Chapitre 19

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" C'est difficile de partir quand on veut rester, de rire quand on veut pleurer, mais surtout de faire une croix que les personnes qu'on a tant aimées. "

— Papa, murmuré-je d'une toute petite voix en le regardant branché à toutes ses machines. 

Mon père, allongé sur son lit d'hôpital, me regarde avec peine. Dans ses yeux se reflète une immense tristesse que soutenir son regard en devient dur. Il a énormément changé depuis la dernière fois que je l'ai vu. Lui, qui d'habitude avait un peu de ventre et était un peu grassouillet, n'a plus que la peau sur les os à certains endroits de son corps. Par contre, au niveau de son bras gauche, c'est totalement le contraire. Celui-ci ne ressemble en rien à ce qu'il était avant, tellement il est gonflé. Je me demande si c'est vraiment mon vrai père au vu de son visage très fin et cerné.  Je dois être dans un cauchemar, c'est obligé. Cette personne-là ne peut pas être mon papa, c'est impossible !

Autour de moi se trouve ma mère au côté de l'infirmière de mon père, ainsi que Cameron qui regarde à travers la fenêtre. Ce ne serait pas à cause de l'état de mon père que mon soi-disant frère n'était pas bien pendant des semaines. Il n'a pas pu me cacher, lui aussi, la maladie de mon père. Cameron ne me ferait pas ça, on se dit tout depuis tout petit. 

Me voyant totalement désemparé face à la vue de mon père amaigri, c'est l'infirmière du prénom de Lydia qui me parle la première. Aucun membre de ma famille n'ose me parler, tu parles d'une famille ! 

— Maylis, ta mère m'a demandé de t'expliquer pourquoi ton père se trouve ici, pour que tu comprennes mieux ce qui va se passer par la suite, me dit-elle très sereinement, en même temps, elle doit avoir l'habitude de ce genre de discours. 

— Pourquoi ma mère ne peut pas le faire elle-même ? M'emporté-je à bout de nerfs. 

— Elle ne veut pas avoir des propos qui ne correspondent pas à la réalité et qui de mieux qu'une personne qualifiée pour te l'expliquer ? 

— Des médecins non ? Ce n'est pas le but de leur travail, d'expliquer la maladie des patients aux familles ? 

— Si, en effet, c'est leur boulot, mais malheureusement Docteur David, qui suit votre père depuis le début ne peut pas être présent aujourd'hui, car il est en consultation à l'extérieur de la ville. Donc, c'est moi qui me charge de te l'expliquer. Je suis toujours présente quand ton père vient le voir, de ce fait, je connais parfaitement la maladie de ton papa. 

— Depuis qu'il va voir le docteur, comment ça ? Mon père est malade depuis combien de temps ? lui demandé-je en pleurant de plus belle. 

— Ton père a été admis à l'hôpital, il y a quelques semaines pour un cancer, me dit-elle de but en blanc, comme si elle récite un texte appris par cœur. C'est un cancer de stade quatre qui était déjà généralisé avant que ton père ne vienne à l'hôpital. Les analyses, qui détermineront le cancer d'origine, sont en cours et les médecins font tout pour le savoir rapidement. Les gonflements que tu peux observer sur le côté gauche de ton papa notamment sur les avant-bras et les jambes sont des œdèmes. Mais rassures-toi, ceux-ci ne font pas mal à ton père. Ils le handicapent juste pour marcher ou se servir de sa main. Ce sont des conséquences de l'avancement du cancer. Pour le moment, ton père a dû mal à parler, car cela lui demande beaucoup d'énergie, mais nous lui donnons les médicaments pour arranger cela. 

Après son explication, à laquelle je n'ai rien compris sauf le mot cancer, j'observe à tour de rôle, mon père, qui me regarde en attendant que je prononce le moindre mot, ma mère, qui pleure en silence et mon frère, qui a toujours le regard vague, à croire qu'il n'est pas vraiment avec nous dans cette pièce exiguë. Je n'ose plus bouger, je ne sais plus quoi faire. Dois-je pleurer, crier, m'enfuir ? Pourtant je ne fais rien de tout ça, je reste sur place à me demander ce que je fais ici, si tout cela est vrai. 

L'envol du papillon [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant