La petite cabane en bois

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C'était l'un de ces jours où les effluves iodés frappaient durement contre les vitres sales de la petite cabane de bois blanc. La mer était haute, les vaguelettes s'étaient transformées en gros rouleaux houleux, et elles cognaient à présent sur la roche brune en bas de la colline. La maisonnette, ridiculement petite, surplombant l'océan, semblait tourner dos aux effluves marines. Peut-être en avait-elle marre de l'embrun salé qui martelait de coup son visage, nuit et jour. 


L'intérieur de cet habitat n'était composé que de vieux filets verdâtres que les marins abandonnaient autre fois après la pêche, d'ailleurs, ils sentaient encore le poisson et le cidre bouchonné. Au fond, dans un coin sombre, se cachait un tonneau verdit par le temps, emplit de coquillages blancs et d'algues rouges. Une petite lanterne, qui n'était jamais allumée que par des couples aventureux, prônait sa lumière dans l'obscurité, accrochée à un petit clou rouillé, qui manquait de s'écrouler sur le plancher brun et humide.


D'ailleurs, c'était un petit couple de jeunes gens qui montait sur la colline et ouvrait la porte abîmée de la petite cabane de bois. Ils sourirent, comme s'ils étaient heureux d'avoir déniché cette maisonnette dont le monde avait oublié l'existence. A l'habitude, les quelques personnes qui y venaient, s'installaient dans le coin sombre, coincés entre la lanterne qu'ils allumaient et le tonneau qu'ils effleuraient, et s'adonnaient au plaisir subtil d'un nouvel amour. 


Mais la jeune fille à la veste beige et le jeune homme au mocassin bleu se postèrent derrière la fenêtre sale, face à la mer en colère. Le vent hurlait derrière les carreaux gris, faisant trembler les jointures, faisant sourire l'homme, qui prit la main douce de sa compagne, en frottant son pouce contre sa paume blanche. Ils n'étaient pas comme les autres, une aura apaisante et innocente entourait leurs esprits amoureux. 


C'était la belle naïveté des Hommes comblés que l'on offrait à ceux qui ne connaissaient pas la suite de l'histoire, ceux qui ne s'y intéressaient pas, qui vivaient du moment présent que leur offrait. 

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