Chapitre 16

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- Euhm.. pardon, bonsoir, se reprit-elle.

Elle s'avança en affichant un sourire respectueux sur son visage, bien que matraquée par la soudaineté de la présence de sa professeur de littérature. Mais que faisait-elle ici, attablée autour de tasses de café avec ses parents ? La jeune brune tendit la main pour saluer respectueusement sa professeur. Cette dernière l'attrapa avec engouement en la serrant et lui rendit un merveilleux sourire.
"Mais à quoi joue t-elle ?" pensa maladroitement la jeune brune.

- Oria, ta professeur est venue nous parler un peu de toi.

Après avoir entendue cela par sa mère, cette phrase devenait pour elle la chose la plus stressante au monde. Qu'avait-elle pu bien leur dire ? Que leur fille n'est pas humaine ?

- Oui Oria, reprit Mme Lawrence. Je suis venue parce que je m'inquiète pour toi. Bien que tu es une fille studieuse, tu réussis avec succès les analyses des textes en cours... tu n'as pas de soucis à te faire dans tes études. Mais je suis venue faire part à tes parents de ton attitude qui m'inquiète. Tu m'as l'air très perturbée.
- Tu es sûre que tout va bien ma chérie ? lança son père avec appréhension.
- Euh, oui bien sûr. Tout vas très bien, affirma t-elle avec positivité, en affichant un sourire presque moqueur, ne comprenant pas la situation.
- J'aurai besoin de lui dire quelques mots en privé. Cela ne vous embête pas ? demanda t-elle aux parents de la jeune fille avec un regard doux et bienveillant.
- Eh bien... oui ! s'élança le père en regardant sa femme, un semblant d'inquiétude dans les yeux.

Mme Lawrence se releva avec grâce et souplesse après l'accord du père de son élève. Sa mère eut l'idée d'accourir pour guider la femme vers la chambre de sa fille, où elles pourront discuter seules. Oria soupira et essaya d'échapper à l'angoisse qui s'était emparé rapidement d'elle. Elles montèrent les escaliers et la jeune brune s'installa en première sur son lit. Sa professeur entra et remercia sa mère, avant de refermer doucement la porte. Cette dernière s'avança doucement d'Oria et se tourna vers elle. Elle lui lança un sourire accueillant. Bien que ça aurait du être à elle de l'accueillir un peu mieux, Oria n'avait aucune envie de sourire par cette situation et n'avait évidemment aucune confiance en Mme Lawrence. Le choix ne lui avait pas été donné pour refuser ou accepter cette situation.

- Je crois que nous avons des choses à nous dire, commença la professeur.
Une chaleur étrange vint réchauffer les petites joues beiges d'Oria. Celle-ci continuait de fixer le vide, n'osant pas regarder sa professeur dans les yeux. Qu'est-ce que cela voulait dire ?
- Je ne sais pas comment te dire tout ceci...
La jeune brune écarquilla les yeux. Sa raison venait subitement d'éclairer son esprit. Elle se doutait à présent de ce dont sa professeur voulait lui parler. C'était plus qu'une évidence. A cet instant, Oria ouvrit la bouche subitement et se tourna vers Mme Lawrence, toute ouïe. Elle voulut dire quelque chose, mais sa voix n'en sortait pas un son. Elle se racla alors la gorge avant de répondre.
- Si vous savez quelque chose à propos de tout cela, je veux bien, dit-elle d'un ton faible avant de ravaler sa salive.
Sa professeur prit un air étrangement rassuré. Elle baissa le regard en souriant.
- Tout d'abord, je t'en prie appelle moi par mon prénom. Je m'appelle Selene.
Oria prit un air surpris, puis acquiesça en remuant doucement la tête. Cela lui semblait normal de l'appeler par son prénom si elle avait beaucoup à discuter avec elle.
- Je sais que j'aurai dû venir bien avant. Je suis désolée, je ne savais comment venir vers toi. Chaque fois que je tentais de te parler, tu m'évitais en me disant que tout allait bien. Mais je sais que tu te poses des questions.
- Oui, énormément.. avoua Oria en relevant les yeux vers ceux de Selene.
Cette dernière prit un air dubitatif en baissant les épaules subitement. Ses yeux plongèrent dans le vide. Oria pencha la tête et se demandait ce à quoi elle pensait. On aurait dit que Selene ne savait pas quoi dire. Avant que la jeune brune se décide de dire quelque chose, sa professeur releva la tête et reprit la conversation.
- Tout vient de moi, en fait.
Oria la fixa avec un regard interrogateur, les sourcils froncés.
- Qu'est-ce que vous voulez dire ?
- La trace que tu as dans le cou, c'est ma morsure. La preuve que je suis celle qui t'as "sauvée", répondit Selene avec un léger sourire timide, craignant la réaction de son élève. Cette dernière la regarda les yeux écarquillés, le visage comme abattu par la vérité.
- Pourquoi "sauvée" ?
- Ton accident Oria... J'ai tout vu, tout entendu, même avant que la voiture dévale la pente et s'écrase en bas, te sortant du véhicule avec une énorme blessure au ventre, révéla Selene en regardant le sol. J'ai senti ta douleur à des kilomètres. Je suis intervenue très vite car je n'avais que très peu de temps. Mais lorsque je suis arrivée, tu mourrais déjà. Alors je t'ai mordu. L'essence qui t'as été transmise après cela a su faire rebattre ton cœur. Et heureusement, ça a marché. Tu t'es sortie de cet accident qui aurait pu t'être fatal, et sans la morsure tu ne serais pas ce que tu es aujourd'hui. Tu serais alors décédée.
La jeune brune sentit une douleur se loger dans le creux de sa gorge et remonter jusqu'à ses yeux. Ces derniers se remplirent de larmes, et Oria baissa la tête doucement. Des images lui revinrent alors en tête. Le cerf, ses mains ensanglantée, la voiture totalement renversée et cabossée, puis ce cri étrange. Après, il n'y avait plus rien. C'était ses quelques secondes avant qu'elle ne tombe dans le coma. Pourquoi la vérité lui avait été si longtemps cachée ? Mme Lawrence était donc la personne qui a su la rattraper des mains de la mort, qui l'emportait déjà doucement, tragiquement. Sans cette femme, elle serait morte, inexistante. Cette pensée lui fit une étrange sensation au cœur.
- Je suis désolée de tout te dire seulement maintenant, susurra Selene, renversée par la réaction d'Oria.
La jeune brune ravala ses larmes rapidement avant de remonter le menton. Elle croisa ses mains sur ses jambes, et respira profondément. Il était sûr que la vérité était dure, mais il fallait qu'elle sache tout maintenant, tout de suite. Et cette situation lui donnait l'occasion de savoir absolument tout ce qu'elle voulait.
- Alors qu'est-ce que je suis devenue après l'accident ? demanda t-elle les yeux brillants.
- Un phénix... Une créature pure, judicieuse, protectrice mais extrêmement puissante. Tu auras du mal à la contrôler, je pense que tu t'en doutes...
Le phénix. Elle était alors cette créature, ce gigantesque oiseau de feu qui renaît de ses cendres, qu'on voit dans les livres ? Ce n'était pourtant qu'un mythe... Mais puisque c'est possible, Oria ne croyait pas aux contes et aux légendes avant que son corps ne prenne feu subitement dans la salle de bain, dans la cave et au lycée... Elle était alors mi humaine, mi phénix. Et sans cette chose, elle serait actuellement morte.
- Tu n'as pas soif de combat comme les loups garou, ni la soif de sang des vampires, ni le besoin cruel d'amour et de possession des créatures lunaires... Mais tu te sentiras anéantie et meurtrie lorsqu'une personne mourra devant tes yeux. Tu te sentiras toujours coupable, même si tu n'en ai pas la cause de sa mort. Ton devoir est donc de sauver les personnes en danger, de protéger les personnes qui ne peuvent se protéger eux-même. Nous sommes comme les gendarmes du monde qui font régner la justice. C'est cela notre élément.
- Mais je ne sais même pas encore laisser cette chose prendre possession de moi ! Je tombe à peine quelques secondes après lorsqu'il surgit. Je m'évanoui et je manque de force, s'écria Oria en fixant Selene dans les yeux.
- Avec le temps ton corps absorbera l'énergie qui lui ait nécessaire pour une transformation. Laisse le prendre possession de toi lorsqu'il le veut : il fait ça pour communiquer avec toi. Si tu le refoule, il partira, et tu mourras sûrement.
Oria eut curieusement un pincement au coeur. En refusant que son phénix la possède, elle le rejetait entièrement, inconsciemment. Elle refusait de ne faire qu'un avec lui sans le vouloir. Finalement, elle ne voulait pas redevenir entièrement humaine. Mais elle avait choisi de s'accommoder de cela, d'accepter ce que le destin lui avait donné. Être une créature surnaturelle tout le restant de sa vie pouvait rendre sa vie peut être bien meilleure, plus intéressante et pleine d'action. Alors, pour elle, c'était devenue plus une chance qu'un cauchemar d'être surnaturelle. Grâce à cela au moins, elle s'en était sortie de son accident.

We are surnaturals [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant