J'aimerais être conscient de la réalité, mais je sens pourtant que je m'en éloigne terriblement. La maîtrise devenait une notion de plus en plus abstraite, au fil des jours, probablement des heures. Pour être honnête, je sentais que je me noyais, progressivement. Je percevais mon corps être submergé par tout ce qui m'arrivait, et laissait tout cela m'arriver pitoyablement. Je discernais presque la lycanthropie dominer ma volonté de contrôle, l'écrasant misérablement, cruellement. Les métamorphoses n'étaient plus provoquées sous mon désir, elles s'imposaient plutôt aléatoirement, les laps de temps entre elles réduisant de minutes en minutes.
Cela m'inquiétait, dans un sens, mais ce sentiment était assujetti par une conviction plus forte ; je voulais renoncer.
La nuit était tombée depuis des heures lorsque je fus réveillé. Une vive douleur me fit retrouver ma conscience–j'ouvrais les yeux. Les draps autour de moi étaient concentrés à un emplacement sur le matelas, que j'observais un instant à travers ma vision nébuleuse. Je pus, après quelques secondes d'examination, constater que de longs cheveux bruns courraient sur le tissu, épousant les plis et creux de celui-ci.
Puis je perdis conscience à nouveau, brusquement. J'avais encore une certaine lucidité, sentais ma respiration haletante et mon cœur, pulsant de façon excessivement intense. La partie incontrôlable de mon esprit avait à nouveau surmonté ma raison–j'avais perdu tout cela et durant les derniers jours, voilà le seul état dans lequel j'espérais me retrouver : insensible, inerte, inexistant. Mais cette fois-ci, même si cet état inconséquent me soulageait, toute l'angoisse que j'avais repoussée auparavant affluait dans mon reste de clairvoyance–Abby se trouvait avec moi, dans la chambre dans laquelle j'avais été ; j'allais la tuer.
Inspirer, tu dois inspirer, fut la première chose me venant à l'esprit, tu dois respirer. Je le fis, mais mon nez se mit à brûler soudainement, mes poumons s'enflammant violemment. Des voix étaient étouffées, mais mes propres cris résonnaient tout de même à mes oreilles, jusqu'à ce que ma bouche et ma gorge soient elles-aussi noyées ; je suffoquais.
La pression sur ma nuque fut maintenue assez de temps pour que ma vision déjà dégradée par l'eau commence à perdre de sa vivacité ; c'était une affliction. J'essayais dans mon agonie de respirer, tout de même, n'arrivant qu'à meurtrir mes voies respiratoires plus encore.
Puis, inopinément, ce qui me retenait jusque-là fut relâché. Je relevais abruptement mon visage, l'extrayant de l'eau avec rapidité. L'air frais me frappait lorsque je me mis à tousser follement, entraînant toute l'eau absorbée hors de mon corps. A peine ma conscience remise de cette épreuve, une main agrippait ma gorge et me poussait vivement contre une surface ferme, coupant ma respiration à nouveau.
J'ouvrais les yeux sur Harry, qui pressait mon cou plus fort encore, comprimant toutes mes arrivées d'air. Je cramponnais ses biceps de mes mains, l'incompréhension me dévorait– rapidement remplacée par la fureur. Je ne cherchais pas réellement à comprendre ce qui m'arrivait, ne regardait pas le reste de la pièce–je voulais seulement me transformer, concentrant toute mon attention là-dessus. Néanmoins, lorsque sa prise se fut plus étroite encore, sur le point de briser ma gorge, mon regard retombait dans le sien.
–– Change encore une fois et je t'étoufferais pour de bon, a-t-il craché, enfonçant mon corps fermement contre le mur.
Je griffais sa peau, enfonçant mes ongles dans la chair sans qu'il ne fasse de mouvement pour s'échapper de ma prise. Puis, après m'avoir étudié quelques secondes encore, il me relâchait. Mon corps tombait mollement sur le sol, s'écrasant de tout son long comme une poupée de chiffon.
Lorsque je repris pleinement conscience de mon environnement, Guilia était penchée au-dessus de moi–elle me jetait un regard sombre. Je me relevais lentement, ignorant mes poumons et ma gorge douloureux, me dirigeant plutôt vers Harry, qui se trouvait dans un des coins de la pièce, les bras croisés sur son torse ; il ne fit aucun commentaire sur ce qui s'était passé, se contentant de me dévisager.
–– Si nous n'étions pas intervenus, tu aurais tué Abby.
Je me retournais doucement vers Guilia, les sourcils froncés–je ne pouvais pas l'avoir fait.
–– Nous avons réussi à t'éloigner d'elle, mais tu n'as pas pu retourner à ta forme usuelle. Tu t'es métamorphosé trois fois à nouveau lorsque l'on essayait de te faire revenir, a-t-elle dit calmement, adossée contre un des murs.
–– Où est-elle ? Ai-je directement demandé, alors que mon esprit commençait à s'affoler–je l'avais probablement blessée.
Je tentais d'approcher de la porte de sortie de la pièce, mais Harry m'empêchait de progresser, bloquant le passage. Il feulait, ses crocs grandissant contre ses lèvres lorsqu'il fut en position de supériorité.
–– Je ne te conseille pas d'avancer d'avantage, a-t-il énoncé, son corps tendu posté devant la porte.
Les couleurs se diluaient, chargeant ma vision de profondes nuances de pourpre. Je pus entendre mon rythme cardiaque augmenter, le sang battant contre mes tempes. Ma raison était en contrôle, dominant la lycanthropie avec dextérité.
–– Vous ne pouvez pas m'empêcher de la voir, ai-je proféré.
–– Es-tu réellement en contrôle, Niall, ou est-il en train de te maîtriser ?
Contrôle––faiblesse. Tout était tellement restreint, respirer en devenait difficile. Mon corps était comprimé de toutes les manières possibles, mais je n'étais pas sûr qu'il s'agissait réellement de mon corps. Peut-être étais-je encore incontrôlable ; j'étais la raison qu'il me restait. Pourtant, je semblais pouvoir bouger–une lumière aveuglante surgi dans la pièce. Je forçais mon bras, mais, après une résistance et un coup d'oeil, constatait que j'avais été attaché. Personne ne se trouvait avec moi et je ne connaissais pas cet endroit–tout était d'un blanc immaculé et éblouissant.
Mes poignets et chevilles étaient enchaînés au sol, ce qui me fit paniquer un instant, lorsque je pris conscience de la petitesse de la pièce. Néanmoins, je ne criais pas tout de suite, seulement quand la lumière fut éteinte à nouveau. Je savais qu'une crise de panique était presque impossible, étant donné ma nouvelle condition ; je n'étais plus malade, je devais me calmer–cependant, j'étais certain de ne pas en être capable.
–– Respirer–tu dois respirer, tu dois te calmer––tu n'es plus asperger, tu es un lycanthrope–tu es fort.
La pièce était toujours plongée dans l'obscurité, m'écrasant inexorablement. Une pression continue était appliquée sur ma poitrine et, même si j'étais conscient que tout cela était seulement psychologique, je ne pouvais pas apaiser mon esprit. Certaines choses étaient pourtant limpides : j'étais puissant, je pouvais certainement briser ces liens si j'arrivais à me calmer et asperger était toujours présent, quelque part.
Parfois, lorsque l'angoisse était trop puissante, la plupart des démons que j'avais développés étant humain me submergeait. C'était assez contradictoire, à quel point de présumées insignifiantes peurs humaines peuvent engloutir la créature puissante que je suis devenu. Mes yeux étaient fermés depuis plusieurs minutes–heures, peut-être–peu importais si aucune lumière n'était présente dans la pièce. J'étais trop effrayé des choses présentes dans les ténèbres––chacune d'entre elles.
Puis, les lumières furent allumées à nouveau, noyant la pièce d'une lumière aveuglante. Des pas suivirent, perçant le silence mortel qui avait plus tôt habité la pièce. Mes paupières papillonnèrent, tentant de s'habituer à la lumière, extrayant les larmes de mes yeux.
–– Nous ne voulons pas te blesser, mais tu ne peux pas nuire à d'autres personnes encore.
Si ma crise d'angoisse n'avait pas été présente, j'aurais certainement exposé à Harry mon visage le plus ironique, mais j'étais trop dévoré par asperger pour répliquer quoi que ce soit–ou même pour le regarder. Mon corps entier tremblait furieusement, les chaînes claquant contre le sol au rythme de mes convulsions, ce qui couvrait la voix de l'individu à mes côtés.
Je n'étais plus dans le même monde, il me semble. Tout ce qui m'entourait semblait hors de la réalité, même lorsque Harry engageait un contact physique, après m'avoir détaché. Mon corps était à présent inerte, quant au contraire, mon esprit se déchaînait. Ma raison était déchirée entre la lycanthropie, la force, mais la perte de contrôle qu'elle m'apportait et asperger––ma personne humaine et ce qu'elle contenait, en réalité.
Ces deux parties de moi semblaient imperméables l'une à l'autre, leur alliance était de la folie et je ne pensais pas pouvoir le supporter d'une quelconque façon. J'étais totalement égaré.
VOUS LISEZ
Saccagé || Niam - en pause
Fanfiction« Alors c'est la fin ? Je demande, les lèvres tremblantes. -- Ou le début, qui sait, il répond en haussant les épaules. » Some of them want to use you, some of them want to get use by you. © Par propriété exclusive de l'auteur, la copie et les ut...