16. La chasse [partie 1]

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« When I look into the eyes of an animal

I do not see an animal. I see a living being.

I see a friend. I feel a soul.»

Mes pieds foulaient le sol sauvage, l'effleurant avec grâce à travers les bois

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Mes pieds foulaient le sol sauvage, l'effleurant avec grâce à travers les bois. Rapide. Vive. Silencieuse. Solitaire. Je ne percevais plus une vue d'ensemble, mais des masses colorées qui entouraient le point immuable que je fixais. Les bruissements des feuilles et les halètements de la bête dissimulée entre les branchages, m'apparaissant de temps à autre devant mes yeux, me guidaient dans ce labyrinthe boisé.

Seule dans cette étendue de bois, aucune présence n'était ressentie, provoquant un sourire satisfait au coin de mes lèvres sans perdre en concentration. J'étais plongée entre deux mondes, dans une hypnose chasseresse. Un craquement se fit entendre sous la plante de mes pieds sans me dévier de ma trajectoire.

Je sautai par-dessus un tronc et repris ma course sans me soucier des égratignures qui avaient lacéré ma peau. Le pari de chasser ce sanglier rare d'une race particulière avait été lancé entre Phoebe et moi. J'étais proche de la victoire, et cet animal allait en payer le prix.

Les rayons du soleil s'approchaient de la terre, m'aveuglant par moment et offrant son éclat trompeur à la nature qui l'accueillait en son sein. Une petite montée raide me fit face et par sauts, je la gravis, m'aidant des pierres qui la parsemaient et sentant mes pieds glisser sur la terre mouillée. Un râlement s'échappa lorsque je lâchai prise pour la retrouver sur une autre corniche, entaillant ma paume d'où un léger filet de sang s'écoula.

Le cœur tambourinant, j'aperçus une branche qui pendait d'un arbre au-dessus de moi que, sans réfléchir, je saisis pour me hisser au sommet et dévaler l'autre pente avant de m'arrêter à ses pieds. Les mèches de mes cheveux se collaient à mon visage terne et lisse, brillant d'or de ma peau hâlée qui se confondait dans la forêt, les lèvres entrouvertes pour me permettre d'inspirer à l'air manquant. Je ne quittai pas des yeux le sanglier qui, en vain, tirait sur sa patte prise au piège entre deux racines sorties de terre, se torsadaient sur la peau du monde.

Avec perversité accompagnée de la délectation de ce tendre moment, je m'approchai à petits pas. Les lieux s'étaient tus, et ni même un vent ne soufflait. Je tirai l'un de mes poignards de son fourreau sans quitter sa gorge des yeux qui bientôt sera parcourue d'une entaille d'où son sang se déverserait tel un torrent. Avant que je ne lui ôte la vie d'un autre coup sec pour que la souffrance n'altère pas avec ses dernières gouttes de vie.

Les hommes ne comprenaient pas cette douceur de la mort, ils assassinaient sans pitié, se rassasiant de la souffrance guerrière, aspirant à cet art comme ils le nommaient, mais d'une violence d'homme et non animale. Ils me répugnaient et bien qu'ils commençaient à goûter à la splendeur des Crétois bien trop pacifiques à mon goût, moi dont la sauvagerie qui imprégnait le sang des achéens et ioniens ainsi qu'éoliens aux côtés de la guerre, du pouvoir, des conquêtes et des marchands... Ils ne pouvaient pas oublier qui ils étaient, qu'importait leurs emprunts.

ArtemisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant