Prologue.

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Salut ! Voici mon prologue, pour bien se mettre dans le bain ! 😁
Bonne lecture !

Le son d'une guitare se propageait dans toute la pièce. Les cordes tremblaient pour échapper cette douce mélodie, qui m'apportait ce réconfort. J'écoutais sans me préoccuper du reste, sans regarder autour de moi.
Adossé sur ma chaise roulante, je rouvris les yeux lors d'une note ratée. Découvrant une feuille vierge, pour l'instant, posée sur un bureau de bois ciré. Un crayon sur celle-ci, ne demandant qu'à être utilisé, laisser sa trace de charbon, sur le blanc de la feuille. Je portais un dernier regard sur mon guitariste, mon frère.
Ethan.
À la reprise de la chanson, je commençais à porter des traits sur la feuille. Esquisser toutes les formes me passant par la tête. Sans trop savoir ce que je voulais, mes courbes étaient contrôlées par ces notes de musique.
Ce petit air frais me faisait légèrement frissonner. La fenêtre était ouverte, nous donnant la vue sur tout Paris, dans le sixième arrondissement. On entendait les voitures avancer, les passants parler, rire ou même pleurer des fois et les bars s'activer. Les oiseaux et les quelques arbres, faisaient partis de cette végétation urbaine, un peu morose, mais suffisante pour des citadins.
La fin des mélodies me stoppa. Une main m'ébouriffa les cheveux. Mon frère remonta dans sa chambre après m'avoir fait un bisou sur le crâne.
Sortant dans le couloir de la maison, je tournais ma tête vers une porte, cette porte... Un sentiment d'adrénaline et de découverte palpitait tout mon corps. Face à cette tentation de désobéir, de briser le mystère, dû à l'interdiction formelle de mon père.
J'avançais vers la cause de mes questionnements, prêt à en découdre. Ma main sur la poignée, culpabilisant mais confiant, je poussais la porte.
Impossible. Elle était verrouillée.
Malgré tout, je ne voulais en rester là. J'allais profiter de l'absence de mon père. Récupérant les clefs, je me rendait à nouveau, devant cette porte. Essayant d'assourdir le cliquetis, j'entendis le verrou de la porte s'ouvrir. Dans un élan, je pénétrais dans la pièce.
Une salle insalubre.
Un piano sombre recouvert de poussière occupait la pièce. Un piano à queues, noir. L'odeur de poussière m'étouffait presque.
Un filet de lumière s'échappait des volets fermés et découvrait des croquis accrochés aux murs. Je m'avançais vers ce piano, il m'intriguait. Les touches étaient elles aussi dissimulées sous la poussière. Je les frôlais du bout des doigts. Mes doigts étaient grisâtres, enduits de poussière. Je m'assis sur le fauteuil, face au piano. Je le scrutais, n'osais pas le toucher. Je voulais pourtant. Oui, j'en mourrais d'envie. Je commençais à effleurer ses touches religieusement, et petit à petit, commençais à appuyer dessus.
Ça faisait trop de bruit. Je voulais encore m'aventurer dans cet endroit qui n'avait aucune place dans un de mes souvenirs. Je me relevais du fauteuil, me débarrassant de toute la poussière sur mon jean.
Mon attention se porta alors sur les croquis accrochés aux murs. C'était de rapides esquisses, mais si jolies. Faites au fusain, elles représentaient des paysages, des portraits ou des natures mortes.
Je me retournai, et vis des photos sur la cheminée. J'en attrapais une et identifiais les personnes présentes. Je me posais sur le fauteuil et la regardais, encore et encore... Quatre personnes étaient présentes : mon frère, mon père, moi et une mystérieuse femme. Elle avait les mêmes yeux verts, les mêmes cheveux obscurs et la même bouche charnue que moi. Mais elle avait la même forme du visage, le même regard et le même sourire que mon frère...
C'était évident...
Ma mère, Hope.
Les particules de poussière flottaient tout autour de moi. Se reflétant grâce au peu de lumière de la chambre. Encore sous l'état de choc, je venais de découvrir pour la première fois le visage de ma mère... Du haut de mes sept ans, je ne savais rien sur cette personne qui m'avait porté neuf mois.
Je savais juste qu'elle était morte, à mes deux ans. On ne me l'a jamais confirmé, ou même dit. Je le savais : c'est tout.
Je parcourais encore les dizaines de photos sur la cheminée. Découvrant ma mère sur chaque photo. Une autre photo attira plus mon attention que les autres. Une photo de ma mère, jouant du piano. Le même piano, la même chambre. On lui ressemblait tellement avec mon frère. Elle faisait de la musique et elle dessinait, aussi.
Des bruits de pas me firent sursauter, m'enlevant de mes pensées les plus profondes et de toutes ses révélations.
Mon frère apparut dans le cadre de la porte. Affolé, anxieux, mais soulagé. Soulagé de ne plus garder ce secret. S'il avait les mêmes expressions que mon père, il gardait la beauté de notre mère.
Une beauté fine, élégante, gracieuse mais légèrement provocante. J'étais l'opposé, j'avais pris sa beauté ténébreuse, mystérieuse, sombre. Mon frère avait ce léger côté androgyne, quant à moi, j'avais ce côté masculin, j'avais celui de mon père. Nous étions la fusion physique de notre mère, maintenant, je le sais.
À quatorze ans, mon frère était mon modèle. Je voulais être comme lui, subjugué par son imposante autorité sur moi, mais sa douceur aimante.
C'était mon père, celui qui s'occupait toujours de moi. Je l'aimais, et il me le rendait. Il ne pouvait me faire du mal, et j'en profitais quelques fois. Un amour fusionnel face à l'absence parentale... Je ne pouvais pas m'en passer, toute ma vie tenait grâce à lui. S'il venait à disparaitre un jour, je ne sais pas comment je ferais...
Et pourtant... C'est ce qu'il s'est passé. Le quatorze novembre, à mes onze ans, après une dispute entre mon père et mon frère. Une des nombreuses disputes, mais certainement la dernière. Mon frère avait pris sa moto, dans le chagrin et la haine. La pluie était battante, les routes glissantes.
Mon frère voulait s'évader, se distancer de tous ses problèmes. Rien qu'un moment, pas très longtemps.
Mais quelque chose d'imprévu, un camion lui rentra dedans. Un traumatisme crânien intolérable et des dizaines de fractures insoutenables. Et puis s'ensuivent les appels, la course à l'hôpital pour trouver la bonne chambre, et le corps de mon frère allongé. Dans un coma, essayant de le maintenir en vie. Les battements du coeur furent un soulagement.
Mais pour combien de temps ? Dix minutes ?
Ça a commencé par des spasmes. Des électrochocs. Puis un silence, les battements s'étaient arrêtés... À tout jamais. Et cette phrase, ce coup de grâce, « Heure du décès : 20 h 15. ».
Sanglots, geignements et larmes, en suivent une dépression... Des batailles entre mon père et moi, mon père ne m'aime plus.
Mon père me déteste.

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