Chapitre 20

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Lorsque j'ouvris les yeux, je me trouvais dans un lieu des plus étranges. Je ne sais pas combien de temps j'étais resté inconscient mais mon cerveau avait dû se détraquer totalement pendant cette période. Rien d'étonnant à cela, vu la beigne que je m'étais mangé. Je passai la main sous mon œil gauche et tressaillis de douleur. Je me fis la réflexion qu'il devait être aussi rouge que le droit à présent. Bref, revenons-en à l'aperçu de ma cellule que me donnaient mes nerfs optiques probablement endommagés. Je me trouvais dans un espace cubique totalement fermé : ni portes, ni fenêtres, ni quelque autre ouverture que ce soit. C'en était à se demander comment on n'avait pu me faire entrer ici. Autre chose étrange, la prison était tapissée de petits rectangles bleu foncé à lisérés blancs du sol au plafond. Vers le bas, cependant, les rectangles disparaissaient peu à peu pour laisser place à des parties intensément blanches, presque lumineuses, comme si les murs eux-mêmes étaient une source d'éclairage. La bonne nouvelle était que je n'étais pas enchaîné et donc libre de mes mouvements, je pouvais donc parcourir la pièce à la recherche d'un moyen pour m'évader. Je commençai par fouiller mes poches à la recherche de mon téléphone portable, mais naturellement, Jérémy avait eu la présence d'esprit de me le subtiliser. Je longeai donc les murs à la recherche de la moindre faille, du moindre petit interstice entre les carreaux et ne tardai pas à découvrir que les contours de la porte étaient en fait incrustés dans les jointures des cases. Je décidai donc (bêtement) de me jeter contre le panneau à plusieurs reprises. Une vive lumière jaillit du tracé à chacune de mes tentatives mais force était de constater qu'il ne se passait rien. Je tentai donc de lui commander de s'ouvrir à l'aide de mon esprit mais de nouveau aucune réaction. Pire encore, il me sembla que la porte absorbait toute mon énergie. Après quelques coups de pied et quelques tentatives pour l'envoyer valser, je finis par m'effondrer dans un coin, vidé de toutes forces. C'est alors que je remarquai à l'extrémité opposée un plateau repas plein de lasagnes fumantes assorties d'un grand pichet d'eau fraîche. Je ne sais pas quand ni comment cette nourriture était apparue, peut-être avait-elle toujours été là. Quoi qu'il en soit, à sa simple vue, mon ventre se mit à gargouiller bruyamment et je m'aperçus que je mourais de faim. Je rampai avec difficultés à l'autre bout de ma cellule et avalai goulûment le contenu de mon assiette. Quelque peu rasséréné et, pensant que Jérémy n'avait pas l'intention de me tuer, ou du moins pas tout de suite, je me roulai en boule et m'endormis sur le champ. 

Durant les heures qui suivirent, je me réveillais à plusieurs reprises, brûlant de fièvre et le corps baigné de sueur. Une étrange sensation me chatouillait au creux du ventre, enflant d'heures en heures et me dévorant les entrailles, jusqu'à ce que mes boyaux se tordent de douleur : le manque. Tout mon être réclamait à corps et à cris les herbes magiques que Jérémy avait dû glisser dans ma nourriture. Entre deux phases de délire intense où je planais au-dessus des nuages en compagnie de Sarah, je parvins à rassembler suffisamment mes idées pour combattre les effets néfastes de la drogue et, comme je n'en avais ingérer qu'une seule dose, à vaincre la sensation de manque et l'envie. A partir de ce moment-là je cessai définitivement de boire et de m'alimenter, je ne devais laisser aucune prise sur moi à mon tortionnaire. Plutôt mourir que de me joindre à son armée ! Et c'est de toute façon ce qui risquait de m'arriver. A intervalles réguliers, le plateau réapparaissait chargé de mets de plus en plus attirants, ce qui ne me rendait pas la chose aisée. Mais le plus dur c'était la soif. Ma gorge était si sèche qu'elle me brûlait et ma voix était si rauque et hachée que moi-même je ne la reconnaissais plus.

Ce fut au beau milieu de l'une de ces longues heures d'agonie que quatre voix aux timbres étrangement familiers me tirèrent de ma torpeur.

- Mais bon sang, c'est impossible ! Un gamin ne peut pas se volatiliser ainsi ! Cela fait trois jours que Mathis n'est pas venu en cours, s'exclama la première voix, que je reconnus être celle de M. Manéchal mort d'inquiétude. 

GENIUS - Tome 1 : TrahisonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant