Chapitre 6

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Les gradins étaient bondés, à peu près 300 élèves, 200 de notre lycée et le reste de l'autre. Nous arrivâmes au moment de l'entrée des équipes. Matthew menait l'équipe. Son arrivé était accompagné par les cris des supporteurs.  Il était suivi du reste l'équipe les autres insaisissables et Antony faisait partie des derniers à entrer.  Il ne jouait pas tout de suite.
Le match commença. Je ne le suivis pas trop, je ne comprenais pas bien le Rugby. Quand Antony entra sur le terrain et se mit à jouer, Aïcha et moi l'encouragèrent. Il se fit plaquer par terre mais se débrouillait bien- enfin c'était ce que me disait Aïcha. Je ne m'étais jamais intéressée au Rugby. Notre équipe gagna finalement 27 à 20.  Je n'avais pas trop compris comment ils étaient arrivés à ce score mais ce n'étais pas ma préoccupation première.
Nous sortîmes des gradins et attendîmes Antony dehors. Quand il sortit, on l'acclama et il nous sourit. Il était fatigué mais il avait un sourire éclatant.
Aïcha et moi étions venus en bus mais Antony possédait sa propre voiture et nous proposa de nous emmener.  La maison de Matthew se trouvait au bord du village, à un kilomètre de l'arrêt de bus que je prenais pour aller à l'école. C'était un vieux petit manoir victorien à la lisière des bois. Un assez grand jardin l'entourait. Ça devait faire longtemps qu'on ne l'avait pas entretenu car l'herbe était haute et des mauvaises herbes poussaient un peu partout. Des lianes recouvraient une partie des murs et une des fenêtres en était totalement recouverte. D'autres étaient condamnées. Une petite allée menait aux portes de la bâtisse.
Une dizaine de voitures étaient garées dans le jardin et dans l'allée. Des élèves se dirigeaient vers les portes qui étaient grandes ouvertes. Antony se gara à l'extérieur de la propriété. A peine descendue de la voiture -mon sweet à la main-, mon mal de tête qui avait cessé depuis ce midi réapparut. De loin, on pouvait entendre les basses de la musique. J'eus bientôt l'impression qu'on me martelait le cerveau de coup de marteau. Plus on s'approchait plus ma migraine amplifiait. A quelque mètre de la maison, je ne regardais que là où je m'étais les pieds. Si Antony ou Aïcha me parlaient, je ne les entendais que vaguement, un bourdonnement avait commencé à résonner dans ma tête.
On rentra surement car la musique était devenue assourdissante. J'avais maintenant l'impression, en plus du bourdonnement et des coups de marteau, qu'on plantait plusieurs couteaux dans ma tête. Quelqu'un, peut être Aïcha m'attrapa la main et me guida dans une des pièces du manoir. Il y avait des élèves du lycée que j'avais déjà vu de loin. On arriva devant un bar et je me retrouvai avec un verre rempli de coca peut-être. Aïcha me demanda si j'allais bien enfin je n'avais entendu qu'une bride :
« Tu es... tout va bien ?»
J'acquiesçai d'un hochement de tête mais je le regrettai aussitôt. La pièce autour de moi commença à tourner. Je réussi à m'assoir sur -surement- une chaise et je pris un comprimé antidouleur qui se trouvait dans la poche de mon sweet. J'en pris un deuxième puis un troisième. 10 minutes, une heure, deux heures je ne saurais le dire, mon mal de tête commença à diminuer. Je pus enfin observer ce qui se passait autour de moi. La fête battait son plein. J'étais surement dans le salon qu'on avait transformé pour l'occasion en un mini boite de nuit. La lumière était tamisée et la musique changeait toutes les deux ou trois minutes. Plusieurs élèves dansaient collées entre eux. Sur le côté le canapé qui devait être d'une couleur assez sombre, avait été collée contre le mur et devant lui la table basse où jonchaient des verres, des bouteilles de bière à moitié vide. D'un autre côté de la pièce une fille que je n'avais jamais vue et un élève de ma classe s'embrassait fougueusement. J'étais assise près d'un bar en bois. Tout comme la table basse, trainaient des verres et des bières vides. Un autre couple s'embrassait et même plus, tout près de moi. Je me levai avec précipitions et manquai de faire renversé la chaise. En balayant une seconde fois la pièce, je ne vis ni Aïcha ni Antony. Je me mis à leur recherche. Je passai dans plusieurs pièces dont un hall, la cuisine et un bureau avant de les retrouver à l'arrière du manoir dans le jardin. Ils parlaient avec Amande et Miranda. Je les rejoignis.
- Ah te voilà enfin ! s'écria Aïcha en me voyant.
Tous les yeux se tournèrent vers moi.
- Qu'est-ce que tu avais ? me demanda Antony en me donnant une bourrade.
- J'avais une atroce migraine.
- Ça t'arrive souvent ? s'enquit Amande.
- Heu j'en ai de plus en plus souvent mais maintenant que j'y pense elles ont commencé depuis... je m'arrêtai net.
Elles avaient commencé depuis l'accident. Ça avait commencé par une migraine dans le mois, puis une par semaine et maintenant tous les jours. Mes pensées dérivèrent de nouveau vers l'accident. Une vague de chagrin m'envahit et mon cœur se serra. Etait-ce l'accident qui provoquait mes migraines ?
- ...Marie, depuis quand ? m'interrogea Miranda qui interrompu le cours de mes pensées.
- Euh non rien...
Miranda et Amande semblèrent dubitatives mais ne m'interrogèrent pas plus. La conversation dériva sur le match et le jeu d'Antony et des insaisissables.  Les filles s'extasièrent sur le jeu de Matthew. Au même moment, ce dernier sortit de la maison avec le reste de sa bande.  Je me concentrai sur ce que disait Aïcha mais ne pus m'empêcher de jeter des coups d'œil dans sa direction.  Il portait un jean et un t-shirt blanc qui moulait ses épaules musclées. Ces cheveux bruns étincelaient étonnement à la lueur de la lune. C'était incroyable.
J'écoutai Amande se plaindre des cours d'histoire quand les poils de ma nuque se hérissèrent. Je me retournai et mes yeux croisèrent des yeux bruns et brillants. Je soutenus un instant le regard de Matthew puis m'en détournai. Mon mal de tête repris à cet instant.  Ce fut de plus en plus dure pour moi de me concentrer. Antony me donna un verre que je vidai d'un coup. Mais mon mal de tête empirait. Chaque bruit me faisait tressaillir et au moindre mouvement de tête tout autour de moi tournait. Je me massai les tempes mais ça ne servait à rien. Je me dirigeai vers la maison lorsqu'on m'attrapa le bras et m'entraina à part. En me tournant vers la personne qui me tenait, je découvris Matthew. Je me dégageai rapidement en secouant le bras ce qui provoqua une nouvelle vague de douleur. Malgré ma migraine j'essayai de comprendre ce qu'il me disait.
- ...Julie ! s'énerva Matthew en me prenant de nouveau le bras. Suis-moi !
- Je...je...
Mon mal de tête s'intensifia et ma vue se brouilla. Je sentis mes larmes coulées sans que je puisse les retenir. C'était horrible, j'avais l'impression qu'on me broyait le cerveau morceau par morceau. La douleur était insupportable à présent. Matthew me fit m'assoir dos contre un arbre. Il me dit quelque chose que je ne pus déchiffrer avant de partir.
Après quelques instants, un frisson me parcourut. Clignant plusieurs fois des yeux, je me rendis compte que je me trouvais à un mètre à peine de la lisière. Un nouveau frisson me parcourut et un sentiment d'insécurité m'envahit. Mon cœur se mit à battre de plus en plus vite et les poils de mon dos s'hérissèrent. Une chaleur m'enveloppa soudainement. Elle parcouru mon corps, le réchauffa. Elle s'enfonça à l'intérieur de moi, visitant mes muscles et mes organes. Je la sentis s'arrêté sur mon rein ou plutôt celui de mon oncle. Puis elle se dirigea vers mon cœur qui cessa de battre vite. Elle me procura un sentiment de sécurité infinie. Elle m'invita alors à me lever. Au début mon corps résista, puis elle devenu plus pressante, s'emparant de mes jambes. Le sentiment de sécurité que je venais de ressentir s'envola à cet instant. Je résistai de toute mes forces pourtant mes jambes ne m'obéissaient plus et je me levai. La chaleur augmenta et me pressa d'avancer. Je commençais à transpirer. Elle n'était plus rassurante, elle me faisait peur. Un frisson me parcourut. Elle essayait de rentrer dans mon cerveau mais quelque chose la bloqua. Elle réessaya une nouvelle fois et une boule de chaleur entoura mon visage. Un cri s'échappa de ma gorge. La douleur était bien pire que celles de tout à l'heure, elles n'étaient rien comparées à celle-là. J'avais l'impression qu'en plus d'être dans un four des millions de perceuses tentaient de me percer le crâne. Des larmes se mirent à couler sur mes joues et un autre cri sortit de ma gorge. J'avais envie que ça cesse, j'aurais voulu mourir juste pour que la douleur s'arrête.  Je mis mes mains sur mon visage mais à peine elles le touchèrent qu'elles se mirent à me brûler. Un nouveau cri m'échappa. En plus de me torturer le crâne, la chaleur guidait mon corps, m'obligeant à marcher. Je voulais m'arrêter, tentais de m'arrêter mais rien à faire je marchais toujours. La chaleur était devenue presque brulante. Elle emprisonnait chaque muscle de mon corps. Je la sentis se réjouir de ce qui m'arrivait. Les larmes coulaient sur mon visage sans s'arrêter. A chacune de ses nouvelles tentatives de s'emparer de mon cerveau, je criais de nouveau. Ses attaques étaient de plus en plus violentes. Je n'arrivais qu'à me concentrer sur la douleur. Je voulais mourir maintenant.

***

La chaleur disparut aussi soudainement qu'elle était apparue. Je me rendis compte que la douleur avait cessé pourtant mes larmes continuaient à couler et mes mains me brûlaient toujours. Je regardais autour de moi. Je m'étais tellement occupé à résister que je ne mettais pas rendu compte d'où j'allais. J'étais au plein milieu des bois. Je ne distinguais que des arbres autour de moi. Combien de temps avais-je marché ?  Soudain, mes jambes cédèrent sous mon poids. J'avais l'impression d'avoir marché pendant des heures d'affilées, sans m'arrêter. Et chaque parcelle de mon corps me brulait. En les regardant, je me rendis compte que mes bras étaient écorchés et mon collant déchiré. Mes mains étaient rouges comme si je m'étais brûlée. Mes bottes étaient pleines de terre.
Je regardais de nouveau autour de moi. Les bois étaient sombres. J'avais l'impression qu'ils étaient envahis par quelque chose de...dangereux. Le vent souffla et me glaça le corps. Un autre frisson me parcourut, je me sentais en danger. Des voix se frayèrent un chemin jusqu'à ma tête. C'est elle ! dit une des voix. Elle est forte ! ajouta une autre. Au même moment, un cri de loup se fit entendre. Un calme inquiétant s'empara de la forêt. On n'entendit plus le chant des chouettes. Les voix revinrent dans ma tête. Ils arrivent ! s'écria une. Prenez-la vite ! s'exclama une autre. Ils sont trop proches, partons ! fit une autre. Puis elles disparurent. Mon mal de tête reprit d'un coup et une fatigue s'empara de chaque parcelle de mon corps. Alors que je tentais de lui résister, je vis des bottes, les mêmes bottes qu'après l'accident. Je sursautai et m'écroulais sur le sol. Ma tête se cogna sur quelque chose de dur et se fut le trou noir.

Gealach : Brisée (TOME 1) [TERMINEE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant