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Plus tard dans la journée, je me retrouvai dans la cuisine, observant ma tante qui fixait l'évier où les restes de la photo brûlée reposaient encore, un mélange de cendres et de papier à moitié carbonisé. Elle fronça légèrement les sourcils avant de se tourner vers moi avec un sourire malicieux.

- Oh, c'est une nouvelle forme d'art ? demanda-t-elle avec un ton léger. Écoute, je comprends ta peine, mais sache qu'un jour, elle regrettera tout ce qu'elle t'a fait.

Ces mots éveillèrent quelque chose en moi, comme une porte brusquement déverrouillée dans ma mémoire. Sans que je puisse le contrôler, une avalanche de souvenirs douloureux déferla, submergeant ma conscience. Des images de ma mère apparurent en flashs, s'enchaînant les unes après les autres, trop vite, trop brutales. Je les voyais, elles me hantaient. Je ne voulais pas y penser, je voulais que ces souvenirs disparaissent à jamais, qu'ils cessent de me tourmenter.

Les souvenirs étaient si vifs que je pouvais presque sentir les mots durs qu'elle m'avait assénés, les gifles invisibles que j'avais reçues, et la froideur glaciale de son indifférence. Mon esprit était un champ de bataille, chaque souvenir étant une explosion qui me déchiquetait de l'intérieur. Les cris de ma mère, les hurlements et les reproches se mêlaient aux éclats de rire moqueurs de mon frère. Les visages déformés par la colère et le dédain dansaient devant moi, leur haine palpable, leurs mots comme des lames aiguisées qui s'enfonçaient dans ma chair.

Je me revoyais, petite, écrasée sous le poids de l'incompréhension et de la douleur. Les souvenirs s'enchaînaient avec une cruauté implacable. Ma mère, défigurée par la fureur, me hurlant des insultes, m'accusant de tous les maux, me traitant comme une erreur qu'elle aurait préférée ne jamais avoir commise. Les mots étaient des coups, et chaque réprimande, chaque cri étaient des coups supplémentaires qui ébranlaient mon âme. Je me rappelais de la violence de ses éclats de voix, de la rage déchaînée qui brisait tout autour d'elle, et de la terreur que j'éprouvais face à cette tornade de fureur.

Et puis, il y avait mon frère, lui aussi porteur de cruauté. Je revoyais son visage, plein de mépris, ses paroles assassines résonnant encore dans mes oreilles. Il me rappelait sans cesse que notre mère me considérait comme un fardeau, que ma présence était un poids dont il se serait bien passé. Ses moqueries acides et ses remarques pleines de mépris avaient gravé des cicatrices indélébiles dans mon esprit.

Je hurlai soudain, incapable de contenir cette douleur plus longtemps. Le son était primal, un cri de désespoir et de rage pure, un cri qui semblait vouloir déchirer le monde autour de moi. Mon corps était secoué par des spasmes incontrôlables, chaque hurlement étant une tentative désespérée d'évacuer la douleur. La rage et la peine se mêlaient dans un tourbillon déchaîné, me déchirant de l'intérieur, m'emportant dans une tempête d'émotions débridées.

- Calme-toi, dit doucement ma tante en me prenant dans ses bras.

Elle me serrait contre elle, mais je n'arrivais pas à me calmer. Les larmes coulaient sans relâche, comme un fleuve déchaîné. Je sentais la colère et la tristesse s'entremêler, une tempête que je ne pouvais plus contrôler. Tout mon corps tremblait, et je me laissai tomber au sol, incapable de me maintenir debout. Jade m'accompagnait dans ma chute, essayant de m'apaiser, mais rien ne semblait suffire.

Mes hurlements résonnaient encore dans la maison lorsque Brandon, le garçon de tout à l'heure, entra soudain, visiblement inquiet. Il se précipita dans la pièce, sans même avoir été appelé.

- Il y a un problème ici ? lança-t-il, l'air agité.

Sors d'ici. 

- Je gère la situation, Brandon, répondit ma tante, légèrement exaspérée. Tu n'as pas besoin de toujours t'inquiéter pour moi.

Détruite.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant