Chapitre 23 : de cernes et d'un évanouissement

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Ça fait maintenant 1 mois que je parle de moins en moins à Sean. Chaque seconde passée à ses côté est une corvée. Quelle est la cause ? Non, Qui est la cause ?

Comme je l'avais prévu, il n'a pas eu le courage de refuser. Et maintenant, me voilà à supporter la présence, d'une personne forte irritante. Voilà la cause d'un éloignement certain envers la bande. Abraham m'a suivi, à mon plus grand soulagement. Je le prive d'Emma, et ce n'est pas à cœur joie. Alors maintenant, on reste avec Melody, et on rit tout autant, voir plus. On s'est intégrés quelque part d'autre, là où il y a moins de problèmes. Alors depuis un mois, je vois notre bande nous regarder, se demander pourquoi cette distance. Abbi vient quelques fois, « je ne peux me passer de tes yeux », mais je suis content. Elle est importante.

   Abraham s'est rétabli, et son beau-père est en prison. Le procès s'est bien passé, étonnement. Je pensais que cette affaire allait prendre plus longtemps, mais visiblement, elle n'a même pas duré plus d'un mois. Maintenant, son beau-père croupit en cellule, et c'est bien mieux comme ça.

   Mais il reste encore une chose. Ce que ma famille me cache. Je n'ai toujours aucune réponse, aucun indice. Le vide et l'incompréhension. J'ai peur, j'ai peur de mes grands-parents, et ça fait bien longtemps que cela ne m'était pas arrivé... Que me veulent-ils ? Je ne veux pas le découvrir, et en même temps, j'en ai une envie insupportable.

   Allongé dans mon lit, songeur dans la pénombre de ma chambre, je me mords la lèvre inférieure avec affliction, je passe ma langue sur ma lippe après m'être acharné sur celle-ci. À 3 heures du matin, son visage me hante une nouvelle nuit. Encore. Je regarde mon nouvel ordinateur que j'ai eu pour Noël, j'hésite à l'ouvrir. Je regarde la légère lumière bleue scintiller et clignoter du portable, illuminer mon visage mate d'un vaste clignement couleur froide et faire briller mes yeux jade, puissants mais fébriles. Mon ordinateur me tente, il m'attire. Il faudrait surement que je dorme, mais je sais que ce sera impossible, alors autant passer le temps. Cette nuit ne servira qu'à creuser encore plus mes cernes, ceux qui longent le long de mes yeux. Mon esprit s'abandonne sans cesse, j'essaye pourtant de me libérer de son emprise, mais je n'y parviens pas.

   Je prends enfin l'ordinateur et le pose sur mes genoux. J'ouvre l'écran et plisse les yeux. La lumière éblouissante, aveuglante, blanche de l'écran pique mes orbites. J'utilise la touche du clavier pour régler la luminosité et parcourt enfin avec la souris. Je fais un tour sur Facebook, même si je sais que personne ne sera connectés. Regarder des vidéos de baston, d'animaux ou de bébés se transforme vite en vidéos déprimantes. Vous savez, les vidéos d'associations contre le racisme, l'homophobie, l'abandon et toutes les autres abominations de l'humanité. Alors je pleure un peu, je me fais pitié quand je vois mon reflet dans l'écran de veille noir. Je fais bouger le curseur et continue mon parcours sur le fil d'actualité, quand j'aperçois une des minimes personnes connectées. C'est Lui.

   Alors toi aussi, tu fais des insomnies ? Un rire s'échappe de mes lèvres, mais il n'est en rien sympathique. Il est rempli d'amertume et de sarcasme.

— Espèce de lâche. je chuchote, seul.

   Mais la tentation de lui envoyer un message me parcourt, tout d'un coup, l'esprit. Mais je me retiens, que pourrais-je lui dire de toute façon ? Je quitte alors Facebook et me dirige sur Netflix. Je me connecte et me retrouve sur la panoplie de séries proposées par le site. Il y en a tellement, mais j'essaye de me concentrer sur celles que je suis, pour ne pas m'embrouiller. Alors, ma souris dérive sur Sense8, la série que je suis depuis peu.

   Alors je regarde les nombreux épisodes, sans me rendre compte que l'heure tourne. Seulement la pesanteur qui se suspend à mes paupières remarque ma fatigue. Alors tout seul, mon esprit se clôt, mes yeux s'obstruent et mon corps décompresse. Baptiste, bienvenu dans l'univers somnolant, le monde du sommeil et les vastes champs des rêves.

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