Chapitre 9

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Les jours ont passé, puis les mois. Je me suis remise de mes blessures et nous sommes retournés tous les jours à l'entraînement avec Jonas.

Nous n'avons plus reparlé de notre dernière discussion, nous contentant d'oublier pour profiter un maximum du temps passé ensemble.

Ces innombrables heures de combat ont progressivement taillé et travaillé nos corps.

Maintenant les jours se ressemblent tous, nous nous fondons dans nos habitudes redondantes.

...

J'ouvre les yeux, passant une main fatiguée sur mes yeux bouffis.
J'esquisse un bâillement, fuyant les rayons du Soleil qui tentent de percer mes paupières.
Aujourd'hui c'est le jour de repos. Les rues sont paisibles car toute la basse population profite de cette journée pour se reposer de la fatigue quotidienne.

Alors que je m'apprête à me retourner sur le ventre, pour replonger dans le sommeil, un léger tintement me stoppe net. Immobile, je tends l'oreille.
Un second bruit identique venant de ma fenêtre, confirme mon doute. Je m'extirpe de mon lit en grommelant, mes pieds rencontrant le parquet froid avec hésitation.

Ma chemise de nuit en lin retombe nonchalamment sur mon épaule, suivant mollement mes mouvements.

J'ouvre le battant et évite instinctivement un cailloux qui passe tout près de mon visage. Si près, que je peux entendre l'air siffler dans mon oreille.

Je fronce les sourcils, me penchant par dessus le rebord pour regarder dans la rue.

Jonas est là en bas, avec un sourire joyeux gravé sur le visage.

"- Hey ! Dis-je faussement énervée, c'est moi que tu visais ce coup là, pas la fenêtre ! "

Son rire s'élève dans les airs en entendant mes paroles, et je ne peux m'empêcher de sourire face à son comportement.

"- Aller arrête de dormir, ajoute Jonas entre deux éclats de rire, et viens plutôt te promener avec moi !

- Très bien j'arrive, ne bouge pas.

- Aucune chance, m'assure-t-il, respirant toujours la bonne humeur."

Je le fixe quelques instants, le soleil venant jouer dans sa chevelure de feu, lui donnant de fabuleux reflets et illuminant ses yeux rieurs. Je me redresse, un discret sourire sur les lèvres.

Je me prépare en vitesse et salue mes parents au passage, ceux-ci étant encore enroulés dans leurs draps pour une grasse matinée.

Je dévale l'escalier et claque la porte d'entrée avec force derrière moi, semblant décrocher tout le mur de ma maison dans son élan.

Je rejoins Jonas, qui m'attend accoudé contre un mur, la peau exposée au soleil matinal.

"- Que fait-on maintenant ? Demandé-je au jeune homme, avec les bras croisés sur la poitrine.

- Allons nous balader. Propose-t-il en pointant la rue du menton."

J'acquiesce du menton, pas si déçue de me dégourdir les jambes de si bon matin. Nous marchons d'un pas tranquille, remontant la rue à l'aveugle, en direction de la partie haute. Nous parlons de tout et de rien profitant simplement de la présence de l'autre.

Nous finissons par nous arrêter face à une petite taverne, d'où sort déjà un brouhaha qui prouve l'animation du lieu.

Jonas me lance un regard intéressé avant de me demander. 

"- Tu veux manger un truc ou boire ? J'ai un peu d'argent sur moi.

- Non c'est bon, je n'ai pas très faim, laissons ces ivrognes s'ébattre joyeusement sans nous. "

Il sourit à ma réflexion, avant de détourner les yeux, intrigué.

" - Tiens, on dirait que des hommes de la milice sont aussi dans la taverne.

- Tout le monde se mélange le jour du repos, c'est pas si dérangeant que... Attends. Comment sais-tu qu'ils sont à l'intérieur ? Demandé-je moi aussi intriguée.

- Regarde leurs chevaux sont attachés à l'extérieur. M'explique-t'il en pointant les quatre canassons qui patientent à côté de l'entrée."

Je fixe les montures avec intérêt, en hochant doucement la tête. Jonas finit par se tourner vers moi, voyant que je ne dis plus rien. Il peut constater qu'un sourire s'allonge sur mes lèvres, me donnant une expression diabolique.

" - Tu n'y penses pas... Devine-t-il lascivement.

- Oh que si, j'y pense."

Il me regarde avec une expression fermée, mais je comprends bien qu'il ne peut s'empêcher de retenir un grand sourire. Nous cognons nos deux points l'un contre l'autre, comme un symbole d'équipe.

"- Comme au bon vieux temps, dit-il joyeusement.

- Exactement. Je vais près des chevaux, va guetter le terrain par la fenêtre de la taverne.

- Ok, je te fais signe. "

Jonas s'éloigne de moi dans un pas souple et rapide, se callant en toute discrétion dans l'angle de la fenêtre. Je ne perds pas de temps et avec la même discrétion, je me cache entre deux des chevaux de la milice. Ceux-ci ne bougent pas, acceptant ma présence.

Je guette les mouvements de Jonas par dessus le garot des bêtes, l'adrénaline montant en moi.

(Point de vue de Jonas)

Une fois près de la fenêtre, je me colle au mur pour être le moins visible possible. La taverne est plutôt bien remplie et un folle animation règne à l'intérieur. Je scrute avec attention chaque personne présente, à la recherche des hommes de la milice. Bientôt, je peux les apercevoir accoudés au bar, dos à l'entrée.

La voie est libre.

Je me retourne vers les chevaux où Eraun est en position, elle me fixe en attendant mon signal.

Il n'y a quasiment personne dans la rue et les soldats ont le dos tourné, c'est le moment opportun.

Je lève le bras, Eraun perçoit directement mon signal et commence à détacher les montures.

Ça y est, tout commence.

Âmes TranchantesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant