Cette soirée

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20h00. Maison n°26. Peter’s Street.

La nuit était tombée, couvrant la ville d’un voile noir où de petits diamants semblaient y être incrustés. L’air commençait à se rafraîchir dehors contrairement à l’intérieur de l’habitation, la cuisine maintenait la température à un degré convenable. L’intérieur de la maison était meublé et agencé de manière à avoir un style très épuré. La maison était loin d’être rustique, mais on sentait bien que le but de la décoration c’était d’éclaircir la pièce. Malgré tout, la cuisine faisait de la petite maison un endroit très chaleureux avec son bar américain. Si Laura n’était pas psychologue, elle était persuadée qu’elle serait décoratrice ou architecte à l’heure actuelle. La musique en fond la détendait, c’était du jazz, elle n’appréciait pas trop mais ça faisait un joli bruit de fond, sans plus. D’un point de vue extérieur, les deux individus étaient diamétralement opposés par leurs goûts. Soudain, l’odeur alléchante du repas vint titiller ses narines, cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas cuisiné songea t-elle. Ce lieu était une sorte d’exploitation des sens, il ne manquait que celui du toucher.

Une sonnerie de téléphone perturba leur soirée, Orson décrocha. La discussion dura dix minutes, c’était froid et professionnel. Laura demanda plus d’informations: il avait appris que l’enquête avait avancée et qu’une liste de suspect avait été dressée. Il avait dit qu’il irait jeter un coup d’oeil dessus dès lundi. L’heure n’était pas aux affaires.

Une fois que le dîner était prêt, ils s’assirent et Orson en profita pour décapsuler les boissons alcoolisées; Laura se décidait à engager la conversation. Et grâce à une ambiance plus intime qu’au parc, ils évoquèrent leurs vie privée, elle apprit l’existence de sa soeur, des chevaux que ses parents élevaient, et de ses anecdotes vécues pendant son service; Orson, lui, apprenait un peu plus sur Theos et les études qu’elle avait mené. Orson appréciait vraiment la compagnie de Laura, sa franchise et son humour rendaient sa personnalité intéressante. Laura, quant à elle, doutait encore un peu d’Orson mais après tout, la logique veut que l’on ne connaisse jamais quelqu’un parfaitement. Elle s’émerveilla également sur la nourriture, et à quel point le rôti était tendre. Décidément cette journée avait été parfaite, et il avait insinué plutôt dans la soirée que ça allait se poursuivre sur tout le week-end.

“ - Est-ce que tu veux que cette journée dure plus longtemps?

 - C’est-à-dire?

 - Prend la moto avec moi demain, je viendrais te chercher chez toi.

 - D’accord, on va où?

 - Mystère… répondit-il avec un clin d’oeil”

Suite à la discussion, le repas était fini et cette fois, Laura se chargea de faire la vaisselle, loin d’être misogyne Orson était juste extrêmement Maladroit comme à son habitude. Ils finirent tous les deux affalés sur le canapé, à regarder le premier film trouvé: un Marvel, Deadpool. Laura osa poser sa tête sur l'épaule de son ami.

Après une bonne heure de visionnage, Orson coupa le son de la télévision, échangea le disque du tourne-disque avec un autre et revint près du canapé tendre sa main à une Laura hébétée. Elle pesa le pour et le contre et accepta brièvement. Ils se retrouvèrent dans un petit espace vide du salon, mains sur les hanches ou autour du cou. Mais au bout de quelque pas, elle sentait un certain malaise monter en elle, et repoussa gentiment Orson, qui desserra sa prise, en lui disant qu’elle devait absolument rentrer, qu’il était tard et qu’elle devait retrouver son compagnon canin. Déçu, il accepta son sort et décida tout de même de la raccompagner pour éviter qu’elle se fasse agresser comme l’autre jour. Consciente de l’heure tardive et du danger, elle accepta et comme elle n’habitait pas loin, il proposa de la ramener en moto par pure sécurité et pour la rapidité.
Cette fois elle accepta sans hésiter, cette tentative de danser pour flirter avec elle ne lui plaisait pas trop. C’était un peu trop déplacé pour quelqu’un qui voulait juste​ être ami avec elle. Mais pour l’instant, elle ne comptait pas en tenir rigueur, pour le moment il fallait juste s’accrocher à lui pour éviter une fracture d’un quelconque os compte tenu de l’accélération prise par la moto, qui filait à toute allure sur les routes désertes. Les lumières des bars illuminaient leur passage. Une fois devant chez elle, il avait tenu à la raccompagnée jusqu’à la porte d’entrée et s’excusa d’avoir paru aussi brusque. Elle les accepta, puis au moment d’ouvrir la porte, elle s’aperçut qu’une large main la maintenait fermée. Elle se retourna pour comprendre ce qu’il prenait à Orson et prise au piège entre ses bras il l’embrassa.

Laura sentait littéralement son corps se liquéfier sous ce baiser, il était doux et profond à la fois et malgré tous les signaux contradictoires, elle savait qu’au fond ça lui plaisait mais que c'était trop tôt. Elle n’avait ni approfondit ce baiser, ni repoussé Orson mais elle avait envie de faire les deux en même temps, son cerveau était en incapacité totale de fonctionner. C’était un baiser volé, inestimable, cela faisait une infinité de temps qu’elle ne s’était pas sentie aussi confuse que cela. Orson avait subitement l'envie de passer au stade supérieur, être amis ce n’était que trop peu avec elle. Il se fichait éperdument des conséquences de cet acte, cette fille avait juste réveillé ses instincts les plus primaires. Il ne cherchait pas à savoir ce qu'elle allait penser ou si elle voudrait encore le revoir demain. Oui, Orson savait être égoïste. Il savait juste que Laura était son opposé et son simili, il fallait qu’il teste cet équilibre, qu’il la teste elle. Il avait tout fait pour se contenir, depuis ce matin quand elle était collée à lui à moto, quand elle a imprégné le cuir de son blouson avec son odeur. C’était trop. Chacun sentait que cela devait arriver un jour, et au moment où cela s'était passé...

Le temps s’était arrêté, tout était en stase. Il serait minuit à tout jamais.

OrsonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant