Chapitre 19 - L'amitié appelle à quelques sacrifices

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Arrivée chez elle, Noor s'enferme directement dans sa chambre. Matilde est dans la cuisine avec Ophélie qui prépare le repas du soir. Elle reste pensive. Elle a envie d'écrire. Écrire une chanson sur Noor. Ou plutôt une chanson en hommage à tous les enfants victimes de violence de la part de leurs parents. Mais que pourrait-elle dire à ce sujet ? Elle ne l'a pas vécu et n'a pas envie de trop s'y aventurer. Déjà, lorsqu'elle voit ce genre de reportage à la télévision, elle a un pincement au cœur, mais après ce que lui a raconté Noor elle a juste une folle envie d'aller régler leur compte à ses parents. Alors si en plus, elle doit « interroger » sa belle-sœur pour avoir plus de détail afin que sa chanson soit parfaite, ce serait un peu abusé.

— Qu'est-ce qu'il y a Matilde ? demande Ophélie. Ça ne va pas ?

— Si... je crois, répond Matilde.

— Noor t'a parlé de sa famille biologique ?

— Hein ? Comment vous le savez ?

— Tu as la même tête que lorsque je t'ai raconté l'histoire de mon mari.

— Ça se voit tant que ça ?

— Oui.

— Au fait, je n'arrive pas à comprendre pourquoi... Comment on peut faire ça à un enfant ? À son enfant. Et pourquoi ?

— Il faut de tout pour faire un monde. Des gens plus farfelus les uns que les autres... Et c'est sans doute de pire en pire.

— Mais alors, pourquoi Noor les aime toujours ? Ses parents ne méritent pas ce qu'elle ressent pour eux.

— Noor a un cerveau. Elle est assez grande pour comprendre les choses et...

— Mais ils ont...

— Et alors ? Ce sont ses parents. Qu'on le veuille ou non, un enfant retourne toujours auprès de ses parents. Certes, il y a des exceptions, comme toujours. Mais c'est comme ça. Et puis qu'est-ce que ça lui apporterait de les détester ?

— Rien... je suppose.

— Matilde, ça me fait de la peine de te voir comme ça, lui dit Ophélie en lui caressant les cheveux. Allez, souris. Si Louis rentre, je n'aimerais pas qu'il te voie avec une tête pareille. Arrête de te tracasser pour rien. C'est du passé tout ça.

— Hmm... Quand vous avez adopté Noor, qu'est-ce qu'en ont pensé Loïc et Louis ?

— Je leur ai demandé s'ils étaient d'accord, et tu sais ce qu'ils m'ont répondu ? Loïc a dit :« J'ai déjà un petit frère, alors pourquoi pas une petite sœur. » et Louis: « comme ça, il y aura un équilibre, deux filles et deux garçons à la maison. »

— Ils sont rigolos. Dites-moi, quand est-ce que vous êtes allez au cimetière pour la dernière fois ?

— Pourquoi tu me poses cette question ?

— Juste comme ça.

— Bon, ça doit faire environ... très longtemps. Une dizaine d'années.

— Quoi ? Vous n'y retournez pas une fois par mois ? Ou par an ?

— Pour quoi faire ? Mon mari est mort.

— Je ne sais pas... Vous pourriez lui parler enfin... lui dire comment vos enfants ont grandi.

— Parler avec un mort ? Personnellement, je trouve ça un peu bizarre. Il est mort, point. Par exemple, l'album que je t'ai montré la dernière fois, je ne le sort que très rarement, voir jamais. Quand Loïc et Louis étaient enfants, on le regardait souvent ensemble. Je l'ai montré à Noor aussi, quand elle est arrivée à la maison. Hash me manque terriblement, c'est vrai... Et le temps passe, dix, quinze, dans quelques années ça fera vingt ans... ça passe vite.

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