Chapitre 2

73 9 0
                                    


- Pouvez-vous me raconter quelque chose sur votre passé? Entre vos six et douze ans ?

- Je venais de déménager, le quartier était sympa, mais je ne connaissais personne. J'étais assez seule durant cette période, je ne parlais pas la langue courante de ce pays, alors je ne parlais pas tout court, des fois quand j'avais envie de parler avec les gens je faisais des signes bizarres à l'aide de mes mains pour me faire comprendre. C'est aussi la période où je dormais seule dans une chambre, c'était un peu effrayant et inconnu, je faisais souvent le rêve d'un homme, un homme qui venait dans ma chambre, je ne sais pas ce qu'il voulait car dans mon rêve je m'efforçais de dormir pour qu'il ne me touche pas. C'est marrant mais, l'homme ne me faisait pas peur, en fait j'avais juste peur de la douleur, avoir mal me faisait peur, les gens ne m'ont jamais effrayés, je les trouve fascinants. Ce rêve finit par arrêter de venir me troubler, je n'avais pas beaucoup dormi avant son départ, mais comme je n'avais pas de cernes visibles, personne ne me posa de questions. Je déteste qu'on s'inquiète pour des choses qui me sont futiles. Un jour, je me souviens, je rentrais chez moi après quelques parties de foot avec des gars de l'école. J'étais seule et il devait être dix-neuf heures passés. J'avais huit ou neuf ans à cette période si je me souviens bien. Je rentrais donc mon sac sur le dos et ma capuche couvrant ma tête. Je marchais tranquillement mais j'avais un sentiment que quelque chose me surveillait. Je me retournais discrètement quelques fois durant ma route, à chaque fois je vis derrière moi un homme, un seul et même homme, il avait des yeux extrêmement rouges et il me regardait. Je ne sais pas ce qu'il voulait, je continuais de marcher en pressant le pas, je me suis dis qu'il ne pourrait pas me faire de mal si je rentre vite. J'ai fini par réussir à rentrer en vitesse, l'homme ne m'avait pas eu, et je ne l'ai pas revu les jours suivants. J'ai finalement commencé à me demander ce qu'il me voulait, j'avais envie de le retrouver, peut-être qu'il avait besoin de quelque chose ? J'empruntais toujours le même chemin pour rentrer, je regardais partout mais il n'est pas apparu.

- Mais pourquoi vouliez-vous le retrouver ? Vous avez peur de la douleur non ? Il aurait pu vous faire du mal.

- Je ne sais pas, pour être franche j'ai arrêté d'avoir peur de la douleur vers l'âge de dix ans, j'ai découvert quelque chose qui m'a permis de ne plus craindre ce qui fait mal. Une fois à une récréation en primaire, un garçon est venu m'embêter, il m'a tiré la tresse et s'est moqué de mes origines. Je me suis énervée et je lui ai mis un point et un coup de pied dans le ventre. Il tomba au sol suite à mes coups. Je me suis approchée de lui et je lui ai serré la gorge totalement énervée pour me venger de sa méchanceté gratuite. Mais au bout d'un moment il ne sembla plus respirer. Je relâchais donc son cou un peu effrayée et lui donnais des coups au visages pour qu'il réagisse. Il ne bougea pas alors je lui attrapais le bras pour le lui briser. Il poussa un hurlement et respira à nouveau, je souris soulagée. Je l'ai menacé, je lui ai dis que s'il racontait ceci à qui que ce soit je lui ferais encore plus mal. Les jours passèrent et personne ne sembla être mis au courant de cet accident. Le garçon n'est plus jamais venu m'embêter, il ne me regardait même plus, sûrement effrayé. Je ne voulais pas faire ça mais, pour ne pas avoir mal il fallait faire du mal. Malheureusement je ne pouvais pas faire de mal à n'importe qui, certains étaient trop forts ou intouchables, je ne pouvais tout bonnement pas les atteindre. Mes parents, c'est bête mais, eux pouvaient me faire du mal, mais moi je ne peux pas les blesser, en tout cas pas physiquement. Sur le plan moral, je n'ai jamais essayé, à vrai dire la chose qui les intéressait chez moi et qui leur sert de m'avoir comme enfant étaient mes résultats scolaires. Ils étaient excellents en primaire, je n'avais aucune difficulté jusqu'à ma cinquième année d'étude. Mais je ne voulais par pourrir mes notes juste pour affecter mes parents, j'étais trop contente de les avoirs, c'était une petite source de joie. Quelques mois plus tard, nous avons déménagé à nouveau. Je n'ai jamais vu le déménagement comme une mauvaise chose. En fait mes amis étaient des personnes mal intentionnées, ils profitaient de moi pour subvenir à leur fins. Ils me racontaient de fausses histoires sur des gens qui les auraient embêté, ils me demandaient d'aller frapper ces gens pour les venger. Ils adoraient dire quelque chose comme : Fais-le, tu es mon amie après tout non ? Qu'on m'explique à quel moment un ami donne des ordres à un autre ami ? C'est une question que je me suis posée trop tard malheureusement, j'avais déjà frappé plein de monde gratuitement. En fait je déteste faire du mal, je ne veux plus jamais en faire, plus jamais, maintenant je vais sourire et aider les autres et je réglerai toujours tout calmement, oui c'est ça, c'est une idée géniale.

- Mais n'avez-vous plus frappé qui que ce soit après cela ?

- J'ai fais de mon mieux, je ne sais plus vraiment mais je ne crois pas, en tout cas je ne me souviens d'aucun élève hospitalisé par ma faute.

- Quand vous frappiez les gens, ressentiez-vous de la joie ou du plaisir à faire mal ?

- Non aucun des deux, en fait je ne ressentais rien, ni quelque chose de bien ni quelque chose de mauvais. Quand quelqu'un avait mal j'avais des fois peur de venir le réconforter, j'avais l'impression qu'il pourrait aspirer le peu de bonheur que j'ai rien qu'en me touchant.

Cher DocOù les histoires vivent. Découvrez maintenant