CHAPITRE 18

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{Bonne lecture !}

Nous voilà tous réunis sur ce toit qui abrite plusieurs pages de mon histoire. Toutes mes émotions y sont passées : la joie, la tristesse, la colère, la jalousie, l'envie, la culpabilité et même la compassion. Il a vu toutes mes émotions et tous mes sentiments ressentis. Il m'a vu pleurer, rire, souffrir et sourire, il m'a vu crier, chanter, parler et psalmodier. Il a vu ce que personne n'a vu, il a entendu ce que personne n'a entendu, il m'a vu grandir, vieillir et laisser l'adolescent que j'étais faire place à l'adulte d'aujourd'hui. Ouais, ce toit a bien suivi mon vécu, ce toit m'a bien vu dans tous mes états, ce toit a bien ressenti toutes mes émotions, ouais toutes mes émotions, toutes sauf une : celle que j'arbore aujourd'hui.

La détermination.

Aujourd'hui, je me sens déterminé, déterminé à faire sortir la bambine de cette mauvaise situation. Je suis prêt à tout pour ça, quitte à mettre mon avenir en danger, ma vie en danger, je suis prêt à tout et j'irai même jusqu'à tomber dans le mauvais côté de la rue s'il le faut. La sécurité de ma petite sœur est primordiale.


Tout le monde est présent, aucun ne manque à l'appel. Malgré que la tension soit à son apogée, tous ont l'air de vouloir faire un effort pour mettre leurs différends de côté. Les groupes sont distincts : la naine et ses compagnes d'un côté et le shiteux et les Namayat de l'autre. Je me tiens au milieu des deux groupes comme si j'étais le seul lien qui les unissait, l'arbitre d'un match de foot. Yacout me rejoint au milieu du toit, étant déjà au courant de tout, pour pouvoir m'assister. Chacun est perdu dans ses pensées jusqu'à ce que je me racle la gorge pour capter toute leur attention : le spectacle peut commencer.

Je m'avance et hausse le ton pour que tous puissent m'entendre et me comprendre aisément :

- Vous êtes tous au courant de l'arrestation de Mariam, de ce qu'elle a fait et tout le reste, n'est-ce pas ?

Un brouhaha confus survole l'assemblée où on peut distinguer un vague "oui" collectif. Je poursuis :

- Son jugement est dans une semaine. L'avocat est passé à la maison il y a quelques minutes et nous a avoué que Mariam encourt une peine de cinq ans de prison ferme au maximum.

Assa se déchaîne et crie haut et fort son désaccord. Elle court vers la sortie nous hurlant qu'elle ira découper Aliyah et ses sbires en petits morceaux. Soumaëla la rattrape en vitesse et tente de la calmer. Après plusieurs minutes d'acharnement, Assa s'abandonne dans les bras de son frère en pleurant à chaudes larmes. Personnellement, je trouve ça pathétique. Je pensais pas qu'Assa avait la larme facile, après tout le monde a le droit de pleurer et peut-être qu'elle avait assez accumulé pour laisser passer ça. À chacun son avis.

Yacout reprend derrière moi :

- On a aussi espoir qu'elle prenne la peine minimale : cinq mois de sursis mais c'est très peu probable en vue de tous les vols qu'elle a commis et aussi en prenant en compte son milieu de vie. Tout le monde sait que les enfants de banlieues ont toujours été desavantagés en ce qui concerne les jugements et tout le reste. Alors on peut dire au revoir aux mois de sursis, elle prendra du ferme, c'est une certitude.


Les têtes sont baissées comme si on assistait à un deuil. La nouvelle à l'air de toucher tout le monde à l'exception de cette fille avec sa coupe court à la garçonne qui me fixe l'air exaspéré.

- En quoi tout ça nous concerne, mec ? Ta sœur prend du ferme ? D'accord. Maintenant qu'est-ce que tu veux qu'on dise ? Qu'on est tous désolés pour toi ? Dans ce cas là, je suis désolée pour toi, bonhomme. Voilà, on peut s'en aller les filles. Ciao, mio bello*! déclare Kenza.


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