Chapitre 22

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Je me garai en trombes sur le parking de l'hôtel Pullman et mis le frein à main. J'avais roulé toute la nuit, sans pause, à l'exception de celle faite dans une chambre de motel pour me changer.

Paris grouillait déjà d'activité à onze heure du matin, et deux hommes passèrent près de ma voiture en me jetant un regard appréciateur. Il fallait dire que je m'étais mise sur mon trente et un pour rejoindre Ulrich Marx, et cela me donnait la nausée rien que d'y penser.

Je sortis de l'habitacle et vérifiai mon téléphone, sans nouvelles de Samuel. Il était en planque, dans une forêt en bordure de la capitale, et je ne m'inquiétais pas outre-mesure pour lui. Le camping sauvage ne devait pas trop le gêner, et il avait reçu l'ordre de se tenir tranquille jusqu'à mon retour, en fin de journée. Il ne risquait rien, et je pouvais me concentrer sur ma propre tâche.

Sac à main sur l'épaule, je verrouillai la Golf et échangeai un dernier regard avec mon reflet, légèrement maquillé et vêtu d'une robe bleu roi courte au décolleté carré. Les cheveux relevés d'une simple pince en bois, j'avais fière allure sans trop en faire. Je m'écartai donc de la carrosserie et me dirigeai vers l'accueil de l'hôtel.

Je traversai le hall sans demander le moindre renseignement et pénétrai dans l'ascenseur qui me déposa à l'étage voulu. Une fraction de seconde plus tard, je toquai à la porte d'une chambre.

- Entrez, entendis-je depuis l'intérieur.

J'enclenchai la poignée et entrai dans les appartements d'Ulrich Marx.

La chambre était claire, spacieuse et très moderne, dans des tons de gris et de blanc apaisants. Une orchidée trônait sur la table de nuit, près d'un lit immense et impeccablement fait. La baie vitrée, quant à elle, apportait une lumière magnifique à l'endroit, et une vue sensationnelle sur la Tour Eiffel. Appréciatrice, je constatai que Marx, qui devait changer régulièrement d'hôtel pour sa sécurité, ne se refusait rien.

- Bonjour, agent Deveille. Vous avez fait bonne route ? Je ne vous attendais pas si tôt.

Le directeur venait de surgir de sa salle de bain, ne portant pour l'heure qu'un pantalon de costume en lin caramel et une chemise blanche dont il boutonnait les manches. Ses yeux brillants me scrutèrent mais je ne cillai pas.

- Il n'y avait pas trop de circulation, monsieur, souris-je évasivement. Et je dois bien avouer que la nouvelle boîte à sept vitesses de la voiture d'Allan est une pure merveille.

Le GEN replet émit un léger rire et se détourna de moi pour vérifier son apparence dans la glace. Puisqu'il était toujours tiré à quatre épingles, je voyais mal comment il pourrait faire mieux pour déjeuner avec le président.

- J'ai besoin de vos lumières, ma chère, m'interpella Marx. Quelle cravate préférez-vous ?

Il agita un doigt dans la direction du lit sur lequel il avait disposé une cravate ocre, et une autre rayée dans le même genre de couleur.

- La première, affirmai-je sans hésiter. Beaucoup plus sobre.

- Excellent.

Le directeur noua la cravate d'une main experte, puis déposa sa veste de costume sur le dossier d'un fauteuil gris en cuir.

- Asseyez-vous, agent Deveille. Il est encore tôt pour notre rendez-vous. Puis-je vous offrir une tasse de thé ?

- Avec plaisir.

Beurk. Encore l'un de ses immondes breuvages favoris.

Je m'assis tranquillement et lâchai mon sac à côté de moi, sans montrer ce que m'inspirait le fait d'être ici, et attendis qu'il fasse de même. Ce genre de tête-à-tête avec le directeur me rappelait sans cesse nos premiers contacts, alors que je cherchai à m'évader de l'Institut. Je réprimai une envie de ricaner à cette idée, et croisai les jambes.

GENESIS (3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant