64. Fantômes du passé

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« Broken
Since I was
Born »

« Brisé.e depuis que je suis né.e »

La plante de mes pieds caressait l'herbe d'une douceur ésotérique qui s'apparentait à ce désir profond tant recherché, mais pourtant d'une obscurité sans fin

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La plante de mes pieds caressait l'herbe d'une douceur ésotérique qui s'apparentait à ce désir profond tant recherché, mais pourtant d'une obscurité sans fin. Cette attirance qui guidait nos pas et que nous rejetions, nous tenant fermement aux pics du rebord de la falaise de peur de tomber dans cet inconnu ardemment désiré. Il était effrayant par ses ombres méconnues qui se dessinaient sur les parois, jaillissant de cette obscurité occulte.

Le silence du vent envahissait l'épaisse forêt qui m'entourait, aux fougères et herbes denses, aux cimes noircies par les nuits. Elles se distinguaient à peine de la voûte d'un bleu obscur parsemé d'étoiles brillant faiblement autour du halo rouge sang de la pleine lune dont la tête s'emparait d'une grande partie du ciel.

La douleur s'était volatilisée tel un souffle réticent qui faisait frémir mon échine tendue dans les airs glaciaux qui s'engouffraient au travers des lambeaux de chair de tissus. Méconnaissable, le visage aussi ensanglanté que des peaux qui ne furent jamais pures. Je jetai un vaste regard autour de moi, m'efforçant de reconnaître les lieux. Je sus que l'ancien chêne, l'arbre de vie perdu dans les tréfonds de mon domaine, n'était pas si éloigné. Je grimaçai aux premiers picotements de mes plaies qui devraient bien vite cicatriser, et mon esprit repoussa la douleur.

Le froissement des ailes d'un volatile, qui se mêlait aux feuilles, résonnait, tout proche de mon oreille, provoquant un sursaut à l'intérieur de mon être. Au loin, le hululement d'une chouette suivi des croassements d'un corbeau m'annonça un présage funeste.

Je tentai un pas en avant, mais je reposai mon pied, sentant une surface métallique, mais chaude, l'effleurer. Un arc d'or à l'unique flèche d'argent de lune inversé gisait à mes pieds, mes armes pour ma dernière bataille. Mes doigts se refermèrent sur la poigne d'un cuir souple et caressant de l'arc que je joignis à la flèche, les tenant fermement d'une main sûre, incapable désormais de les libérer. De l'autre, j'effleurai du bout de mes pulpes mon poignard vibrant.

Le souffle d'un gris brumeux s'échappant de mes lèvres était le seul mouvement dans ce calme trompeur jusqu'à ce que je sente une petite main tirer sur le bas de ma robe. Une petite fille d'une dizaine d'années, même plus jeune, m'observait me perdre dans la contemplation de la forêt sans savoir quelle direction entreprendre de ses grands yeux bruns. La peau cadavérique, sa robe blanche était souillée au niveau du cœur par une flèche plantée qui laissait jaillir un sang déjà sec sur le tissu. Une horripilation naquit à la baisse de la température et s'accentua à l'entente de ses mots.

– Veux-tu jouer avec moi ? me demanda-t-elle, tout en mâchouillant une poupée salie et cassée.

– Qui es-tu ?

Ma voix était frêle, effrayée par cette apparition. Elle était même d'une crainte méfiante à l'égard de cette enfant si innocente dont le sourire provoquait ma peur comme un monstre pouvait le faire.

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