Chapitre 4

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« La seule personne que vous êtes destiné à devenir est la personne que vous déciderez d'être. » Pam Finger

Le temps est passé à une allure folle. À peine arrivé, que le professeur s'en va vers un autre cours en nous laissant tous en PLS sur nos tables, les mains tremblantes face à la vitesse à laquelle il faut prendre des notes !

Melody, qui a déjà étudié une année à l'université, n'a pas été choquée de la rapidité d'élocution du maître de conférences contrairement à tous les anciens lycéens, dont moi. Elle a réussi à écrire avec attention sur son ordinateur sur tout ce qu'il a dit alors que je peinais à aligner trois mots sur ma feuille sans en oublier la fin de la phrase. Ma mémoire de poisson rouge n'a pas aidé dans cette affaire.

Grâce à la générosité de ma voisine, j'ai pu rattraper mon retard en regardant de temps à autre sur son cours. Elle a même réussi à faire une mise en page sur son document. Une superwoman de la prise de note !

Je pense que je vais devenir avec un peu d'entraînement la reine des abréviations d'ici la fin de l'année comme à peu près tous les étudiants présents. N'ayant pas cours avant l'après-midi, je décide de me rendre dans un café proche du campus pour travailler ce premier cours avec mes notes et celle que Melody m'a envoyée sur mon téléphone.

En échange de son aide, je lui propose de venir ce soir à l'appartement pour boire un coup et manger ensemble, ce qu'elle accepte avec grand plaisir. Puis je m'éclipse précipitamment, car un gros besoin de caféine se fait sentir pour ne pas sombrer dans un sommeil profond.

Heureusement pour moi, ce n'est pas l'heure de pointe des étudiants et je suis servie assez rapidement. Je pars m'installer près d'une baie vitrée et ainsi admirer la magnifique pelouse du campus tout en bossant studieusement sur ce premier chapitre d'introduction au droit.

L'endroit est plutôt paisible, mis à part un groupe de filles qui semblent ne pas s'être vues de l'été à les entendre piailler comme des gamines. De temps à autre, je prends le temps d'observer ce qu'il se passe autour de moi. Rester concentrée plus de dix minutes est impossible avec tous les bruits environnants ainsi que les va-et-vient des divers jeunes venant chercher leurs cafés.

Non loin de moi est attablée une bande de garçons, dont l'un d'entre eux se trouve être l'un des amis à mon frère rencontré la veille, celui avec les yeux à damner. C'est au moment où mon regard dérive vers eux que Cameron choisit de faire une entrée remarquable en criant ravi de rejoindre ses potes, ce qui ne manque pas de faire taire les étudiantes présentes. Elles s'empressent de se retourner avant de voir qui est le joyeux luron qui a perturbé leurs retrouvailles.

Pour ne pas me faire repérer par mon adorable frangin, je préfère rassembler mes affaires et partir discrètement chez moi. De toute manière, ce n'est pas ici que j'aurais réussi à boucler ce chapitre. Une fois ma capuche mise, les yeux dirigés vers le sol, je tente de m'approcher de la porte de sortie jusqu'à ce qu'un bout de papier vient curieusement rencontrer ma tête.

— Touché, sœurette ! crie mon frère dans tout le café attirant tous les regards vers ma personne.

Moi qui voulais partir en mode incognito, c'est raté.

— Cam, je ne pensais pas te trouver ici de si bon matin, murmuré-je tout en me baissant pour ramasser le bout de papier lancé par mon frangin.

— Je t'avoue que moi non plus, mais la fille ne m'a pas donné envie de rester plus longtemps à ses côtés !

Je hausse les yeux au ciel, qu'est-ce qu'il peut être exaspérant, quand il veut. Il est obligé de tout ramener à ses activités pas très catholiques et ça a le don de le faire rigoler comme ses amis présents dans ce café. Son copain aux magnifiques yeux gris est pris lui aussi d'un fou rire au vu de ce que Cam leur raconte. Moi, tout ce que je retiens, c'est que ses yeux sont envoûtants.

— Alors comment s'est passé ton premier cours ? me demande mon frère en me sortant de ma paralysie face à la profondeur du regard de son pote. Tu n'as pas eu trop peur d'être toute seule. C'est une vraie trouillarde, reprend-il en s'adressant à ses camarades qui rient de plus belle.

