Chapitre 31 : BOUM !

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Violette et moi partons explorer le bunker. Son infrastructure s'avère ne pas être aussi massive que nous le pensions et nous en profitons pour nous servir allégrement dans les entrepôts. De plus, à mesure que nous découvrons de nouvelles pièces, je me dis qu'il serait peut-être plus judicieux de détruire tout cela. Et ça tombe bien, car nous avons trouvé du C4, un explosif d'une incroyable puissance, stable et capable de résister à des températures extrêmes.

Possédant maintenant un véritable attirail de guerre, nous nous empressons de placer les blocs blancs absolument partout. Le détonateur fonctionne à distance grâce à une petite antenne wifi.

Avant de sortir et de faire sauter les lieux, je me rends devant la salle d'opération et j'emporte avec moi le cadavre d'Antoine. Violette m'adresse un regard plein d'incompréhension, je lui explique alors que je souhaite l'enterrer.

"J'vois vraiment pas l'intérêt de faire ça, hormis, peut-être, pour que le corps puisse nourrir la terre.... Mais on est paumées au beau milieu d'un désert. Sincèrement, Fleure, tu devrais le laisser avec les... autres, me dit-elle avec dédain et dégoût lorsqu'elle mentionne les HGR, Humains Génétiquements Réanimés.

- C'est un genre de tradition, d'enterrer les morts. J'veux pas laisser Antoine là-d'dans." me contenté-je de lui répondre.

De ce fait, nous enterrons mon ami et fiancé post-mortem, puis nous faisons exploser le bunker.

C'était rapide... Un peu trop à mon goût, à vrai dire. Mais avions-nous réellement le choix ? Je ne peux prendre le risque de voir leur corps tomber entre leurs mains. D'autant plus qu'il me faut maintenant rejoindre Alexeï au plus vite. Il est le seul lien qu'il me reste avec Anastasia et je suis certaine que si je trouve cette femme, je remonterai incontestablement jusqu'au Mage bleu.

Nous suivons les traces de pneu laisser sur le sol poussiéreux du désert brésilien pour rejoindre la ville la plus proche. Fort heureusement, de par notre métabolisme, nous ne craignons pas la déshydratation.

Pourtant, ça tuste !


Nous parvenons donc jusqu'à un petit village pourvu, fort heureusement, d'une banque. De fait, grâce à la carte bancaire qu'Antoine m'a offerte, je peux payer quelqu'un possédant une camionnette afin qu'il nous conduise jusqu'à une grande ville possédant un aéroport. Face à la coquette somme que je propose, on ne peut me refuser une telle offre.

Avant notre départ, j'en profite pour retourner dans l'usine désaffectée, lieu de ma rencontre avec Bertrand, le frère d'Antoine.

Malheureusement, ou peut-être heureusement, il ne reste plus rien. Nulle âme qui vive, comme je m'en doutais.

Nous montons, ma camarade et moi-même, à l'arrière du vieux véhicule et c'est pour elle un réel soulagement de ne plus avoir à marcher. Elle ne pouvait tenir plus longtemps, étant donné que ses jambes sont fraîchement guéries. Ses muscles doivent être encore ankylosés... Pourtant, elle n'a émis aucun commentaire, aucune plainte à ce sujet. J'admire, à cet instant, son courage et sa détermination.

Cette jeune femme me surprend toujours, en plus de m'intriguer.

Je la regarde fixement, détaillant sa longue chevelure mauve et son si joli minois. Elle aussi darde ses prunelles sur ma personne. En fait, nous nous toisons toutes les deux longuement, arborant un air parfaitement neutre. Pourtant, elle finit par briser cela en prenant la parole :

"T'es en train de tomber sous mon irrésistible charme ?"

Ew... Non.

Je me contente de lever les yeux au ciel, avant de tourner la tête pour regarder la route. Trop peu pour moi, je n'ai malheureusement pas la possibilité de caser "amour" dans mon emploi du temps.

"Violette, parle-moi de toi. T'étais qui, avant ?" osé-je lui demander. Un silence pesant s'installe suivant ma question, avant qu'elle ne soupire, semblant lasse ou fatiguée.

"Pourquoi pense-tu que pour moi, il y avait un "avant" ?" m'interroge-t-elle d'une voix atone.

Fronçant les sourcils à cette bien étrange demande, je me tourne de nouveau vers elle, perplexe. Que veut-elle dire par là ? Elle est un mystère à elle seule, décidément.

Quoi que...

"Que sous-entends-tu ? hasardé-je en craignant de comprendre le sens de ses paroles.

- Voyons Fleure, tu vois parfaitement de quoi j'veux parler, me répond-elle en m'offrant un semblant de sourire.

- Non. Je ne crois pas, non."

Je deviens livide et, finalement, je préfère retourner à la contemplation du paysage. Je n'ai pas compris et je ne veux, pour l'instant, pas comprendre.

Le conducteur, un sexagénaire, nous dépose donc à Lucas do Rio verde. Nous faisons un tour à l'hôtel et j'en profite pour vérifier mon... état civil, en quelque sorte. Il s'avère que je bénéficie de bien des avantages, désormais.

En effet, je viens, par exemple, d'apprendre qu'Antoine possède une compagnie aérienne dont j'hérite tout naturellement, et qu'un jet privé -rien que ça- pourra m'être affrété dès le lendemain. J'ai l'impression d'utiliser un code de triche dans un jeu vidéo, tant cela dépasse l'entendement.

Antoine... Je raccroche le téléphone préalablement acheté dans une supérette, accompagné d'un forfait mobicarte, les larmes aux yeux. Cet homme... je me suis trompée sur son compte et cela ne fait que me conforter dans ma mission de les retrouver et de les détruire. Je les aurai, je le sais.

Grâce à lui, je vais pouvoir garder les armes acquises dans l'ancien bunker et parvenir en douze heures jusqu'en Russie, à l'aéroport de Domodedovo puisque Dimitrovgrad n'en possède pas. Il nous faudra donc parcourir les sept cent soixante-quatre kilomètres restant en train. Et là encore, ce n'est pas un problème.

C'est tout de même impressionnant les pouvoirs que l'argent nous confère.

En revanche, je me demande bien comment je vais retrouver mon ami russe une fois là-bas. D'autant plus que je ne parle pas un mot de russe.

J'aviserai sur le moment.


Violette et moi possédons toutes deux notre propre chambre. Elle, s'est enfermée dans la sienne et n'en est pas même ressortie pour dîner. Je profite du peu de temps libre que je possède pour flâner dans les boutiques du coin et nous acheter des vêtements chauds. Je suis étonnée qu'à cette période de l'année, je parviens à trouver ne serait-ce que des pulls.

Je ne retourne que tardivement dans mes quartiers et je suis surprise d'y retrouver ma comparse sautant joyeusement sur MON lit. Je lui balance donc tous mes sacs, dans l'espoir de la faire cesser ce jeu stupide. Elle se tord maintenant de rire, et ce dernier doit être contagieux puisque je finis par faire exactement la même chose.

Toute la nervosité, toute l'angoisse de ces horribles et absolument cauchemardesques dernières heures s'évapore pour ne laisser qu'une masse allongée sur le sol, les reins douloureux à force de s'esclaffer.

Une douce odeur de jasmin vient titiller mes narines et je devine que ma compagne s'est douchée avant de s'infiltrer ici. Cette odeur lui va à merveille.

Je dois sentir, pour ma part, l'orange. Nous avons utilisé les flacons de gel douche mis à notre disposition par l'hôtel.

"Fleure, c'est quoi ton rêve ? me demande la jeune femme maintenant allongée sur mon lit.

- Je ne sais pas. Peut-être retrouver une vie normale, reprendre mes études, avoir des enfants, me marier, fonder une famille... ce genre de stupidités que toutes les femmes ou presque veulent. Je souhaite simplement recouvrer une vie parfaitement normale, lui réponds-je en regardant fixement le plafond, et toi ?

- Je rêve de devenir institutrice, me confie-t-elle avec un petit sourire.

- Sérieusement ?!"

Je me redresse et je lui porte désormais toute mon attention. Je suis fort étonnée par sa réponse des plus... banales, en fait. C'est inattendu et ça... ne colle pas vraiment avec sa dégaine et sa personnalité explosive.

Comme quoi, les apparences sont trompeuses. 

FugitiveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant