Chapitre 11

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- Oria ?
Une voix familière la sortit doucement de son sommeil. Elle se releva doucement et dirigea difficilement son regard vers la lumière venant de la porte de sa chambre entrouverte.
- Oria ! Pourquoi es-tu rentrée chez toi comme ça ? J'ai vu ton message mais on s'inquiétait tous pour toi !
  Elle reconnut le visage inquiet de Robin.
- Quoi ? Quel message ?
- Euh.. ton message, tu me disais que tu te sentais fatiguée et que tu avais trouvé le moyen de rentrer chez toi.
  Il lui fallut quelques secondes après cela pour se souvenir de ce qui lui était arrivée ce matin même. Elle se sentait pourtant très bien, Kieran ne lui avait apparemment fait aucun mal ; pas de bras ni de jambe cassée, ni de cheville froissée ou de plaies... Oria commençait à chercher des réponses à ses questions. L'avait-il emmenée chez elle après cela ? Elle n'en avait pourtant aucun souvenir, et pensa qu'elle avait dû s'évanouir après l'extrême douche froide qu'il lui avait fait subir. Malgré tout, elle était furieuse et inquiète car elle pensait qu'elle aurait très bien pu mourir d'une hypothermie à cause de lui.
- Ok... il est quelle heure ? demanda t-elle d'une voix fatiguée.
- Dix huit heures.
- Quoi !?
- Je viens à peine de rentrer. Tu es sûre que ça va Oria ?
Elle se frotta le bras gauche frénétiquement et toucha ses cheveux. A en sentir leur aspect encore à moitié humide et tout ondulés, elle fit une grimace.
- Je vais très bien mais j'ai un peu faim. On va manger ?

  Evidemment qu'elle allait bien. La personne qu'elle détestait le plus au lycée lui avait fait subir de force une douche gelée pendant de longues minutes, dans des vestiaires où l'odeur de sueur était nauséabonde. Il l'avait terrorisée en barricadant les portes, et avait fini par la couvrir d'une serviette en la serrant contre lui. Pour le message, elle ne se souvenait pas l'avoir écrit et envoyé elle-même. C'était sûrement lui qui l'avait fait. Oria ne trouvait rien de cohérent dans tout cela et préféra cacher le secret à son meilleur ami. Ce matin, la chose mystérieuse qui était en elle soit disant, avait refait surface. Kieran en savait certainement plus qu'elle. La prochaine fois qu'elle le verrait, elle se jura de le bombarder de questions jusqu'à ce qu'il lui réponde.

En regardant autour d'elle, elle remarqua posé au coin de sa porte son sac de cours. Sa veste et le reste de ses affaires quant à elles, étaient posées sur le bout du lit. Oria eut un frisson qui lui parcourut tout le corps lorsqu'elle vit sous la couette qu'il ne lui restait que ses sous-vêtements sur elle. Elle écarquilla les yeux et se mit à rougir.
- Je vais voir ce que je peux faire à manger dans ta cuisine, habille toi et descends vite, lui ordonna t-il en lui jetant un clin d'œil avant de sortir.
Elle ne savait plus qui accuser. Quelqu'un l'avait déshabillée avant de la laisser endormie dans son propre lit, c'en était trop pour elle. Elle se releva brusquement, attrapa sa chemise blanche et son jean mais remarqua très vite que ses vêtements étaient encore mouillés. Elle râla et se leva pour prendre un pyjama. Après tout, il était déjà tard. Elle enfila un short bleu évasé et un t-shirt à manche courte de la même couleur. Frénétiquement, elle vérifia chaque endroits de son corps devant le grand miroir de sa garde robe. Il n'y avait rien, aucunes traces... et heureusement. Toujours aussi furieuse, elle attrapa son portable et composa le numéro de son amie Abby. Une idée lui avait parcouru la tête, et elle était bien décidée d'en savoir plus sur toute cette histoire.
- Allo, Oria ? Tu vas bien ?
- Salut Abby, oui merci ça va. Désolée de ne pas t'avoir prévenue...
- Oui Robin nous a dit. Qu'est-ce qui t'es arrivé ?
La jeune brune hésita à lui dire l'entière vérité et marqua un silence pendant quelques secondes avant de se raviser.
- Oria ?
- Euh, rien. Juste un simple coup de fatigue. Je dors mal en ce moment, j'avais demandé à mon père de me ramener.
- Oh, d'accord... Repose toi bien alors. C'est les vacances, profites-en !
- Oui c'est vrai ! J'avais totalement oublié... C'est super ça !
- Ne me dis pas que tu avais oublié les vacances toi ! s'exclama t-elle en riant.
- Dit Abby ?
- Oui ? répondit la blonde en reprenant son sérieux.
- Je... tu saurais où habite ce .. Kieran ?
Un goût amer s'installa dans sa bouche avec une sensation horrible dans son ventre. La jeune brune ouvrit la fenêtre de sa chambre pour prendre l'air.
- Euh... celui avec qui s'est battu Robin ?
- Oui.
- Je crois qu'il n'habite pas à Pittsfield. Il doit habiter dans les petits quartiers autour ?
- Peut être.
Un calme marqua étrangement la discussion téléphonique entre les deux amies.
- Tu n'en sais pas plus ? reprit Oria d'un ton mystérieux.
- Non... Mais pourquoi tu me demande ça ?
- Juste pour savoir... Merci beaucoup Abby. Je dois raccrocher, on se retrouve demain ?
- Pourquoi pas ! J'informerais Jeff qu'on sort, à demain !
  Elle raccrocha. Oria soupira et jeta son téléphone sur le lit. Elle s'appuya sur le bord de sa fenêtre et inspira profondément l'air frais du soir. Le soleil reflétait sur les nuages avec une couleur orangée magnifique. Quelque part au dessus de l'horizon, légèrement cachée par les nuages colorés, la pleine lune montrait peu à peu le bout de son nez. Lorsque le soleil se sera couché, elle brillera de tout son éclat sur la ville de Pittsfield. Soudain elle entendit son meilleur ami l'appeler en bas. La jeune brune referma la fenêtre et descendit d'un pas rapide.
- Des œufs sur le plat avec des pâtes, ça va ? lança t-il.
- Tant que tu ne brûles rien ! remarqua t-elle d'un sourire mesquin en s'accoudant sur le bar.
Il plissa les yeux en tournant le regard vers elle et lui pinça le bras. Elle recula et se mit à rire.
- Aide moi pour la cuisson s'il te plaît, lui demanda t-il gentiment.
Oria se mit à bouillir de l'eau et y versa les pâtes. Elle remua doucement à l'aide d'une spatule et son regard se plongea dans le vide. Ses pensées déviaient encore une fois. Robin s'affairait à côté pour gérer les œufs. Il lui lança un regard inquiet.
- Ça va ? dit-il.
Oria sortit de ses pensées mais n'eut aucune réaction. Elle baissa la tête et continua de remuer les pâtes. Dans sa tête, les questions sans réponses s'étaient accumulées depuis longtemps. A force, ses songes s'emparaient d'elle à tout moment et cela se voyait. Elle avait une envie monstrueuse de dévoiler tout ce qui lui était arrivée, tout ce qu'elle avait caché jusque là. Mais quelque chose l'en empêchait. Elle avait peur que quelqu'un la prenne littéralement pour une folle, qu'on ne la croit pas. Cependant, tout cela allait bien recommencer... Ce mystère ne pouvait plus définitivement en rester un. Elle soupira discrètement.
- Tu veux regarder un film ce soir ? proposa t-elle en mettant un peu d'entrain dans sa voix.
- Bah, on peut toujours regarder la suite de notre série ?
- Comme tu veux.
Enfin le repas prêt, les deux s'installèrent sur le bar pour dîner. A cette heure là, il était curieux que ses parents ne soient toujours pas rentrés. Robin en fit la remarque.
- Ils rentreront plus tard que d'habitude, ma mère m'a prévenu ce matin.
- Ah, et ils vont faire quoi ? demanda t-il curieusement.
- Euh... manger au restaurant, ou aller voir un film au cinéma, peut être. Un truc de couple tu sais, ils ont besoin de se retrouver.
- Je comprends. En tout cas, j'aime bien quand mes parents sont pas chez moi, remarqua t-il.
- Moi aussi, mais je préfère t'inviter dans ces cas là. Passer la soirée seule, c'est pas mon truc.
  La bouche pleine, Robin tourna le regard vers elle et lui fit un clin d'œil suivit d'un signe de compréhension. Elle sourit.

Plus tard dans la soirée, les deux regardèrent leur série dans le salon. Robin avait acheté à l'épicerie du coin un paquet de biscuits au chocolat qui était à présent à moitié vide, avec une petite bouteille de bière pour lui. Oria quant à elle s'était préparé un milk-shake maison. Robin était installé en tailleur et râlait par-ci par-là lorsqu'une scène de la série l'étonnait. Sa meilleure amie, elle, avait allongé et croisé ses jambes sur celles du jeune blond.
Les heures défilaient d'une vitesse incroyable devant la télé. Il était à présent plus de minuit. La jeune brune commençait à se sentir mal à l'aise en restant dans la même position et se releva doucement. Elle décida d'aller se remplir un verre d'eau. Au moment où elle quitta le canapé, une sensation de brûlure s'installa soudainement dans son ventre. Oria fit semblant de n'avoir rien ressenti et continua jusqu'à la cuisine où elle manqua de tomber. Elle s'appuya sur le mur et elle sentit sa tête lui tourner. Une sensation de nausée lui fit pâlir le visage. Ça recommençait. Oria échappa un gémissement et se mit à courir de toutes ses forces dans la salle de bain, au premier étage. Elle avait une sensation étrange dans tout ses muscles et ses articulations, comme si elle allait s'évanouir d'une seconde à l'autre. Elle se sentait toute raide malgré la chaleur intense de son corps. La jeune brune souffla pour reprendre son rythme et pour se rassurer. Elle ferma la porte de la salle de bain à clé et entrouvrit la fenêtre. Quand elle se retourna, elle croisa dans le miroir un reflet inhabituel. Ce n'était pas elle, ce ne pouvait pas être elle. Toute sa peau commençait à devenir rougeâtre. Des fissures se dessinèrent sur tout le long de son corps où on pouvait y voir dans le creux comme des braises. C'était comme l'autre soir, dans la cave. Elle vit son regard flamboyant. Ses iris étaient d'une couleur ambrée parfaitement brillante. Oria recula et émit un cri de frayeur. Ses mains se mirent à prendre feu, ainsi que ses pieds, puis ses jambes. Maintenant jusqu'à ses épaules, les flammes grandissaient rapidement. D'un souffle saccadé, Oria ferma les yeux et laissa couler les larmes le long de son visage. Les perles salées qui dévalèrent ses joues s'évaporèrent aussitôt.
- C'est impossible, ce n'est pas réel... susurra t-elle.
Elle s'avança vers le lavabo et s'appuya. Elle actionna l'eau froide et tenta de se refroidir le visage, mais ses mains se troublèrent dans la fumée blanche. Sous la surprise, elle recula et émit un cri de frayeur. Elle ne pouvait plus rien faire, la chose avait prit possession d'elle. Elle s'écroula sur le sol et paniqua. Sa vue s'égara sur ses mains et ses bras qui ressemblèrent à une terre brûlée. Elle remarqua que les flammes venaient des crevasses dans sa peau. Pourtant, elle n'avait aucune douleur. Ce ne ressemblait pas à des plaies, c'était indolore comme si elle n'avait rien. La jeune brune fixa son reflet dans le miroir, elle était à présent entièrement couverte de feu mais il semblait que quelque chose en elle voulait surgir. Quelque chose de puissant. Elle se sentait incapable, insouciante, impuissante. Elle ne pouvait rien faire face à cela.
