8. Réflexion

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La fraîcheur caressante de l'eau sur ma peau nue me provoqua un souffle de plaisir

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La fraîcheur caressante de l'eau sur ma peau nue me provoqua un souffle de plaisir. Je plongeai peu à peu dans cette source perdue dans une clairière bien loin de mon campement. La cascade se déversait dans des éclats dorés. Quelques roses sauvages progressaient le long de la pierre aux pieds de la montagne qui me surplombait.

Je frissonnai lorsque l'eau atteignit ma poitrine, et finis par m'arrêter. Mes doigts de pieds jouaient avec les quelques pierres que j'apercevais sans difficulté grâce à la pureté de la source. Les oiseaux accompagnaient de leur mélodie le rythme de la cascade qui tintait harmonieusement. Je penchai ma tête en arrière et mes cheveux s'imprégnèrent de ce liquide rafraichissant, s'étendant sur la surface. Un sentiment de bien-être se propagea en moi. L'âme paisible, je fermai les paupières, la laissant réfléchir.

Ce lieu sacré calmait mon esprit, me permettant de trouver un instar de paix dans ce monde baigné de sang. La blancheur lumineuse des éclats contrastait avec l'âme tourmentée des taches rouges. Les arbres qui l'entouraient étaient aussi sombres que la nuit, effrayant tout intrus. Les ronces et leurs épines lacéraient les peaux innocentes et même les pêcheurs ne parvenaient pas jusqu'à la fin. Les quelques pétales des roses rouges parsemaient le sol avant qu'elles ne fanent pour l'hiver encore lointain.

Mes pensées divaguaient, mais revenaient sans cesse à lui, s'y concentrant comme si je souhaitais percer un mystère qui m'était lié. Les traits fins de son visage, son petit sourire au coin et les mots prononcés sonnaient bientôt comme des maux dans mon crâne.

Tournant dans une tornade désordonnée, je ne pouvais pas les balayer d'un souffle. Il m'intriguait par sa manière d'avoir titillé ce qui avait été enfoui, ma connaissance de son passé disparu et l'impossibilité de lui faire le moindre mal par son lien avec Thésée. Je ne l'appréciais pas. Le sentiment à son égard provoqua une grimace dans un sourire. Pourtant, au plus profond de moi je souhaitais savoir qui il était et je n'y parvenais pas. Parmi les souvenirs que j'avais, aucun ne s'associait à Hippolyte, et s'en était un danger.

Cela faisait des jours que nous nous étions croisés dans le champ des roses, et il hantait toujours mes pensées, faisant en sorte que nul ne sache ce secret, cette rencontre. J'avais gardé ce mystère pour moi, le jugeant comme une affaire personnelle que je devais résoudre seule, et éviter de le tuer. Il n'avait été qu'éphémère, mais quelque chose s'était déroulé et je devais apprendre sa nature exacte avant qu'un malheur ne frappe, encore.

La conscience que je devais en parler me tiraillait et mes démons hurlaient en moi, pesant que plus dans un cœur encore hypnotisé. Les réponses futures me faisaient déjà frissonner et la simple pensée qui lui était destinée excitait mon cœur d'une énergie puissante sans que je sache si elle était teintée de haine ou de curiosité. Mais qu'importait, j'y ressentais un danger qui aggravait mon attirance à ces mystères.

J'avais senti que quelque chose arrivait et il se révélait chaque jour et chaque nuit. Même lorsque la lune disparaissait dans le ciel et que les étoiles brillaient dans le bleu saphir et trompeur.

Mon corps flottant à la surface dans ce calme régénérateur se délectait du froid, taisant mes brûlures intérieures, mais uniquement physiques. J'étais comme emportée dans un rêve dans lequel mon esprit, mon âme et mon cœur échangeaient sans guerre. Je sentis un pétale tomber sur mes lèvres, se soulevant délicatement à cause de ma respiration apaisée.

Je me savais observée, par Hippolyte qui dépassait la frontière, et par le danger qui me tenaillait plus que ce prince inconnu. Les doutes s'étaient dissipés dès le jour où toutes les guetteuses me rapportaient les mêmes retours.

Le premier qu'un jeune homme dépassait les limites du territoire avant de disparaître de leur vue aiguisée, ce qui m'avait étonnée, mais pas autant que sa démarche qui rappelait une fuite. Il ne laissait aucune trace et ne se dissimulait pas d'elles. Les chasseresses l'avaient compris dès la première fois après avoir analysé ses mouvements, et elles étaient trop silencieuses.

Puis, les informations ne prenaient aucune ampleur. Leurs lèvres se scellaient et des lueurs de peur traversaient leur regard tel un éclair éphémère. Elles me cachaient la vérité occultée.

Toutes mes chasseresses qui avaient été de garde n'arrêtaient pas de m'indiquer dans leurs rapports qu'un jeune homme ne cessait de tirer sur les animaux qui s'approchaient trop de la limite. Lui-même la dépassait de quelques pas avant qu'elles ne le perdent de vue et qu'il disparaisse sans laisser aucune trace. Puis, une ombre. 

Elles l'ignoraient, mais moi, j'étais certaine que c'était Hippolyte. Cela ne faisait aucun doute pour moi. Les longues et interminables questions n'avaient mené à rien si ce n'était la ressemblance dans leurs réponses vagues. Une menace qui n'était pas celle du mortel, une menace qui était cette fameuse ombre qu'elles contraignaient.

La voix tremblante, les éclats de panique fusaient dans tous les sens avant qu'elles ne se taisent et fuient au loin, une larme au coin de l'œil. Jamais je ne les avais vues aussi démunies et ce qui franchissait leurs lèvres était l'ignorance des faits. Aveuglées par les arbres, elles ne percevaient rien, mais elles voyaient sans me dire.

Délaissant cette affaire personnelle, je m'étais concentrée sur les murmures des chasseresses, mais le secret demeurait clos. L'énigme persistait et pouvait aisément devenir au pluriel. Lorsque Hippolyte avait dépassé les frontières, l'émoi les avait envahies et leurs discussions me parvenaient à vive voix avant de se tarir au fil des jours, devenant des paroles silencieuses, échangées dans la pénombre des chuchotements.

Le cœur déconcerté, j'arrivais encore à ne fixer qu'un seul point à la fois, mais l'inquiétude demeurait. Plus troublant encore, les raisons m'échappaient toujours. Pourtant, mon instinct les connaissait au point que mes poils se hérissaient sur ma peau tendre. Ce danger qui se tapissait dans l'ombre, et Hippolyte bien meilleur que mes chasseresses en tant que chasseur. Deux êtres dangereux, mais pas pour les mêmes raisons.

Il n'avait montré aucune once de crainte à mon égard. Particulièrement courageux, il persistait à dépasser la limite malgré ce danger duquel il se dissimulait, mais revenait toujours. Opis elle-même refusait d'y aller seule par peur, et lui, il courait à travers les bois. Deux problèmes, pas le moindre indice. Le ciel semblait se teindre chaque crépuscule plus ardemment des nuances rouges.

Je me redressai sur mes jambes, sortie de ma torpeur. Ma robe trempée, je décidai de l'ôter. Mes doigts saisirent un bout que je fis descendre le long de mon bras tandis qu'une colère sourde m'envahissait à l'entente des mêmes sons ténébreux que j'avais ressentis la dernière fois. Le destin s'acharnerait encore et le passé ne lui suffisait pas. Il était déterminé à me tourmenter, mais il ignorait qu'il jouait avec moi. Je l'appréhendais.

Je laissai tomber le haut de mon péplos qui flotta dans l'eau et le pétale égaré que j'avais oublié se posa sur l'emplacement de mon cœur. Un hurlement de rage jaillit de ma gorge provoquant l'envol des oiseaux. Un craquement de branche me répondit, suivi d'une chute dans les eaux de la source dorée.


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