La seule chose qui lui importe au monde

Ca ne ferait que commencer ?

           

Ils montent tous les deux silencieusement les escaliers jusqu'à son appartement. C'est Ian qui ouvre la porte avec le trousseau de clés qu'elle lui tend. Il dit :

—Tu veux que je reste ?

—Non, répond - t -elle tout doucement. Laisse-moi quelques heures.

—Ok, ok.

—On se voit demain ? demande-t-elle presque craintivement.

Ian lui sourit.

—   Oui. Demain.

—   Demain matin 11 heures, les Tuileries en face de chez Tom ?

—   D'accord. Va dormir maintenant.

Il croyait retrouver une petite fille déboussolée et il voit arriver une superbe demoiselle belle et apaisée. Petite jupe et collants bleus. Pas maquillée mais illuminée. La nuit semble avoir tout gommé pour elle, tout aplani du moins. Elle dormait sans doute depuis de longues heures déjà quand lui n'en était qu'à se tourner et se retourner dans son lit, complètement perturbé par la prise de conscience du mal qu'il avait fait ressurgir. Mais aujourd'hui est un jour nouveau, n'est-ce pas ? Elle dit :

—   On prend un brunch quelque part ?

Il sourit.

—Au Café de la paix ? Tu veux vraiment?

Elle secoue le menton, négativement.

—   Non. C'était juste pour voir si...

—Oh, fait-il déçu. Mais tu n'as pas faim ? Tu sais ce que je mangerais bien, là, maintenant ?

—Quoi ?

—Des chicken nuggets de Mac Donald's, sauce barbecue.

—Sérieusement ?

—Pourquoi pas ?

Emballé, c'est pesé. Ils vont jusqu'au MacDo de tout près de chez lui. C'est une matinée de mars très ensoleillée. Encore un peu fraîche et humide mais prometteuse. Printemps dans l'air, c'est de ça dont il faut parler. Mais ils n'y font pas allusion, se contentent de commander et de monter jusqu'à l'étage avec leurs petits plateaux tout mignons, tout beaux. Table près d'une fenêtre mais la vue sur la rue est réduite. Ils se contentent de manger. Surtout Ian qui dévore. Camille s'est satisfait d'un café et d'un donuts. Elle le regarde amusée, lui offre une moue dégoûtée quand il lui propose de goûter.

—C'est mon premier vrai repas depuis Berlin.

—Tu parles d'un repas, ironise-t-elle.

—Enfin, façon de parler. Est-ce que je t'ai dit que je te trouvais jolie?

Camille baisse les yeux à moitié rougissante comme toujours puis demande  :

—Plus jolie qu'elle ?

Ian aspire bruyamment du coca avec sa paille.

— Que...?

—Non. Rien. Excuse-moi. J'ai dû mal à m'en empêcher.

Ian pose son verre de coca, ses gestes restent suspendus un instant, il la regarde puis se remet à manger. Elle ajoute :

—Je voulais aussi m'excuser pour mon petit psychodrame détestable de hier soir.

—Arrête de t'excuser. Je n'ai pas vraiment fait dans la subtilité moi non plus. On partage les torts, d'accord ?

—   Comme pour un divorce, fait  — elle ironiquement.