Le Geai

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Il était grand, très grand, peut être même un peu trop. Ses cheveux noirs de geais, décoiffés, effrontés, se battaient entre eux. Il était de dos, face à la mer, affrontant les marées et le vide lacunaire qui embellissait ses pensées. 


Les vagues languissantes et mousseuses se cognaient contre les roches saillantes de la petite falaise, et lui aussi, il voulait s'écraser doucement en contrebas de sa souffrance. C'était trop dur, trop fort, trop violent, trop tout. 


Il faisait sombre, son ombre était plongée dans le néant et les petites îles semblaient flotter au dessus des eaux marines. Il faisait froid, l'homme grelottant planta ses mains longilignes dans son imperméable décoloré. Ses lèvres bleutées tremblotaient, sa mâchoire claquait.


Une forme blanche qui danse devant lui, une douce voix qui résonne dans son crâne, mélodie anarchique d'une âme égarée. Il ferme les yeux, secoue la tête, plaque sa paume contre ses pommettes, respire un grand coup, ouvre les paupières. 


Le vide. 


Il se sent flancher, partir, devenir fou, totalement hystérique. Il sent son esprit glisser hors de lui, son cœur bat à tout rompre dans sa poitrine égratignée de douleur, il a peur.


Il se rapproche du vide aquatique, met ses bras en croix. Pense à tout ce qu'il a vécu, à elle, surtout, à sa beauté, à sa voix, à ses faits et geste, aux mots doux qu'elle lui chuchotait à l'oreille, à l'amour qu'elle lui offrait sans complexe.


Et il plongea. Le silence assourdissant, les eaux qui s'étouffent, la lumière qui l'engouffre. Il se laisse couler au fond de sa tristesse, et en un dernier souffle, il laisse son passé derrière lui, emporté par le remous des marées.

ProsodieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant