9) La nuit porte conseil

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Pdv Jordan

  Après qu'elle m'ait expliqué le calvaire que lui a fait endurer sa saleté de père, c'est comme si tout autour de moi c'était écroulé. L'indignation, la haine, l'impuissance me dévastaient. Elle avait souffert durant toutes ces années et personne n'avait été là pour l'aider.

Personne.

Cette colère me gagnant secondes par secondes était indescriptible. Je m'en voulais de ne pas avoir été là. De ne pas l'avoir connue à ce moment où il lui faisait vivre cet enfer. Mais le pire n'était pas là, non. J'aurais tant voulu faire payer ce putain d'enfoiré, qu'il ressente à son tour la douleur qu'a enduré sa fille. Et putain qu'est-ce que cette rage me bouffait. La rage de ne pouvoir rien faire, car ce pauvre type s'était donné la mort avant que justice ne soit faite !

Tout m'énervait. Par exemple ce médecin qui me courait après en me demandant de me calmer. Cette secrétaire qui piaillait « de ne pas courir et de ne pas faire de bruit car c'était un hôpital ». Ces gens qui me regardaient comme un moins que rien, ou ceux avec leur pitié et leur fausse compassion. Et mon impuissance en voyant Elisa le visage inondé de larmes.

Cette nuit a été épouvantable. Je me réveillais chaque minute. Et merde, pourquoi étais-je parti ce jour-là? Par excès de colère penseriez-vous, non par pur égoïsme en vérité. En n'écoutant que mes sentiments, j'avais abandonné Elisa. Elle allait mal, elle va mal, et je suis parti ! Au lieu de rester avec elle à la réconforter, à lui apporter du soutenir, je me suis barré. Comme un connard.

Mais que pouvais-je espérer maintenant ? Que lorsque je franchirai la porte de sa chambre tout redeviendrait comme avant ? Qu'elle me pardonnera d'être parti sans donner de nouvelles ? Non. Ce n'était pas aussi simple, sa réaction je la comprendrai.

Pourtant je suis encore à l'hôpital à espérer encore que tout s'arrange, car au fond bien que mon agissement ait été irrespectueux, je ne pouvais pas refuser qu'elle me lâche. Elle avait besoin d'aide et cette fois je ne la quitterai pas.

J'attends que les infirmières m'ouvrent la porte de sa chambre.

C'est alors que je la vois. Élisa. Elle est allongée dans lit, une couverture autour de son corps. Aussitôt, dès qu'elle entend le grincement du parquet, elle se retourne. Ses yeux rencontrent les miens. Sa bouche est entre-ouverte sous la surprise. Sa longue chevelure blonde retombe sur ses épaules. Elle est tellement belle.

Je ne sais pas quoi dire, je reste là, à l'observer. Mon visage se crispe, et la culpabilité me ronge davantage. Je regrette. Je regrette tout. Encore et encore.

- Je suis désolé, Elisa.

  Je m'avance vers elle. J'aperçois des larmes presque sèches sur son visage. Elle a pleuré par ma faute. Je continue d'avancer, la gorge sèche.

- Eli.. murmuré-je.

La jeune fille détourne son visage. Je la prends aussitôt dans mes bras, dépassé par la situation.

- Je me suis conduit comme un con. C'était une réaction disproportionnée. Excuse moi.
- Tant mieux que tu en aies pris conscience, me répond Elisa en se détachant de mon étreinte.

Je la regarde, dans l'incompréhension.

- Il me faudra du temps, poursuit t-elle le regard vide.

J'acquiesce et me lève, prêt à sortir de sa chambre.

Pourquoi a t-il fallu que tu partes ? Tome 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant