Chapitre 14

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Je traîne des pieds sur le chemin pavé qui me mène à ma nouvelle maison. Mon corps est fatigué et il me le fait savoir. Je n'ai plus qu'une idée, aller dormir. Matt m'a laissé rentrer seule, après les durs paroles qu'il a prononcé à mon attention. Franchement, qui aurait cru qu'utiliser ses pouvoirs soit aussi fatiguant. Je devrais m'y faire au bout de quelques temps. En attendant et bien... je subis sans protester. Un frisson d'excitation remonte le long de mon dos malgré la boule qui obstrue ma gorge, j'ai mal partout, je suis fatiguée et habitée par des sentiments totalement contradictoires mais si j'avais l'occasion de revivre cette journée, j'accepterais sans hésiter.

Cette sensation a chaque fois que je découvrais un nouveaux pouvoir dont je suis capable... c'est terriblement grisant.

Ça a commencé avec les éléments. Tandis qu'on se dirigeais vers une nouvelle destination, le lieutenant du clan m'a confirmé que je suis capable de maîtriser l'eau et la terre. Je vais avoir besoin d'entraînement mais j'ai apparemment un bon potentiel. À partir de là, je n'ai plus vu les choses de la même façon. J'avais l'impression d'entendre les arbres me chuchoter des choses et, alors que nous étions déjà loin de la cascade et de n'importe quel point d'eau, d'entendre de l'eau couler. Ça expliquait aussi ma tendance à aller me balader en forêt chaque après-midi et à m'asseoir au bord d'une rivière pendant parfois des heures. Je suis censée, grâce à mon contrôle de l'eau et de la terre, avoir un contact privilégié avec les animaux terrestres et les animaux aquatiques sans pour autant pouvoir communiquer avec eux. Ça, c'est encore un autre pouvoir.

Nous nous sommes ensuite dirigés vers une autre clairière, encore plus profondément enfuie dans la forêt dans le but de découvrir si je suis capable de me métamorphoser. À partir de là, nous nous sommes de nouveaux assis en tailleur et j'ai fermés les yeux. Évidemment à force d'attendre sans bouger, j'ai commencé à râler. On était là depuis des heures et rien ne se passait mais Matt ne m'a prêtée absolument aucune intention et je n'ai pas eu d'autre choix que de fermer de nouveau les yeux et d'attendre. Jusqu'à ce que ça arrive, ce moment où j'ai plongé à l'intérieur de moi-même. Mais les choses ont été bien différentes; avec les éléments, ce que je voyais était très vague. Des formes et des couleurs. Mais là, tout était étonnement précis et équilibré, presque mathématique.

Autour de moi, tout était d'un gris parfaitement équilibré. Ni trop blanc, ni trop noir. Juste gris. J'ai alors commencé à me déplacer dans ce décor mélancolique jusqu'à ce que soudainement, alors que j'ai voulu soulever mon pied pour avancer, ce dernier est resté figé. Mon deuxième pied a suivi puis le reste de mon corps. C'était la même chose que lorsque John m'a dit ce que nous sommes. Tout aussi terrifiant.

Soudain, sans je ne puisse m'y préparer, une force invisible a commencé a exercé une pression sur ma colonne vertébral puis entre mes deux yeux, sur mon nez, ... J'avais la terrible impression que l'on tentait de me couper en deux. Le gris pourtant si calme qui m'encerclait a commencé à tournoyer autour de moi. Je ne distinguait plus rien d'autre que des éclairs pâles. Jusqu'à ce que tout d'un coup, tout s'arrête. J'ai posé une main sur mon ventre, légèrement nauséeuse. Mes yeux étaient rivés sur le sol.

Je me tenais debout sur une bande grise, seule survivante du décor initial car à ma droite, tout était blanc. D'un blanc doux comme la neige et lumineux comme le soleil. J'ai alors fouillé des yeux cet espace si différent mais mes yeux ont été immédiatement été attirés par des couleurs vives. Assis majestueusement, le dos droit, les pattes raides et et le museau haut. Le renard déteignait comme une boule de feu en pleine tempête de neige. De longs poils roux recouvraient l'intégrité de son corps, ou presque. Effectivement, je me suis rapidement rendue compte que son ventre possédait une fourrure qui se fondait parfaitement dans le décor hivernal. Ses yeux d'un gris brumeux étaient posés sur moi, ses pattes aussi étaient recouvertes d'un duvet blanc qui donnait l'impression qu'il portait des chaussettes.

Plume Grise Où les histoires vivent. Découvrez maintenant