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Le nombre des années n'avaient pas changé les choses : les cheveux de James étaient toujours aussi désordonnés et Claire souriait toujours de la même façon, un petit sourire en coin si caractéristique. Dans son sommeil, James marmonnait des paroles incompréhensibles, les traits posés, serein, il ressemblait à un petit enfant dans les bras de sa maman, sentant toute cette protection maternelle. La jeune femme le dévorait des yeux, souriante. Nostalgique, elle repensait à cette année, ce tournant dans sa vie : la rencontre entre James Carragher, éducateur et elle, lycéenne et délinquante. Que serait-elle devenue sans lui ? Il lui avait offert une nouvelle vie en lui accordant sa confiance, en prenant parfois les décisions qu'il fallait à sa place, en lui imposant ses choix mais surtout, en lui ouvrant son cœur. Au début, leur relation était vouée à l'échec du fait de l'entêtement de l'adolescente et de l'intransigeance de son éducateur. Dès ses premiers pas au centre St Charles, Claire se révélait être un cas difficile. Se sentant humiliée dès le départ par la directrice de l'établissement, la jeune fille était bien décidée à montrer qui elle était. A boycotter cette stupide évaluation de sport.

Le gymnase était vide. Silencieux. Terrifiant. Chargé de souvenirs. Victoires. Défaites. L'esprit sportif était si fort que Claire en eut la chair de poule. Elle scrutait les maillots des joueurs les plus méritants de l'équipe de Basket accrochés sur les murs. Les ballons signés de la main de l'équipe de Football championne du district. Claire avait déjà fait beaucoup de compétition sportive, étant capitaine de l'équipe féminine de football d'Ellstown. Enfin, plus maintenant. Quitter cette équipe, sa deuxième famille fut une épreuve douloureuse. Perdue dans ses pensées, elle avait perdu la notion du temps, et c'est sans surprise que James fut obligé de venir la chercher. Agacée de tout ce cirque allant de sa tenue brodée du blason du centre au sport en général, Claire se leva et sortit du vestiaire, sans un regard pour l'éducateur. Ce qui ne fut pas du tout à son goût. La retenant par le bras, James força la jeune fille à lui faire face. Si leurs yeux étaient des éclairs, ils se seraient mutuellement assassinés. S'observant ainsi pendant quelques secondes, James sentait que son élève prenait l'ascendant. Il lui découvrait une nouvelle facette : la manipulation. Se jurant d'en finir au plus vite avec toutes ses formalités, il était bien décidé à lui montrer qui faisait la loi ici. Elle n'était plus la reine de son collège, de son lycée. Non. Elle n'était plus qu'une parmi tant d'autres. Et ça lui était insupportable.

- "Avance Austen. Et juste un petit conseil, parce que tu n'avais pas l'air de comprendre la première fois : je décide, tu exécutes. Si tu veux passer ta première semaine en quarantaine, ne te retiens pas. Tu n'as jamais été aussi proche de battre ce record. Tout dépendra de cette séance et de ton implication. Allons-y maintenant. J'espère que tu sais courir."

Courir ? Qu'est-ce qu'il croyait cet idiot ? Qu'elle était une impotente incapable de se bouger ? Il était très mal tombé. Pendant toute son enfance, son père l'avait poussé au maximum de ses capacités, multipliant les entraînements. Demandant toujours plus. Eternellement insatisfait. Claire avait cessé de compter les heures passées au gymnase ou au stade à courir. A s'exercer toujours plus. Alors, oui, elle savait courir Mr Carragher. Mais le voudrait-elle ? Céderait-elle dès le premier jour ? Rien n'est moins sûr.

Un dernier regard hargneux envers son éducateur et Claire s'exécuta : James lui avait expliqué le déroulement de la séance. Ils commenceraient par une séance de footing pour s'échauffer, puis les activités varieraient entre l'effort physique intense, la musculation, et divers sports collectifs. L'adolescente faisait le strict minimum ce qui avait le don d'agacer l'éducateur. Pendant la course, sa foulée était tellement lente qu'il comprit très vite qu'elle se moquait de lui. Claire était à peine essoufflée. Il siffla, énervé, et la jeune fille s'arrêta. Attendant la suite des évènements. Elle avait remarqué l'air colérique qu'il avait adopté et savait qu'elle allait le regretter. Elle n'y coupa pas.

Le tournant d'une vie - Partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant