Chapitre 22 : O.R.G.A.N.I.S.A.T.I.O.N

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À ma sortie de l'usine, armée du téléphone que Bertrand m'a offert, j'entre dans le 4x4 noir qui m'attendait patiemment. J'ai presque l'impression de m'être faite arnaquer. Quant au réseau, je ne sais quoi penser. Il me semble qu'il s'agit d'une organisation... mais de quoi ? Je ne saurais le dire.

Je regarde le paysage défiler à travers la vitre teintée du véhicule : désert, bidonville ou maisons colorées paradent face à mon air las et fatigué. Adieu monotonie du quotidien... Adieu liberté ! Je me demande au fond si j'ai fait le bon choix... Le discours de Bertrand était convainquant. Et ce dernier... m'a fait forte impression !

C'est un jeune homme mystérieux qui semble savoir bien des choses. Et il connaît mon nom. Si lui le connaît, comment cela se fait-il que ce ne soit pas le cas d'Antoine ? C'est à n'y rien comprendre.

Je tente d'engager la discussion avec mon conducteur mais ce dernier ne s'avère pas être des plus bavards. Je tente alors une approche... différente.

Je détache ma ceinture de sécurité et, telle une gamine de dix ans, je lui tapote l'épaule, je tire sur sa manche, je souffle sur son cou.

Rien ne le déstabilise.

Je tente alors la carte de la séduction.

Quoi ? Que ne ferait-on pas pour tromper l'ennui ?

Les heures s'écoulent telles la rivière que nous longeons. Je sens la voiture ralentir jusqu'à l'arrêt total. C'est destabilisée que j'ouvre la porte pour sortir afin de me dégourdir les jambes, je n'aime pas rester statique.

Je ne fais que quelques pas en ces lieux désertiques lorsqu'un corps me fonce dessus. Je sens ses bras m'enlacer et sa poitrine s'écraser contre mon dos : Violette. J'esquisse une moue agacée à ce comportement puéril. Qu'elle est emmerdante celle-là.

"Dégage !"

Elle me sert d'autant plus fort... la peste.

"Joyeuse dans le malheur, grave dans le bonheur, Fleure !

- Je pige rien à ton charabia.

- C'est de la poésie."

Exaspérée, je la repousse brutalement. Elle ne s'en offusque pas, au contraire, elle repart à l'assaut. De fait, c'est sans nulle culpabilité que je l'envoie valdinguer dans le décor.

Antoine, non étonné par ma présence, m'accueille chaleureusement et Alexeï fait de même mais de façon plus réservée. La bande est de nouveau réunie.

Nous sommes donc rassemblés en plein milieu d'un désert dont le nom m'est totalement inconnu. Joie.

L'insensible conducteur quitte à son tour le véhicule et, à mon grand étonnement, il avance en direction d'un amas de terre et de sable non loin de notre actuelle position. Mes compères le suivent et, de fait, en bon mouton que je suis, je marche sur leurs pas.

L'agglomérat de divers cailloux de tailles plus ou moins conséquentes est, en vérité, l'entrée d'un véritable bunker. Excitée et intriguée tout à la fois, je m'y engouffre à la suite de Violette.

Un long couloir, parsemé régulièrement de néons blancs, nous mène à un large ascenseur. Le conducteur, toujours aussi impassible, passe un badge dans une fente prévue à cet effet afin d'actionner le dispositif de l'antichambre ascendante. Les portes s'ouvrent, nous rentrons à l'intérieur dans un silence quasi religieux. Notre guide appuie sur plusieurs boutons, puis soudain, l'habitacle de métal entame un descente assez rapide dans une vibration inquiétante. Deux minutes plus tard, il ralentit jusqu'à l'arrêt, les portes se rétractent, nous laissant apercevoir une grande pièce aux murs blancs dont la lumière des néons, semblables à ceux vu précédemment, se reflète.

Il s'y trouve une multitude d'ordinateurs et d'écrans parsemant les bords ainsi qu'une foule abondante de personnes en costume militaire ou en blouse blanche.

Où diable suis-je encore tombée ?

Un homme vêtu en civil s'approche de nous à grands pas tout en arborant un sourire jovial. Il est âgé et la protubérance ventrale qu'il possède me laisse penser qu'il ne doit pas être en si bonne santé que ça. Il sert la main de mon stoïque et insensible conducteur avant de prendre Antoine dans ses bras. Ces deux hommes semblent se connaître depuis fort longtemps, du fait de la familiarité dont l'un fait preuve envers l'autre. Il nous souhaite la bienvenue dans "le réseau" puis il nous invite à le suivre. 

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