Chapitre 21

214 27 33
                                    

"Les au revoir les plus douloureux sont ceux qui n'ont jamais été prononcés ou jamais expliqués."

Le trajet jusqu'à la maison familiale est assez pesant. Aucun de nous trois ne parlent, c'est un silence de mort. Mes pensées envahissent mon esprit. J'essaie de refouler chaque larme qui tente de s'échapper de mes yeux. Au fur et à mesure que le temps passe, je parviens à penser à autres choses que le visage de ma mère ce matin et au trait de visage de mon papa, que je ne verrai plus jamais. 

Je nous revoyais avec mon père quand nous étions encore jeunes, durant les voyages en voiture. Cameron et moi adorions poser la fameuse question "combien de temps il reste avant d'arriver". Il en avait tellement marre, qu'il nous demandait de compter grâce au nombre de kilomètres restants et la vitesse à laquelle nous roulions. Depuis ce temps-là, j'adore les mathématiques alors que c'était ma bête noire. Les calculs mentaux et moi, ça ne fait qu'un. Merci Papa et ses idées farfelus pour nous faire taire en voiture. 

En arrivant devant chez nous, beaucoup de monde nous attendent devant la porte d'entrée. Mes grands-parents paternels et maternels sont présents ainsi que ma tante. Certains visages qui ne me sont pas familiers se trouvent là aussi. Qu'est-ce qu'ils peuvent bien tous faire là ?

Mon cœur se serre de plus en plus en voyant l'ensemble de ma famille nous fixer. Je ne sais pas quoi faire, agir normalement en allant leur dire bonjour ? Courir pour pleurer dans leurs bras ? Ou simplement rester sur place comme une plante ayant pris racine. Me voyant perdue, la main de mon frère se glisse lentement dans la mienne, sans me regarder. 

Cam a le don de pouvoir m'apaiser intérieurement. Je sais que tout va bien se passer quand il est auprès de moi. J'ai toujours été très proche de lui-même si la plupart des gens pensent le contraire. Je ne dirais pas que nous sommes fusionnels, mais nous nous comprenons très facilement, sans avoir à prononcer le moindre mot. Devant les autres, lui comme moi, nous agissons un peu étrangement comme pour ne pas montrer que nous sommes proches. Un peu étrange comme façon de penser, mais c'est comme ça. Aux yeux des gens, c'est juste un frère avec qui je ne suis pas particulièrement proche et à nos yeux, c'est comme une autre partie de moi-même que je veux garder secrète. 

J'entre dans ma maison en compagnie de Cameron, ainsi que du reste de ma famille. Ma mère parle avec eux tellement naturellement, sans pleurer, que je me demande si tout cela est vraiment réel. D'après la conversation que j'écoute furtivement, mon père serait présent dans le salon. C'est donc pour cela que tout le monde est venu à la maison. 

— Il voulait rentrer à la maison pour partir sereinement, mais l'hôpital l'en a dissuadé. J'ai pensé qu'il serait mieux ici que dans une de ces chambres lugubres loin de chez lui, s'exclame ma mère en direction de ses parents et ceux de mon père. 

— Tu as bien fait, lui dit ma grand-mère en la prenant dans ses bras, il aurait apprécié, j'en suis convaincue. 

Je décide de rompre le contact avec Cameron pour aller me réfugier dans ma chambre. En grimpant les marches de l'escalier, ma famille et les amis de mon père rentrent tous dans le salon. Les pleurs commencent à se faire entendre. J'aperçois très rapidement une sorte de lit et un corps allongé dessus, son corps. Je reconnais entre milles, le pantalon préféré de mon père, celui qu'il mettait constamment pour les occasions importantes comme les repas familiaux ou mon entrée à l'université. 

Je ne veux pas en voir plus. Des larmes commencent à dévaler mon visage quand j'arrive dans ma chambre d'enfance. Allongé sur mon lit, je prends mon ancien doudou et je me mets à pleurer toutes les larmes de mon corps. Mon père est à la maison, mais ce n'est plus vraiment lui. C'est un cauchemar. Quand est-ce que je vais me réveiller ?

L'envol du papillon [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant