Le 24 décembre, dans l'après-midi, ils prennent le train à Montparnasse pour Bordeaux. Ian est tout content, Camille vaguement stressée. Elle n'a jamais présenté aucun garçon ou homme avec qui elle a été, à son père. Encore moins pour un réveillon de Noël. Mais cette fois, c'est différent, c'est évident. Elle a 22 ans et c'est loin d'être une histoire de gamine. Et elle doit être capable de l'assumer. Et puis Ian séduira tout le monde, elle le sait et ses sœurs vont être folles de jalousie. C'est un bon point.
Dehors, le paysage défile et Ian scotché à la fenêtre, lunettes noires et gros pull de laine, observe la campagne française. Elle est collée contre lui et se sent tout chose. La gaieté de Ian est communicative. Il dit :
— C'est donc ça, la France profonde ?
Camille acquiesce, amusée.
—Yen a pour longtemps ?
— Encore deux heures.
— Et après ?
— On habite à cinq minutes à pied de la gare.
Silence. Il en profite pour lui voler un baiser. Cette tendresse toute gratuite l'émeut plus que jamais. Il a un cœur d'or rien que pour elle.
—Il faut que tu saches deux trois trucs à propos de ma famille, dit-elle soudain.
— Briefe-moi, je t'écoute.
—Mon papa est un peu soupe au lait, très latin, tu vois mais il est adorable. Quant à mes sœurs, Séréna et Louise, elles sont en pleine crise d'adolescence.
— Mon dieu...
— Si elles t'embêtent ou te posent trop de question sur ta carrière et tout ça, ne t'énerve pas.
— Mais je ne m'énerve jamais. Et puis, j'aime beaucoup les jeunes filles.
— Je ne fais aucun commentaire à propos de cette dernière phrase mais tu vas payer. Demain midi, tu verras certainement une flopée de cousins boutonneux avec leurs parents et tout ça. Mais ne t'en fais pas, c'est de la bonne bourgeoisie bordelaise, ils savent se tenir.
— D'accord. Je suis poli, je dis merci. Pour le reste, je joue l'américain moyen ?
— C'est ça. Parfait.
— Et ta maman?
Silence. Elle veut parler mais les mots sont comme coincés. Elle finit par dire :
— Ma mère ? En fait c'est quelque chose dont je voulais te parler depuis longtemps.
— C'est vrai ça, tu n'en parles jamais.
— Ma mère est morte il y a 5 ans. Un cancer.
Ian la regarde, effaré.
— Pourquoi tu ne me l'a jamais dit?
— Je n'en ai jamais eu l'occasion... Enfin, non. Je n'ai jamais réussi à t'en parler.
— Je suis désolé, Camille.
— Ca va, ça va. Ça fait longtemps maintenant.
— Tout de même
— Quelque fois, à certains moments, c'est très difficile, pour moi, pour nous tous. Mais on a survécu, tu vois.
Nouveau silence. Il reste sans voix, à simplement la tenir dans ses bras, fort, plus fort que d'habitude.
— Je comprends mieux, dit-il.
— Quoi ?
— Parfois, cette tristesse venue de nulle part sur ton visage. Mais je ne pouvais pas deviner... Excuse-moi.
VOUS LISEZ
La seule chose qui lui importe au monde
RomanceCamille a 21 ans. Elle vit à Paris, étudie la chimie et ne sait pas dire à quoi la vie la destine. Un soir de novembre, elle croise le chemin de Ian. Américain de nationalité, acteur de profession, célèbre de statut. Aussi différents soient-ils, le...