux venir ?
Pourquoi pas, après tout, j'ai bien besoin d'aérer tout ça !
– J'arrive, attends moi.
°°°°
Le chemin est, comme d'habitude, paisible. Peu de gens connaissent cette longue allée au coeur de la forêt que mes parents empruntaient souvent. Comme ce qui nous sert de printemps ici, dans la Sphère, une saison à mi chemin entre l'été et le printemps terrien, est bientôt là, les arbres sont verts et des fleurs commencent à éclore ici et là.
Des tâches colorés dans ce tableau de verdure...
Astley tiens ma main. Au début cela m'a étonnée : il ne l'avait jamais osé. Mais plus le temps passe et plus il est à l'aise ici et avec nous. Aujourd'hui je n'imagine pas ma vie sans lui alors qu'il y a peu de temps je ne le connaissais pas.
J'en viens à penser à ce qui nous rapproche lui et moi : L'Immense. Et je pense notamment mon entretien avec le Grand. Pas le plus récent mais le premier, celui dans lequel il avait tenu à parler de mon père.
– Tu sais, j'ai réfléchi et je sais de quoi tu as parlé avec le Grand.
Astley me regarde étonné.
– De quoi tu parles ?
– Je parle de l'entretien qu'on a eu tous les deux avec le Grand. Moi il m'a parlé de mon père, parce qu'il faut savoir d'où on vient pour savoir où l'on va. Donc il a du te parler de tes origines.
– Oui, je t'ai dis qu'il sait que je ne suis pas comme toi.
– Oui mais à part ça, il ne sait pas d'où tu viens ?
– Non Astryd, je t'ai déjà dis qu'il ne sait pas.
– C'est bizarre qu'il ne le sache pas, il sait tout normalement non ?
– Astryd, arrête avec ça je te dis qu'il ne sait pas !
Astley paraît énervé par mes réflexions.
– Bien, alors si le Grand ne sait pas d'où tu viens, moi je vais le découvrir, je te le promet !
Il rigole et j'essaye de faire de même, mais je ne suis pas idiote et lui ment très mal. Il y a cette chose qu'il a dite à Assam et qu'il s'obstine à me cacher. Je sais que cela a un lien avec ses origines et je pense que le Grand lui a dit d'où il vient. Ce que je ne comprends pas c'est pourquoi Assam peut l'entendre et pas moi... En quoi cela est mauvais pour moi de savoir qui est vraiment Astley ?
Je compte bien tenir ma promesse, je finirai par savoir ce qu'il veut me cacher.
– Alors le Grand t'a parlé de tes origines toi ? Dit-il.
– Oui, on a parlé de mon père.
Il serre ma main un peu plus fort, peut-être pour me réconforter. Mais je n'en ai pas besoin, ça va. Je lâche sa main.
– Ce n'était pas trop dur ?
– Pourquoi cette question ?
– Je ne sais pas... Toi et tes parents...
– Tout va bien Astley.
Je sais bien que c'est moi qui ai lancé le sujet mais, étrangement, je n'ai pas envie de parler de ça avec lui. C'est comme les lettres de ma mère, j'ai besoin que cela reste secret. Ainsi, personne ne peut influencer mon opinion sur mes découvertes et cela me permet de placer mes cartes comme je le veux dans mon propre jeu.
Astley rattrape ma main. Il s'arrête et me prends dans ses bras, il ne dit rien et me caresse les cheveux. Je sais que c'est comme ça qu'il me dit "Tout va bien. Je te console même pour les choses que tu ne me dis pas."
°°°°
Nous sommes rentrés. Je tombe de fatigue et il est tard.
Habillée, toujours, du t-shirt d'Assam, je m'endors.
Et c'est encore la même chose...
Les arbres s'élèvent si haut que j'ai le vertige quand bien même mes pieds nus touchent le sol. Le vent, la brise, tournoie dans mes cheveux et caresse mes joues. Mes bras nus eux aussi, se lèvent devant mes yeux comme pour attraper le ciel et un rire chaud retentit derrière moi. C'est lui. Mon coeur sursaute, tellement heureux de l'entendre, comme si je ne venais pas tout juste de le quitter. Astley m'attrape par la taille et me fait voler, moi et ma tunique blanche. Je tourne, près de son visage. Il me dépose juste derrière lui. Puis ce papillon aux ailes rouges, comme la première fois, et je sais ce qui va arriver pourtant je ne peux rien faire contre l'envie irrépressible de le suivre, de l'attraper. Alors je m'élance à sa poursuite et je sens qu'Astley me suit. Enfin, le voilà à la hauteur de mes yeux. À peine l'ai-je touché du bout des doigts qu'il prends feu et que mon coeur panique parce que je connais la suite et qu'elle est de plus en plus terrifiante à chaque fois.
Lorsque les centres de l'insecte calciné touchent le sol d'herbe verte et grasse celle ci se colore, comme une tâche qui se propage, d'un rouge sanglant. Plus la couleur s'étend et plus la forêt semble floue devant mes yeux. Un bruit résonne, qui se fait plus insistant avec les secondes qui passent : un coeur qui bat. Est-ce que c'est le mien, celui d'Astley ou celui de la forêt même ?
Désormais les veines de sang carmin grimpent le long des troncs d'arbres pour s'infiltrer dans la chlorophylle et tinter les feuilles, qui, comme touchées par une maladie mortelle, commencent à tomber dans un tourbillon incandecent infernal.
C'est bientôt mon tour.
Ça y est, ça commence... Les racines rouges grimpent et griffent mes jambes blanches. Je ne peux plus bouger. Le rouge tâche ma peau et je commence à suffoquer.
Astley entre en scène. Il se place devant mon visage alors que j'étouffe dévorée par cette étrange couleur carmin. Il sourit et ferme les yeux... Lorsqu'il les ouvre à nouveau ils sont devenus totalement rouges et son seul regard brûle ma peau.
Alors il pose sa main sur mon épaule devenue rouge sang elle aussi et la douleur me traverse si fort que je réussi à me réveiller en retenant un cri.
Je me relève si vite que je manque de tomber au sol. Mon épaule me brûle. Dans la glace je vois ce petit paillon brûlé. Ma peau est écorchée.
Je grimace de douleur. Quelque chose m'échappe... Je devrais guérir... Mais ma peau ne cicatrise pas, la dernière fois non plus d'ailleurs. Ce n'est vraiment pas normal.
Je sens la panique qui entoure mon coeur et mon esprit. J'ai soudain envie de pleurer mais je me retient : je pleure trop souvent, il faut vraiment que j'arrête. Il faut vraiment que je sois aussi forte que j'aime croire que je suis...
Pourtant...
Est-ce que je dois en parler à Assam ? Des rêves... Et de cette brûlure qui ne part pas alors qu'elle aurait du disparaître depuis si longtemps.
Je m'assoie sur le sol froid et gris.
Je vais l'inquiéter. Mais il est déjà toujours inquiet.
Il faut que quelqu'un me rassure. Par rapport à quoi ? À un cauchemar ? Je ne suis plus une enfant après tout.
Oui mais cette brûlure...
Alors je me lève et sur la pointe des pieds je quitte ma chambre grise et entre dans le couloir. Je frisonne parce que la nuit, le carrelage est gelée.
Je m'arrête alors devant la porte de la chambre d'Assam.
Non... Je ne peux pas le réveiller pour ça.
Non, ça ne sert à rien de l'inquiéter, la blessure va partir d'ici demain. C'est sûr.
Et je retourne tout aussi doucement dans ma chambre.
Mais je ne me rendors pas, je ne veux pas faire de cauchemar.
°°°°
Ce matin je me suis habillée simplement : jean, t-shirt rouge et veste en cuir. J'ai longuement brossé mes cheveux rouges. Je suis aussi allée jouer avec ma petite soeur et j'ai aidé Astley à préparer le déjeuner.
Mais tout ce temps je ne pensais qu'au moment où j'allais quitter la maison pour rejoindre les Enragés. Et ce moment est arrivé !
J'embrasse Astley et Assam, assis tous les deux dans le confortable canapé et Ariel gazouille à mon intention.
– Je sors ma grande.
Et je lui souffle un baiser. Astley se lève et m'accompagne jusqu'à la porte, il m'embrasse sur le front.
– Amuse toi bien avec le type aux yeux violets !
– C'est ça !
Et je lui souris avant de lui tourner le dos.
Le vent souffle comme à son habitude et je m'engage dans les petites rues désertes de la Grande Capitale.
Mes pas sont rapides et je sais pertinemment où je vais.
Je regarde devant moi.
Si seulement je savais à chaque instant de ma vie où je vais. Si seulement je savais où me mènerai L'Immense, les Enragés et Astley...
Si j'avais su !
••••
Je vous souhaite une très belle année 2016 à tous.
J'espère en ce qui me concerne que je saurais être plus productive car j'ai quand même sorti 4 chapitres, oui seulement, cette année.
Mais je ne perd pas espoir : le chapitre 12 et le chapitre 13 se sont suivis non ? De plus, le 14 est en route !
Merci de me suivre et de lire mon histoire depuis 2 ans (oui, le temps passe vite !).
Passez une merveilleuse année !
• Vous attendiez vous à la réaction du Grand ?
• De qui peut bien parler Connor dans sa lettre à la mère d'Astryd ?
• Cette histoire de cauchemar commence à devenir bizarre non ?
Allez ! Tchao !
ErenaT
VOUS LISEZ
Archanges
Fantasi°°•°° Je suis le fruit de la plus grande erreur qui n'ait jamais été commise. Le sang tapait contre ma tempe. La violence m'aveuglait. Je ne contrôlais plus rien. Il devait payer ! J'ai honte... Je... je... je ne sais plus... ~-~-~-~-~-~-~-~- C'...