Chapitre 2 : d'un labrador et de yeux gris

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Le lendemain, la chaleur matinale me réveilla. Les oiseaux chantaient, les voisins se saluaient. Au final, ils étaient tous gentils, ils s'aidaient tous entre eux. J'avais tendance à préjuger les gens autour de moi, souvent, je me trompais. Il faisait bon vivre dans ce quartier.

Je n'avais rien prévu aujourd'hui, j'avais envie de visiter la ville, j'étais quand même dans la capitale du cinéma ! Mais je ne pouvais y aller seul... Hors de question d'y aller avec mon père, il ne pouvait pas de toute façon, il travaillait encore plus qu'avant, j'en étais ravi. Et ma belle-mère devait remplir des papiers à la maison.
Je descendis pour le petit déjeuné, je pris des pancakes à la myrtille avec du café. Je planifiais ma journée dans ma tête, j'imaginais la ville, les endroits touristiques surpeuplés un mois de juillet. Je voulais prendre des cours de dessin et de musique aussi. M'inscrire à la boxe, au basket, aller faire du surf.
J'étais assez sportif, depuis que mon frère est mort, je déchaîne ma haine envers toutes formes d'activités physiques. Ou artistiques... Mais comment y parvenir ? Je n'allais pas me perdre au fin fond de Los Angeles.
Sachant que mon portable ne pouvait pour l'instant, ni appeler, ni envoyer de messages. C'était un peu risqué, et je n'avais pas envie de donner une autre raison à mon père pour me détester.

Je remontais dans ma chambre. Ce qui était rapidement devenu mon univers. Le piano noir se mariait parfaitement à ma chambre. Ma chambre était moderne, assez minimaliste. J'aimais les choses simples, et le piano de ma mère donnait vraiment un charme à cette pièce. Il était enfin mis à une place qui lui convenait. Une place où il pouvait être utilisé sans être caché. Le jour où je l'ai découvert sans poussière, j'étais assez époustouflé. Ce piano était vraiment beau. Il avait l'élégance de l'époque précédente. Même si je ne connaissais pas mère, je lui trouvais un gout très avancé rien qu'en voyant son piano. Il y avait inscrit son nom de jeune fille.
« Mll. Heather. »
Je ne put résister plus longtemps, je voulais encore parcourir ses touches. Apportait un peu de grâce dans cette maison.
Je lisais mes partitions, tout en jouant de ma musique. Je jouais celles de ma mère, elles étaient douces, pleines de tristesse. Rien qu'avec ses mélodies, je compris vite qu'elle était sensible, mais surtout aussi dévastée que nous. Que moi. Face à mon père.
Malgré sa mort, malgré le très peu de souvenir que j'avais d'elle, une partition me rendait perplexe. En la jouant, j'avais l'impression que je retournais quatorze ans en arrière. Les mélodies me faisaient vivre un sentiment de rappel, des souvenirs bien enfouis de mon enfance. Mais à chaque arrêt, ses débris de souvenirs retombaient dans l'oubli. Ils ne revenaient qu'à chaque note rejouée.

Je tournai les yeux vers la guitare, la guitare de mon frère. Accrochée au mur, je n'osais pas m'en approcher, ne pas y jouer. J'en avais que très peu joué, je préférais ne pas abîmer la trace de ses empreintes. Je me tournai alors vers le miroir. Constatai alors que j'avais échappé une larme, une lame invisible, discrète, mais aussi humide qu'un océan. Je m'en débarrassai vite, d'un coup de manche.

J'entendis ma belle-mère parler d'une vive voix. Je ne savais pas à qui elle pouvait parler, car mon père était parti. Je descendis, percevant la même silhouette féminine, suave et harmonieuse. C'était Sharon. Dans sa main droite tenait un panier de macarons. Et sa main gauche tenait une autre main, une main fine et naïve.
Une petite fille sortit de l'ombre, elle était le portrait exact de sa mère, châtain, les mêmes yeux cristal, mais surtout l'élégance odieuse de sa mère. Quand elle me vit, elle sauta de joie, et son chien me sauta aussi dessus d'ailleurs ! C'était un Labradors, un de mes chiens préféré.

— Hey, Brandy ! lui lançais-je en m'accroupissant à son niveau.
— Hé Brandy revient ici ! s'exclama la petite fille en rigolant.
— Haha, il vous a adopté ! rigola Sharon
— Je vois qu'il s'est déjà fait des amis ! Rigola à son tour ma belle-mère. Oh, des macarons, j'adore ! Enfin ON adore ! Merci beaucoup !
— Tant mieux, j'ai appris que vous étiez français, pour ne pas vous dépayser j'ai voulu vous apporter une spécialité française. fait maison ! dit-elle fière. Et puis ça changera des muffins !
— Vous êtes trop gentille, il ne fallait pas ! En tout cas, je crois que vous avez bien fait, on va faire une overdose de muffins si ça continue ! Et pourquoi vous ne rentriez pas pour les savourer ensemble, ça nous aiderait un peu !
— Volontiers !

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