13. Constellation

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"La façon la plus rapide de mettre fin à une guerre est de la perdre." Orwell

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Hayden me manque plus que je ne le pensais. Son absence me renvoie tout droit à mes dix sept années de solitude martienne. Mes doigts tracent des cercles sur les draps du lit de son module. Je me sens bien, enveloppée dans son odeur. Presque moins seule. Mon regard accroche ma montre.

Sol 309, an martien 10, 18h57, heure martienne.

Voilà deux semaines que je n'ai pas touché à ma caméra. Deux semaines sans contact avec la Terre. Plus de lien avec la planète bleue signifie pas d'échappatoire possible. Et lorsque Mars nous avalera pour de bon, personne ne pleurera notre disparition.

Je quitte ma position fœtale pour me glisser hors du lit.

La salle commune est moins emplie que ce à quoi je m'attendais. Malgré les récents événements, nous continuons d'accomplir nos tâches quotidiennes à la lueur de nos lampes torches. Les scientifiques à bord continuent leurs prélèvements et leurs expériences. Nous surveillons avec attention les conditions météorologiques pour nous prémunir contre de nouvelles grandes tempêtes. Les cultivateurs travaillent d'arrache-pied pour nous fournir des vivres, en prévision d'un éventuel exil vers la seconde base. Les explorateurs réfléchissent activement à baliser une route entre Utopia Planitia et Sithonius Lacus.

Presque tout semble tourner autour de cette solution miracle, cette nouvelle maison prête à nous accueillir. Et, bien que rien ne soit décidé, quelques uns rêvent déjà de quitter notre base. Malheureusement, j'ai vite pu m'apercevoir que l'idée de s'établir dans cet ailleurs n'enchante pas une majeure partie des nôtres. Les plus anciens restent attachés à ce bastion d'humanité qui les hébergent depuis une vingtaine d'années, tandis que certains arguent que s'installer dans un lieu en cours de construction représente un danger trop important.

Nous sommes plus divisés que jamais.

La porte de la serre chuinte derrière moi. J'aime me retrouver ici. Cela peut paraître stupide, mais, si je ferme les yeux, je peux presque me croire sur Terre. Ces champs artificiels seront la seule trace de nature que je ne verrais jamais.

***

Sol 310, an martien 10, 10h32, heure martienne.

Chris a réussi à établir un contact entre les deux bases il y a moins d'une heure. Nous sommes tous agglutinés dans la salle de communication, plongés dans l'obscurité, empiétant largement sur la surface des laboratoires, tentant de percevoir les paroles qui jaillissent des enceintes au volume maximum.

Seuls le matériel informatique, relié à notre second système d'électricité, produit un peu de lumière.

Les colons confirment la viabilité de Sithonius Lacus avec de nouvelles observations ; seuls quelques travaux restent à faire, mais l'absence d'eau et de serres est pour l'instant problématique.

— Je vais tenter dès maintenant de contacter la Terre, poursuit Chris. Ça va prendre du temps, mais je pense que nous pouvons tout à fait déjà nous installer ici.

— Attendons que tu aies communiqué avec les responsables terriens de la mission, coupe Isabella. Les techniciens de Mars Utopia pourront nous dire si nous installer à Sithonius Lacus est une solution envisageable.

— Mais c'est à nous de décider, pas à eux ! S'ils ne sont pas favorables à un exil vers Sithonius et qu'à cause de cela nous mourons tous... Nous n'avons pas à subir les conséquences de leur décision.

— Et inversement, laisse tomber Sumi.

Il y a un silence, au milieu des cascades lumineuses des lampes torches.

Fille de Mars -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant