11) Dilemme douloureux

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Je me réveille, des cernes violettes sur le visage. Cette nuit avait été pire qu'un cauchemar. Jordan hantait mon esprit sans arrêt. Pourquoi avait t-il fallu que nos chemin se croisent ? Pourquoi avait t-il fallu qu'il soit le fils de Karine, assistante familiale m'accueillant temporairement au sein de son foyer.

Je ne pouvais néanmoins pas nier cette attirance naissance pour Jordan. Imaginer ceci entre nous ne me rendait que mal à l'aise. Il ne fallait surtout pas que l'incident d'hier ne se reproduise, et encore moins que je n'ose revenir sur les faits avec lui.

Je m'efforce de me lever de mon lit, en ayant assez de rester clouée à ne rien faire. Je regarde par la fenêtre de ma chambre, il n'y a personne. C'est alors que je jette un coup d'oeil à ma montre : neuf heures.  L'infirmière qui arrive bien souvent à dix heures ne me verra pas, cela me laisse le quartier libre.

Je me dirige vers ma valise tant bien que mal et récupère mon téléphone, aucun nouveau message. Je marche maladroitement vers la salle de bain, la douleur des coups sur mon corps me fait grimacer.

Aujourd'hui, j'allais prendre ma douche seule pour la première depuis mon arrivée à l'hôpital. Auparavant c'était une infirmière s'en chargeait. Cela me rendait mal à l'aise de dévoiler mon corps à des inconnus même si c'était leur profession et qu'ils étaient bien bienveillants. Malgré toutes ces années passées à vendre mon corps et ma nudité, m'exposer de la sorte m'avait toujours écœuré. Comment pouvait on prendre plaisir à faire une telle chose ? Pour moi, ça n'avait été qu'un calvaire.

Désormais j'espérais quitter au plus vite cet hôpital  où je passais mes journées entières à tourner en rond.

Qu'allais-je porter aujourd'hui ?
Je regarde ma valise remplie d'habits bon à jeter. Mon père ne m'en achetais jamais, je devais donc tout me financer seule. Seulement, comme il me prenait presque tout l'argent que je récoltais des nuits avec les clients, je ne voulais pas dépenser le maigre sou qu'il me restait en vêtement.

Je sors un teeshirt froissé ainsi qu'un jean. Je me regarde dans le miroir et essaie d'afficher un mince sourire pour me redonner courage.

Quelqu'un toque. Aussitôt,  je me dépêche de regagner mon lit et m'enfoui sous les couvertures.

- Oui ?
- Puis-je entrer mademoiselle ?

Je regarde furtivement l'horloge accrochée au mur face à moi. Il était dix heures. L'infirmière était arrivée.

C'était une jeune femme aux cheveux ébène, elle était très jolie et inspirait confiance.

- Je suis Laurène.

J'hoche de la tête.

- Hum, excusez-moi ?

La professionnelle de santé me regarde, interrogatrice.

- Savez-vous quand est-ce que je pourrais sortir de cet hôpital ?
- Justement, votre médecin passera dans quelques minutes. Vous pourrez lui demander si vous le souhaitez.

Alors qu'elle me parlait, l'infirmière m'observait, l'air préoccupée.

- Vous m'avez l'air bien faible mademoiselle, vous sentez-vous bien ?
- Oui ça va, c'est le blues de l'hôpital, m'efforcé-je de sourire.
- Vos gestes vous trahissent, je vois bien que quelques chose ne va pas. Laissez-moi vous ausculter.
- Très bien, acquiesçais-je devant son instance.

Karine

Je passe ma main sur l'oreiller à mes côtés en espérant trouver une présence, comme je l'avais prédit il n'y avait personne.

Il était parti, s'était évaporé sans même n'avoir laissé de trace. Rares sont les moments où nous nous voyons, il est tel un animal nocturne. Vivant la nuit, dormant le jour. Carl mon mari, me manque tant... Ses journées passées loin de nous me rendaient folles, ses voyages d'affaires qu'il enchaînaient sans cesse,  je n'arrivais plus à m'y faire, je ne le voulais plus.

Je me lève de mon lit et pars me laver tout en songeant à lui, à cet être dont j'étais tombée  éperdument amoureuse lors de cette soirée étudiante, il y a trente ans de cela. C'était un homme libre et présent à mes côtés que j'avais épousé. Désormais  ce n'était qu'un oiseau de nuit, un fugitif. Carl ne vivait plus que pour son travail et notre famille n'était plus sa priorité. Tout cela avait commencé dès lors que j'avais accouché de Jordan.

Et pourtant, malgré ses nombreuses absences qui, au fil du temps me rongeaient et me brisaient, je savais qu'il me serait impossible de me passer de lui. Cette situation je m'y étais faite, son absence je l'avais acceptée.

Élisa n'avait vu Carl qu'une seule fois, ils se contactaient de temps à autre. Je craignais que ce ne soit pas suffisant pour elle. Les médecins de l'hôpital et le service d'adoption nous avaient prévenus du parcours de vie de la jeune fille. Elle avait perdu sa mère très tôt lorsqu'elle était jeune, et avait grandi seule avec son père. Un père peu aimant, délaissant même nous avait t-on dit.L' homme s'était donné la mort quelque temps quelques temps après l'hospitalisation d'Élisa. À ce propos, l'histoire était assez floue. Nous ne connaissons pas les raisons exactes de l'hospitalisation d'Élisa.

Pourquoi a t-il fallu que tu partes ? Tome 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant