La route défile

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La route et ses pensées défilent, les écailles dressées du massif le fixent. Coulent les gouttes le long de la vitre. Coulent les larmes le long de ses joues. Papa et Maman sont assis sur les sièges avant. Dispute, l'atmosphère est pesante. Il fait chaud dans la voiture, orage d'été, les éclairs tracent des allées dans le ciel. Il fait chaud, ses cheveux sont collés à sa nuque, le simili-cuir humide du dossier est une torture.

Le chemin de l'eau sur le verre est fascinant. Les perles se croisent, se rejoignent. C'est lent, c'est gracieux. La sensation de ce qui coure sur son visage est presque agréable. Mais il y a trop, surplus d'informations. La claustrophobie le gagne, il ne peut pas sortir, il ne peut pas sortir.

Dans quelques minutes il n'y aura plus de soleil, l'azur est orange. L'enfer, c'est peut-être ça, un trajet sans fin dans les montagnes, le déclin du jour, ses parents qui s'engueulent dans la voiture. Le sentiment d'irréalité est pesant, il n'est plus dans le bon univers. Pas une seule autre bagnole sur la route, ça doit être la fin du monde.

Le bruit autrefois apaisant de la pluie sur la carrosserie est devenu ingérable. Une goutte, un coup de feu dans ses oreilles. Et toujours ces cris qui abattent ses tympans, abattent ses poumons. Il pose son crâne contre la vitre, les vibrations sont de drôles de massages.

L'eau est partout, dehors et sur lui, le temps est gluant, l'espace empêtré. Le monde s'en est allé, place à l'intemporalité, l'immatérialité. Le monde s'en est allé, l'humain s'en est allé, la solitude est écrasante.

La route et ses pensées défilent.

Dans les corps souffle le ventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant