Chapitre 18

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Je me demande si on peut mourrir à force de ne plus dormir. Et si c'est le cas, je me demande quel effet ça fait, de réellement mourrir de fatigue, de mourrir par l'épuisement. Est-ce que ce serait une bonne manière de mourir ? Est-ce que c'est douloureux ? Est-ce qu'on a l'impression de s'éteindre à jamais ? Je n'en sais rien, je ne sais vraiment pas.

Je finirai par mourrir, par disparaître comme de la fumée, à ne plus exister. Je vais me fondre dans la nature une fois mon corps décomposé. J'ai tellement peur de ce qui va suivre, mais j'ai encore plus peur de ne plus pouvoir vivre ici, tout ce qui m'entoure pourrait me faire du mal, ou plutôt, mes hallucinations feront en sorte de me faire croire cela.

Je suis tellement fatiguée de faire quoi que ce soit, je n'ai plus rien au monde, je n'ai plus rien à perdre ni à gagner. Je crois qu'il est temps de disparaître, juste de disparaître à jamais.

J'ouvris le petit tiroir à côté de mon lit et sortis la boîte de cachet pleine à craquer. C'était des comprimés pour le sommeil que j'avais refusé de prendre, j'avais peur de m'endormir depuis mes hallucinations, j'étais effrayée à l'idée que ça recommence et que je perde totalement conscience. Mais à présent, perdre conscience pour toujours ne me pose aucun problème, je veux en finir sans douleur, c'est mon dernier souhait.

Je pris ma bouteille d'eau qui se trouvait sur la commode de laquelle j'avais sorti les médicaments et pris une gorgée ou deux pour avaler le contenu entier de la boîte de pilule. Suite à cela, je reposais la boîte dans la commode, en regardant de plus près je vis que dans mon meuble se trouvait le téléphone que j'avais cassé. Il était brisé en deux mais pas trop amoché. Je soupirai et fermais tout simplement la commode avant de me coucher sur mon lit pour ne plus bouger.

J'étais couchée ainsi plusieurs minutes, les médicaments n'agissaient pas encore mais cela n'allait pas tarder. Je repensais à tout et cela me faisais de la peine, car tous ce que j'ai pu aimer dans ma vie a toujours fini par disparaître, à ne plus être là, à se fondre dans la nature comme j'essaye de le faire actuellement. Mes proches, mes biens, mes émotions, tout semble si mort et lointain, je me sens complètement vide et inutile, comme un sac plastique qui va être jeté et brûlé.

Je crois que je peux à peine bouger, je me tirai pourtant un peu vers le bord de mon lit pour pouvoir atteindre ma commode et son contenu. Je passais ma main dedans et pris mon téléphone portable brisé en deux. Je me recouchais sur le côté et regardais mon téléphone sentant mes médicaments commencer à faire effet. Je regardais ce téléphone cassé comme pour le mémoriser en tant que dernière image que j'aurai de ce monde. Je l'inspectais de tout part, il était cassé mais semblait toujours être le même, même petit trait, mêmes légères égratignures, même forme, mêmes touches, mêmes taches sur les côté. Des taches dans les bords, elles étaient là je me souviens ces taches .

Taches de Sang.

Ce sont des taches de sang.

Sang.

Je cru sentir mes yeux s'écarter et un élan me pousser à me tirer debout. Du sang, il y a du sang sur mon téléphone, ce sang est exactement au même endroit que la dernière fois, et la dernière fois que je l'ai vu c'était...

Je basculais du lit ne sentant presque plus mon corps, je me traînais au sol avec peine jusqu'à la salle de bain. Une fois dedans je m'accroupi devant la cuvette des toilettes et passai deux doigts au fond de ma gorge. Le contenu entier de mon estomac se vida violemment et rapidement, je n'avais rien avalé depuis des jours par conséquent les seules choses qui sont sorties de mon corps sont l'eau, les médicament et la bile. Je crachais et toussai fortement.

Ce n'est pas l'heure pour moi de mourir, ce n'est pas le moment de partir, je dois vivre et me battre, oui je dois vivre, et me battre parce que je ne suis pas folle ! Je ne suis pas malade, et je n'ai aucune hallucination, tout ce qui est arrivé est réel, et Harrins a juste voulu me piéger.

Le sang se trouvant sur mon téléphone est le mien, c'est le sang qui est resté dessus après qu'Harrins m'ai torturée. Tout était là pour me prouver son crime, malheureusement cela n'est une preuve que pour moi et le fait que j'étais dans un hôpital n'allait pas m'aider davantage pour le dénoncer. Sans oublier que la dernière fois où j'ai voulu dénoncer Harrins, les policiers ont ris de moi, me racontant à quel point l'illustre Docteur était incroyable et bienveillant.

Cela me dégoûtait, il fallait que je fasse quelque chose, il me fallait partir d'ici au plus vite.

La nuit tombée, je me suis dirigée vers la porte, j'y ai disposé un morceau de papier pour la bloquer, par ce moyen elle était restée ouverte jusqu'à ce que tout le monde soit parti dormir ou est rentré. Je me glissais une dernière fois sous mon lit pour revoir mon plan, celui que j'écrivais depuis des jours. Tout semblait plus cohérent à présent, mis à part cette histoire de Docteur Hermann, lui je ne sais pas d'où il venait, ni pourquoi il était là. Je me couchais sur mon lit et attendais le milieu de la nuit.

Le temps passait très lentement, j'étais couchée sur mon lit sans bouger mais je ne pouvais pas dormir. Une fois que le silence régnait totalement dans l'institut, je me levais de la manière la plus délicate et me glissais jusqu'à m'a porte que j'avais réussi à bloquer. Avant de partir j'avais minutieusement disposé ma couverture et mes coussin de manière à donner l'impression que je dormais dans ce lit. J'avais aussi coupé mes cheveux avec un morceau de miroir que j'avais cassé dans ma salle de bain. J'avais prétendu avoir "par accident" lancé mon peigne dedans, pendant que les infirmières nettoyaient j'ai pu récupérer un morceau afin de pouvoir couper mes cheveux pour les disposer sur mon lit. Le plan était parfait, j'avais tout installé ainsi et la minute d'après j'étais déjà entrain de passer le pas de ma porte pour m'enfuir de cet endroit.

Je me glissai doucement dans les couloirs pour n'éveiller personne, j'espère qu'il prendront beaucoup de temps à remarquer mon absence, car honnêtement vu le traitement qu'on reçoit ici je ne serai pas étonnée de constater que même après une semaine personne ne me cherche. Une semaine c'est beaucoup, mais c'est aussi pas assez. Je me devais de me dépêcher de trouver une idée car Harrins était à mes trousses, et chaque instant où je me retrouvais seule pouvait être le dernier.

Je continuais ainsi mon périple jusqu'à la porte d'entrée, puis vers la grande clôture, puis en dehors. Personne ne gardait les lieux, on n'avait pas assez de crédit pour engager du monde, et le personnel de l'hôpital était tellement désordonnée que presque chaque soir les portes restaient ouvertes. Heureusement que les cambrioleurs avaient peur de venir ici, les déficiences mentales font peur à la plus grosse des brutes, on est considéré comme des bêtes de laboratoire hautement contagieuses.

J'étais finalement à nouveau dehors, je serrai mon morceau de téléphone dans ma main comme un prix remporté avec bravoure. Il était ma seule preuve et piste ce téléphone, et cette fois-ci, Harrins ne doit pas m'attraper, je dois le dénoncer quoi que cela m'en coûte.

Cher DocOù les histoires vivent. Découvrez maintenant