Orson

Insomnie

Même nuit/heure. Maison 45. Ruther’s place.

Laura n’avait pas encore dormi, la succession d’infusions et de lectures diverses et variées ne suffisaient pas à arrêter les engrenages de son cerveau. Même la présence de Theos, son chien, n'arrivait pas à apaiser ses tensions. L'insomnie avait décidé de l'accompagner pour un petit moment. La mémoire se focalisant sur le proche, les sentiments sur la perte. Elle devait aller chercher les affaires de son père demain… Son père… C’était un homme respectable, tel qu’elle l’avait toujours connu: juste dans ses actions et bon la plupart du temps, mais loin de l’être dans ses mauvais jours. Il s’occupait de son petit cabinet d’avocat, les affaires tournaient plus ou moins bien, cela dépendait des mois. Elle l’aimait, il ne la couvrait pas de cadeaux et cela lui allait. C’était un père comme un autre, mais à ses yeux c’était le meilleur. Il essayait vraiment d’être là pour elle. Quant aux souvenirs de sa mère, ils étaient flous, elle était partie quand Laura était jeune, elles ne s’étaient plus revues depuis et il lui semble bien que son père avait longuement regretté son départ. Mr.Lloyd disait qu’elle ressemblait beaucoup à sa mère, comme toutes les filles se disait Laura. Finalement, ils avaient bien vécu sans elle durant toutes ces années, peu de problèmes s’était profilés à l’horizon. Laura était perdue, pourquoi son père devait-il mourir si vite, cette nuit là?

La police lui avait dit qu’aucune trace d’ADN n’avait été retrouvée, mais que le meurtrier était rentré par effraction en brisant la vitre de la porte, et aussi qu’il portait sûrement des gants, en cuir à en juger par la fibre retrouvée sur l’oreiller. Les scientifiques avaient également retrouvé un papier au fond de la gorge de la victime, il y était écrit “Nous nous retrouverons bientôt.” Laura n’avait pas reconnu l’écriture, mais le style lui paraissait masculin, la personne devait être nerveuse. Cela pouvait très bien être le témoin, Mr.Holten, il était au front quand il était militaire, un stress post-traumatique, un manque d’adrénaline, une soif de tuer, … Après tout qu’en savait-elle? C’était sûrement un grand nerveux… Ce Holten, elle était sûre que c’était lui, mais sans mobile elle ne pouvait pas le prouver. En tout cas, il était le premier sur le lieu, et il avait une lueur de culpabilité dans les yeux. Elle l’avait vu au cimetière: regard baissé, vissé au sol, traits tendus, lèvres pincées,... Elle n’était pas psychologue pour rien.

Soudainement lassée de cette histoire et submergée par ses sentiments, Laura prit la sage décision d’aller se coucher avant que l'aube n'arrive. Une fois allongée, elle se laissa aller à sa peine. La douleur de la perte ravagea ses yeux, elle était redevenue la petite fille à qui on avait appris que sa mère n’allait pas revenir. Enfant unique, l’absence de proches avait fait redoubler ce manque et ces larmes. Et c’est ainsi qu’elle s’endormit enfin, épuisée par le chagrin et la colère. Sans répondre aux messages envoyés par ses collègues ou ses amies, elle avait besoin de repos et de solitude.

28.05. Maison 25 Peter’s Street.

Le liquide noir, presque sirupeux, stagnait dans sa tasse, il fallait bien pouvoir tenir une journée après une nuit pareille. Les yeux rivés sur sa tasse, Orson s’était décidé à fouiner un peu afin de trouver de quoi se disculper, mais il doit commencer par le commencement: chercher des preuves dans l’autre maison. Il va falloir faire en sorte de convaincre la fille de la victime de le laisser entrer autrement ce serait une infraction. Le défi allait être de taille: convaincre la fille de Mr. Lloyd de le laisser entrer sans poser de question. Rapide et efficace, ce qu’il attendait d’elle était aussi simple que ça. Et avec un peu de bonne volonté, on peut espérer déplacer les montagnes, non? En tout cas, c’était plus qu’un peu de volonté dont il avait besoin s’il voulait s’aider, ainsi qu’aider ses collègues et Laura à retrouver le coupable de cette affaire mais il était déterminé!