Un seul mot arrive à franchir la barrière de mes lèvres. Peut-être, un peu crue, mais au moins ma mère n'est pas là pour me faire une réflexion.

— Connard !

Je pars telle une furie en faisant claquer la pauvre porte du café qui n'a rien demandé sous les regards interrogateurs de mon frère et sa bande d'abrutis. Je déteste que Cameron me traite encore comme une gamine et surtout devant d'autres gens. Je ne pense pas être l'unique personne à avoir peur d'être seule le jour de la rentrée. J'ai sans doute fait une erreur monumentale en racontant à Cam ma principale angoisse de cette rentrée pendant le long trajet en voiture la veille.

Quand je sens mon portable se mettre à vibrer au fond de la poche de ma veste, je sais tout de suite que cet idiot va venir s'excuser, comme à son habitude, de m'avoir blessée. Il ne réalise pas à quel point, ses phrases peuvent avoir un impact sur l'avis des gens sur ma personne. La dernière chose que j'ai envie, c'est que tout le monde pense que je ne suis qu'une gamine de dix ans.

Cam : Je m'excuse, je trouvais ça drôle et je n'étais pas le seul. La prochaine fois prend ça à la déconnade sœurette.

Maylis : Ah ah ah ! J'en rigole encore, espèce d'abruti fini !

En arrivant chez moi, je pose mes affaires sur le sol du salon et m'affale en soupirant sur notre canapé moelleux. Un petit bout de papier traîne sur la table avec la magnifique écriture de ma Kaitlyn.

« T'inquiètes poulette, tu auras un rapport détaillé ce soir. Ps : j'espère que ta première matinée à l'université s'est bien passée. Bisous  »

Elle aurait pu être pire. J'ai fait la connaissance d'une fille, c'est déjà un bon point pour ma vie sociale. Cependant, grâce à mon frère adoré, une vingtaine de personnes que je ne connais pas, pense que je suis une gamine qui a peur de tout. Bon, après tout ce n'est pas tout à fait faux, mais quand même !

Mon chapitre d'introduction au droit attend sagement dans mon sac que je le reprenne pour le bosser tandis que la télécommande de la télévision m'appelle d'une force que je ne peux y résister. Tant pis je le travaillerai plus tard. Je suis trop faible face à la distraction. La prochaine fois, j'irai à la bibliothèque !

Je vais avoir le temps de rattraper les quelques épisodes de ma série que j'ai en retard avant de partir pour mon cours en début d'après-midi.

*

La conférence de droit international est déroulée à une vitesse folle à croire que tous les professeurs se sont passé le mot. Je vais devoir m'habituer à ce nouveau rythme totalement différent de celui du lycée. En voyant ma détresse durant le cours, Melody me propose de me le prêter comme ce matin.

— Tu vas t'y faire, ne t'en fais pas. D'ailleurs, je te conseille d'acheter un ordinateur, c'est vraiment plus pratique et rapide, sauf si tu peux écrire vite. Et puis en rentrant chez toi, tu dois juste faire une mise en page contrairement à des notes papier que tu es obligé de réécrire entièrement. Bon après chacun sa méthode.

En effet, après le décès précoce de ma main droite, je pense que c'est ma solution miracle pour pouvoir suivre sans souffler toutes les trois secondes de douleur.

À la fin du cours, un jeune plus âgé que nous, passe dans tous les rangs afin de nous distribuer des prospectus pour une fête étudiante qui a lieu ce soir dans l'une des fraternités du campus. Mon plan de bosser mes cours dans la soirée semble être compromis au vu de l'enthousiasme de mon amie.

— Qu'est-ce que tu en dis ? Ça pourrait être sympa, non ? me questionne Melody en souriant de ses dents.

— Pourquoi pas ! De toute façon si ma colocataire et meilleure amie en entend parler, elle va me forcer à y aller.

— Je pense que je vais bien m'entendre avec elle. Fêtarde est mon deuxième prénom, d'ailleurs c'est sans doute pour cela que j'ai raté ma première année, dit-elle en rigolant. On part chez toi comme prévu, comme ça on prévient ta coloc pour le plan de ce soir.

— Ça marche, c'est parti pour ma première soirée étudiante !



L'envol du papillon [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant