Janet O'Leary se coula le long de la gouttière et atterrit souplement sur la terrasse. La nuit tiède n'était entrecoupée que du bruit du vent d'été dans les sapins. Ici, à la montagne, l'air était nettement plus respirable que dans le reste du pays étouffé par la canicule, mais l'agent O'Leary s'en moquait, et n'était pas venue jusque-là pour profiter des températures clémentes. Son métabolisme s'adaptait à tout, et elle ne souffrait pas de la chaleur.
Le chalet était logé dans un écrin de verdure, et représentait un cadre parfait pour des vacances entres amis. C'était d'ailleurs ce qu'avait dû se dire Stéphanie, la femme d'Isaac, en y venant avec ses filles pour quelques jours, mais elle ne se doutait surement pas, à ce moment, que son mari débarquerait dans la précipitation avec des fugitifs. A cette pensée, Janet rit sous cape, seule dans le noir. Lorsqu'elle avait volontairement signalé sa présence aux abords du domicile de l'humain si cher à Marwa Sylva, elle avait espéré que celui-ci se rendrait le plus vite possible auprès de sa famille afin de les protéger, et cela n'avait pas manqué. Ce faisant, il les avait tous condamnés.
Avant de se décider à entrer, la belle GEN à la chevelure rousse cachée sous un bonnet sombre jeta un coup d'œil par la baie vitrée. A n'en pas douter, Marwa avait sécurisé l'endroit avec un programme tel que P.I.A pour prévenir toute intrusion. Repérer les cibles avant de frapper était donc essentiel, sans quoi l'une d'elle pourrait fuir. Janet ne craignait pas de perdre ses proies – elle serait plus rapides qu'elles et les tuerait de toute façon – mais elle avait mis en place sa stratégie, poussé tout ce petit monde dans ses retranchements pour les regrouper dans un seul et même lieu. Nul ne lui ôterait le plaisir de les voir mourir tous, selon les critères qu'elle avait choisis... Cette nuit-là lui rappelait la Chasse, quand elle était à l'Institut, et il tardait à la GEN de revoir cet éclat de peur dans le regard des traqués.
Janet O'Leary fit glisser la baie vitrée et pénétra dans le chalet, le sourire aux lèvres. Sa mission s'achèverait ce soir.
Le salon du chalet était plongé dans la pénombre, mais l'agent de Marx y voyait comme en plein jour. Un bar séparant la cuisine ouverte du salon, un canapé près de la table basse, puis un couloir menant aux chambres. Une sublime dernière demeure. Janet se faufila à la vitesse de l'éclair derrière une épaisse armoire en pin, alors qu'une sonnerie stridente lui vrillait les tympans.
Aussitôt, l'une des deux silhouettes lovées sur le canapé se redressa et brandit une arme devant elle. Du bruit en provenance de l'étage du chalet suggéra à la traqueuse que les autres habitants du chalet allaient débarquer. Janet reconnut également Marwa, sur le divan, ses cheveux plus clairs que les siens hérissés sur son crâne, et la GEN la regarda chercher son portable, les mains tremblantes.
- Philippe ?
- Quoi ?
- L'alarme !
- Je dors. Elle s'est déjà déclenchée hier avec le vent. Va dire aux autres de se recoucher.
L'humain qui dormait avec Marwa – cette sale traitresse – se retourna sur sa couche tandis que sa compagne se levait avec raideur. Sa vision, bien que supérieure à celle de son compagnon, n'était pas égale à celle de Janet qui s'en amusa dans son coin. Certains GEN comme elle disposaient de cette particularité, ou de celle d'avoir des empreintes digitales à motif variable, mais ce n'était pas le cas de tous. Sa cible ne la voyait pas, et Janet était très douée pour abaisser son rythme cardiaque et le rendre infime.
Malgré tout troublée par l'alerte reçue, Marwa s'avança dans le salon et alluma la lumière. Immobile dans sa cachette, Janet vérifia que son ombre ne la trahissait pas et retint sa respiration.
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GENESIS (3)
FantasyExtrait du journal d'Allan Vallet, 2 Juin, 23h39, Hôtel des Batignolles Notes sur Ulrich Marx : Immédiatement après avoir été transformé, Ulrich Marx démontra des qualités intellectuelles exceptionnelles qui compensèrent largement sa faiblesse phys...