Chapitre 38 : Le bouton bleu

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« Elle doit être entrée, émet la voix grésillante de la russe, dans l'oreillette de son compère masculin.

- Oui, elle est rentrée, lui assure-t-il. Au fait, tes recherches, sur Azhar Barkih Al'azraq ça a donné quoi ?

- Rien. Je n'ai rien trouvé. C'est comme s'il... n'existait pas. Pas avant 2001. Pourtant, j'ai fouillé partout ! J'ai même infiltré le réseau de l'entreprise de Jude.

- Cela ne me dit rien qui vaille.

- Fleure a dit la même chose. On reste en contact, je pénètre l'aile ouest.

- Bien reçu, lui répond-il, tout en escaladant la façade arrière du château.

Pendant ce temps, j'entre dans l'immense demeure par la grande porte. Un majordome en costume de pingouin m'y attendait. Il m'invite à le suivre et me conduit jusqu'à ce qui semble être un grand salon.

Au centre de la pièce, se trouvent disposés en arc de cercle un grand canapé et deux fauteuils de cuir noir, tous tournés vers la cheminée éteinte. Dans certains murs se trouvent encastrées de grandes bibliothèques. Je n'ai hélas pas le temps de m'attarder plus sur la décoration.

En effet, sur l'un des sièges se trouve assise une femme que je reconnaîtrais entre toutes.

« Bonjour, Fleure. Tu as changé.

- Vous êtes le docteur qui s'est chargé de me... rendre...

- Plus forte ? »

Jamais je n'ai connu son prénom. Mais je me souviens distinctement de son visage. C'est elle qui m'a opérée, changée. C'est à elle que je dois mes incroyables aptitudes physiques.

« Monstrueuse, prononcé-je d'une vive voix. »

Mon semblant de sourire se fane, tel une fleur en période automnale. Ses prunelles fuient les miennes et je remarque que ses mains tremblent. Son rythme cardiaque est également rapide, je devine une certaine crainte émanant de cette personne.

Elle a peur. De quoi ? Je ne saurais le dire pour le moment, et ce n'est pas pour me rassurer.

« Je me souviens de toi. Patiente 16A. Tu étais... aux frontières de la mort lorsque l'on t'a présentée à moi. »

Aux frontières de la mort ? Je m'avance à pas lents, méfiante, les yeux plissés.

« Comment ça ? lui demandé-je avec hésitation.

- Tu ne te souviens pas ? je hoche négativement la tête. Soixante-quinze pourcents de ton corps étaient brûlés. Tu avais un traumatique crânien, ta jambe droite était broyée. »

Je ne peux croire ce qu'elle me conte. C'est faux, un mensonge.

Les lèvres tremblantes, je peine à articuler.

« Je ne connais pas les circonstances qui ont résulté sur ton état... inquiétant. Mais, le fait est que tu n'aurais normalement pas dû survivre à un tel accident. Jamais je n'ai eu à travailler sur un cobaye tel que toi. Les personnes qui t'ont menées à moi voulaient que tu vives.

- Vous... mentez.

- Je ne mens pas. Je préférerais mentir, mais ce n'est pas le cas, m'assure-t-elle. Fleure... tu n'aurais jamais dû revenir.

- Revenir ?

- Bien sûr, revenir. Fleure, c'est ici que je t'ai... sauvée. »

Cela fait... beaucoup trop de révélations. J'ai besoin d'une pause. Le visage devenu pâle, je porte une main à ma poitrine et je me penche légèrement vers l'avant. Je suis prise de vertiges et une désagréable envie de vomir me vient.

Bertrand entre à son tour dans la pièce. Il la balaye du regard, avant de fixer le médecin.

« Bonjour, mademoiselle Teixeira.

- Bonjour, Bertrand. Tu as une petite mine. »

Écarquillant mes globes oculaires, je me tourne subitement vers elle, tout en la pointant de mon index.

« Emilia ? Emilia Teixeira ?! m'écrié-je »

L'intéressée étouffe un petit gloussement, avant d'acquiescer.

Devant moi se trouve la mère biologique d'Alexeï.

Comment diable ai-je fait pour ne pas le deviner ? C'était pourtant d'une telle évidence...

Je me tourne alors en direction du jeune homme, mon "beau" frère. Il n'a pas changé, quoi qu'il me semble plus maigre. Il arbore un air maladif que je ne lui reconnais pas.

"Qu'est-ce que tu fais ici ? lui demandé-je sans préambule.

- J'ai pour ordre de te surveiller, pendant que "Violette", 11B, et 01B se chargent de tes deux amis."

Suite à cela, il sort une espèce de télécommande de sa poche ne possédant qu'un unique bouton bleu. Il appuie dessus et... rien ne se passe. Haussant un sourcil, je l'interroge du regard. Quoi que soit cette machine, elle ne semble pas fonctionner.

"Hein ?! Mais... ?!"

Il n'a le temps d'ajouter quoi que ce soit que je l'assomme en attrapant sa tête pour l'encastrer contre la porte derrière lui. Emilia, elle, se lève vivement et contourne le canapé pour me rejoindre.

"Qui vous a retiré votre puce ? me questionne-t-elle.

- Son frère, me contenté-je de lui répondre. Vous devriez partir, Emilia et-

- Pas sans mon fils. Et puis... j'ai promis quelque chose à un ami de longue date, me confie-t-elle.

- Un ami ? Le mage bleu ?

- Quoi ? Non ! s'offusque-t-elle immédiatement. Ce... cette pourriture n'est pas mon ami ! Et il ne l'a jamais été ! Il... elle secoue la tête. Qu'importe. Je dois retrouver Natasha. Vous, occupez-vous d'Alexeï ! Dans vingt minutes, il vous faudra être sortie. Le bâtiment va exploser.

- Exploser ? Mais... comment ?

- Mon ami, un mystérieux sourire étire ses lèvres, souhaite lui aussi mettre un terme à ce monstrueux projet. Ici se trouve tous les documents relatifs au projet Mutation. L'installation se trouve au sous-sol."

Je hoche vivement la tête. Vingt minutes. Vingts minutes pour retrouver Alex et Violette. Elle doit être probablement contrôlée. Pourtant, je pensais qu'on lui avait retiré sa puce RFID, à elle aussi.

"Oh ! Et, Fleure ! m'interpelle-t-elle. Je te dirais qui sont tes véritables parents, lorsque nous serons... sortis. Bonne chance !"

Elle ne me laisse point le temps de répliquer qu'elle sort du salon et qu'elle s'engage dans un couloir.

Mes parents... ?

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