Soudainement, Oria se souvint de ce soir là, dans la cave. Le collier qu'elle lui avait donné, cette personne qui avait tenté de l'aider. Elle avait dit quelque chose comme "que la nuit à caché", mais malheureusement elle ne s'en souvenait plus très bien. Il lui fallait le collier. Oria se rappela qu'elle l'avait mit autour de son cou aujourd'hui, bien qu'elle l'avait détaché en enfilant son pyjama. Il fallait qu'elle aille le retrouver dans sa chambre, mais au moment où elle tenta de se relever, elle entendit son meilleur ami monter les escaliers bruyamment.
- Oria ? Tu es là ?
Il appuya sur la poignée mais celle-ci ne s'ouvrit pas.
- Oria ! Je t'ai entendu crier, est-ce que ça va ?
Robin avait un ton horriblement effrayé. Il força sur la poignée, ce qui fit paniquer Oria. Elle essaya de prendre sur elle et d'employer un ton normal.
- Je vais bien, n'entre pas Robin s'il te plaît...
Elle avait beau puiser tout les efforts du monde, sa voix paraissait si faible. La chose qui brûlait en elle et qui tentait d'apparaître lui consumait toute son énergie.
- Mais qu'est-ce qui se passe Oria ! hurla t-il. Je te préviens si tu ne m'ouvres pas dans une minute je force la porte.
Oria secouait la tête, anéantie par la situation. On pouvait entendre l'inquiétude dans la voix de Robin. La jeune brune n'avait jamais sentit un tel trouble en lui. Elle ne pouvait plus cacher ce secret à son meilleur ami à présent. Le destin la forçait à avouer. Oria redoutait la réaction que son meilleur ami allait entreprendre lorsqu'il la verra à terre, la peau cendrée, en feu, avec des yeux aussi brillants.
- Robin ! Arrête tout de suite... supplia t-elle.
Au même instant, la porte s'arracha dans un bruit sourd de bois qui craque. Robin avait fini par enfoncer cette porte, et s'arrêta au moment où il posa les yeux sur le corps de sa meilleure amie à terre. Elle était nue, couverte de cendres. Elle le fixait du regard, suppliant de ne pas l'abandonner. Il écarquilla les yeux devant cette scène surnaturelle. Des flammes entouraient tout son corps, mais elle ne semblait pas souffrir. Ses yeux étaient d'une couleur orange inhabituelle. Le feu semblait créer une forme étrange autour d'elle, mais Robin ne savait pas distinguer laquelle. Pendant de longues secondes, peut être même des minutes, il resta pétrifié devant elle. Jamais il ne s'était attendu à voir cela un jour dans sa vie. Sa meilleure amie, abandonnée de son sort, lui révéler si subitement la réalité.
Enfin, les flammes s'effacèrent, comme si on éteignait une bougie. Les crevasses qui étaient dessinées sur son corps comme des veines se refermèrent rapidement, et le feu laissait sur sa peau une couleur grise. Elle baissa la tête, et ses yeux reprirent leur couleur normale. Elle se mit à pleurer et s'écroula à terre. Robin se réveilla mentalement et agit d'une façon totalement inattendue. Il s'accroupit vers elle, la relevant doucement vers lui. Oria se réfugia dans ses bras et pleura toujours. Il la serra contre lui, et regarda dans le vide. Il tentait de comprendre ce qu'il venait de voir.
- Je suis désolée... susurra t-elle d'une voix déchirée.
Le jeune blond fronça les sourcils. Il se recula doucement et releva le visage de sa meilleure amie. Il plongea son regard dans le sien. C'était un regard de compréhension, d'assurance. Il lui fit comprendre par ce simple regard ce qu'il ressentait. Silencieusement la jeune brune le fixa. Seul son cœur battait très fort et laissait paraître un lien d'amitié très forte. Oria baissa les yeux et s'arrêta de pleurer. Elle aurait pensé que son meilleur ami se serait enfui après avoir vu cela. Son horrible forme. Mais non, elle avait tort. Il s'était comporté comme un vrai ami, la vraie personne qui tiendrait sa promesse à jamais. Celle d'être toujours là pour aider. Quelque soit son fardeau, il l'aurait porté avec elle.

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Hello, alors qu'est-ce que vous pensez de ce chapitre ? ;)

We are surnaturals [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant