Chapitre 19 : Bel Ami

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Des bruits de pas attirent alors mon attention, quelqu'un s'approche. J'ai le réflexe de me retourner en direction des escaliers, prête à attaquer. Je sors la lame de ma manche, mes muscles sont crispés à l'extrême. La tension est à son comble, hormis peut-être pour ma partenaire.

Je ne lui prête aucune attention, mon regard est strictement rivé sur la porte que nous avons emprunté pour entrer. Mes perceptions accrues me permettent de deviner qu'il s'agit d'un homme. Notamment de par la résonance de ses pas dans le long corridor. Son poids doit être conséquent ! En muscles ou en graisse.. telle est la question. Shakespeare, c'est pour toi.

Et, visiblement, lui aussi en a fait de même puisqu'au moment même où il passe le seuil, il s'avance brutalement et enserre ma gorge de sa main. Du moins, il tente de le faire car malgré son geste vif et rapide, je parviens à parer son coup d'un ample mouvement de mon avant-bras gauche. Je profite du fait qu'il soit déstabilisé pour immédiatement placer ma lame sous son menton.

C'est alors que je reconnais son visage familier, je m'exclame :

"Alexeï ?! Mais qu'est-ce que tu fous ici ?

- Je pourrais te retourner la question."

Je m'apprête à lui rétorquer que j'effectue la mission que l'on m'a donnée lorsque nous sommes interrompus par la voix aiguë de ma comparse restée près du cadavre qui semble la subjuguer.

"Cette pauvre personne est l'antithèse même de la beauté ! Et puis regardez-moi cette langue...Elle pendouille tristement. Elle pourrait être la parfaite métaphore de l'existence... A elle seule, elle représenterait le... le sens de la vie animal ! C'est... si touchant..."

Son regard parcourt le corps moisi. Elle frôle le torse ouvert du misérable d'un geste souple et léger.

"Mon pauvre ami... Souffrance et bonheur sont pourtant si proches. L'homme se torture de façon naturelle du fait de sa perpétuelle recherche du bonheur. Nous sommes tous un peu masochistes, au fond. Mais toi, tu étais différent du commun des mortels. Toi, tu ne le cachais pas... Et c'est ce qui causa ta perte. Ô mon bel ami... "

elle pose alors ses mains sur le cadavre en putréfaction pour tendrement baiser son front dégarni.

Alexeï semble prendre conscience de la vie se trouvant derrière moi, tandis que je soupire faiblement, dépitée. Il m'interroge du regard et je me vois contrainte de hausser les épaules, moi-même, je ne la connais pas et, très honnêtement, je n'en ressens pas la moindre envie. Je grimace en détournant le regard, elle me dégoûte.

D'un commun accord, il ferme silencieusement la porte, puis nous nous approchons d'elle. Cette dernière se retourne brusquement dans notre direction, arborant un malicieux sourire et... un regard particulier. L'on aurait dit qu'une lueur malsaine l'allumait.

Elle glisse une main dans sa chevelure et elle... la retire ?!

Il s'agissait d'une perruque. En vérité, ses cheveux sont rasés sur les côtés en de fort jolies symboles tribaux. Le dessus de son crâne, lui est garnit de cheveux... pourpre. Cette couleur met en valeur sa peau de porcelaine. Elle commence, suite à cela, à déficeler le corset maintenant sa robe. Ainsi, elle peut aisément dénuder son épaule sur laquelle nous pouvons clairement voir un tatouage : HGM-02.

"Bonjour grande sœur. Vous vous demandez sûrement qui je suis ? Comment cela se fait-il que je connaisse tant de choses ? Vous ne connaissez pas mes origines ! Pas même mon prénom ! Je suis... mystérieuse. Et diable que j'aime ça ! Cela me rend extatique. N'est-ce pas... frustrant pour vous ? ~ "

Je lève les yeux au ciel et je rétorque :

"N'en as-tu pas assez de paraphraser pour rien ?!"

Elle se contente de rire moqueusement et ça, je ne peux le supporter. Alexeï pose une main sur mon épaule et cela me convainc de la laisser, pour l'instant du moins, en vie. D'autant plus que nous sommes captivés par son tatouage.

Nous avons devant nous une humaine de seconde génération ! Et... je dois avouer trouver cela particulièrement inquiétant. Je ne connais pas leur particularité exacte, cela m'intrigue fortement.

"Et si nous rejoignions Antoine ? Il doit nous attendre à l'extérieur. Oh, et Fleure, n'oublie pas de prendre ces documents."

Elle adresse un clin d'œil à Alexeï qui détourne instantanément le regard en passant entre nous, et je ne peux m'empêcher de pester à son encontre : j'suis pas sa bonne.

Attendez... Antoine la connaît ?!!

Ce dernier nous doit quelques explications.

J'en ai la migraine. 

FugitiveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant