Chapitre 10 : clope consumée sur un banc rouillé.

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   « L'inspiration, ça vient ?

   — Page blanche.

   — Oh. »

   Marie se mordit la lèvre, les yeux fixés sur moi.

   « Pourtant, un sujet d'invention, c'est facile, non ?

   — J'en sais rien ! J'y arrive pas, c'est tout ! »

   La brune reposa son stylo en croisa les bras autour de sa poitrine, l'air de ne pas savoir quoi faire.

   « Raph, je veux bien t'ai-

   — Non, tu veux pas ! Casse toi !

   — Raph...

   — Casse toi je te dis ! Personne t'a demandé de venir ici !

   — Si, Charles.

   — Vous foutez pas de moi, vous pensez qu'à vous ! Dégagez de ma vie tout les deux, pour vous mettre en couple vous êtes là, mais quand j'ai besoin d'aide c'est tellement mieux de fricoter sans penser à moi, c'est vrai ! »

   La documentaliste m'accusa du regard et je froissais la feuille pour la glisser dans mon sac en même temps que ma trousse et quitter le CDI d'un pas furieux, Marie à mes trousses.

   « Raphaëlle, reviens ! Reviens tout de suite !

   — Retourne avec Charles et fais plus attention à moi, articulais-je durement.

   — Qu'est-ce qu'il s'est passé ? m'interrogea-t-elle, arrivée à mon niveau.

   — Passé de quoi ? Il s'est rien passé du tout.

   — Le douze. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

   — Rien d'important. Ta rencontre avec Louise l'est quinze fois plus. »

   Marie croisa une seconde fois les bras, perplexe.

   « Ça fait une semaine que tu es distante. Il s'est passé quelque chose, ne va pas me dire le contraire.

   — Oui, il s'est passé quelque chose, mais j'ai aucune envie de t'en parler. Toi et ton copain m'avez bien démontré que vous n'étiez pas mes amis.

   — C'était compliqué, avec Louise, on a pas pensé à te demander comment ta soirée s'était passée. Je suis désolée. »

   Elle semblait sincère, mais j'étais trop énervée pour le remarquer. Les souvenirs de cette soirée me piquaient le cœur, revenaient comme les vagues froides de la mer hivernale.

   « Ça s'est arrangé au moins, tant mieux pour vous.

   — Pas vraiment. »

   Elle secoua nerveusement la tête avant de me prendre le poignet; le regard de biche de Marie avait peut-être fait succomber Charles, avec ses prunelles se voulant attendries, mais ça ne me touchait pas le moins du monde.

   « Raph, dis moi ce qui ne va pas, s'il te plaît, c'est pas bon de garder les choses pour soi. »

   Je reculais vivement en enfonçant mes poings dans mon manteau, les yeux dans le vide.

   « Raphaëlle, insista-t-elle. Ça te fera du bien.

   — Ouais c'est ça, raillais-je en sentant les larmes me monter aux yeux.

   — Va-y, m'invita-t-elle doucement, la main posée sur mon bras.

   — Ouais, j'y vais. »

Dernière valse.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant