Une fin d'année entre amis

3/ William

Lorsque j'arrive devant le magasin de location de voiture, je suis fatigué. Le décalage horaire bien trop présent dans mes veines et pas assez dilué par la caféine et les quelques heures grappillées dans le train. Heures étant un bien grand mot vu que j'avais quand même sacrifié du temps pour vérifier mes mails et y répondre. J'ai beau être en congés, les urgences ne prennent pas de vacances. Du coup, je me sens moyen de prendre le volant, mais plus vite ce sera fait, plus vite je pourrais m'octroyer une sieste ou quelques litres de caféine si le programme ne le permet pas.

Quand Arthur m'a appelé il y a plusieurs mois, j'avoue avoir été surpris. On correspondait beaucoup par mail mais rarement par moyen instantané, la faute aux fuseaux horaires. Mais entendre sa voix m'avait propulsé plusieurs années en arrière, quand nous étions encore étudiants et ça m'avait fait plaisir. Encore plus lorsqu'il m'annonça ses fiançailles. Je savais qu'il avait quelqu'un en vue, qu'il en était vraiment amoureux, et m'avait même confié ses doutes quant à son choix de la demander en mariage. Savoir qu'il avait sauté le pas était super. Pouvoir la rencontrer encore plus.

J'ai toujours su qu'Arthur serait le premier à se caser. Et c'est tout naturellement que ça c'est fait.

Je mets les clés dans le contact et branche le GPS. Je monte le volume de l'autoradio afin de ne pas m'endormir et en route. Concentré sur la route, j'essaye de ne pas penser à ce que je redoute le plus. Compliqué, vu que j'y pense depuis la proposition de passer la semaine du premier de l'an ensemble. Arthur m'a dit qu'il sera là. Peut-être qu'avec le temps, tout s'est arrangé ? Connaissant son caractère et le fait qu'il n'a jamais répondu à mes mails ou mes appels me prouvent le contraire. Mais les miracles de Noël existent, il suffit d'y croire. Du moins, c'est ce que disent tous les feuilletons de romance américaine qui passent en boucle à la télévision en ce moment.

Une bonne demi-heure plus tard et ayant plusieurs fois dévié de ma trajectoire, je m'arrête pour m'acheter un thermos et le faire remplir de café. Lorsque le liquide chaud coule à nouveau dans mes veines, je repars.

Le chalet est enfin en vue, je ne rêve que d'une chose, pouvoir m'installer au coin du feu et ne plus bouger. J'ai la tête qui va exploser de surdose de caféine, tout comme ma vessie, et je dois avoir les yeux rouges de n'avoir quasiment pas dormi.

Je gare la voiture à côté des deux autres et respire le bon air frais de la montagne. Ce chalet est magnifique. La description ne mentait pas. Le nombre d'étoile non plus. Je sors ma valise du coffre et me traîne littéralement jusqu'au perron. Je prends à peine quelques secondes pour admirer la jolie couronne de l'avent avant de frapper trois coups contre la porte. Celle-ci s'ouvre rapidement.

- Salut, tu dois être Will', moi c'est Magalie. Je suis ravie de faire ta connaissance.

Une pile électrique. C'est le premier mot qui me vient à l'esprit quand apparait, devant moi, la meilleure amie de Thelia. Il n'est même pas encore neuf heures et on dirait qu'elle a ingurgitée encore plus de caféine que moi.

- Entre, ne reste pas dehors. Tu as fait bon voyage ? Pas trop dur le décalage horaire ? Arthur nous a dit que tu étais arrivé dans la nuit.

Où est le bouton pause ? C'est une vraie tornade. Heureusement, mon meilleur ami arrive à ma rescousse.

- Magalie. Laisse-le au moins arriver.

- Mais c'est ce que je fais.

Elle sourit avant de prendre mon manteau et de l'accrocher dans l'immense penderie. Arthur en profite pour me donner une franche accolade.

- Qu'est-ce que ça fait plaisir de te revoir !

Je la lui rends en souriant paisiblement. Il m'a manqué. Je me suis fait des amis aux Etats-Unis, mais ce n'est pas pareil. Arthur, c'est depuis le bac à sable. J'ai l'impression d'être rentré à la maison.