Chapitre 11 ~ On passe à table ?

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On ne répétera jamais ô combien tu avais eu raison. Même encore aujourd'hui, l'admettre m'est difficile. C'était te laisser gagner et m'avouer vaincue et on savait très bien tous les deux que j'avais bien trop de fierté pour ça.

« Perdre » n'était pas un mot courant dans mon vocabulaire.

Surtout contre toi.

Dis-moi Barth, te souviens-tu de nos batailles dans la cour de récré et de nos chamailleries dans les jardins de nos parents ? Te souviens-tu de tous ces prétextes débiles que l'on se trouvait pour se battre encore et sans cesse ? C'était parfois extrême allant jusqu'à ce que l'autre admette sa défaite.

Souvent, on arrivait sur une égalité. Une égalité presque parfaite.

Mais pas ce combat.

Ce duel-là, cette guerre-là, je l'ai perdue.

Je l'ai perdue contre toi.

J'ai perdu pour toi.

**************************

« - Astrid, tu me files le dossier là, à ta droite ?

- Hmm...Tiens.

- Et le stylo ?

- Tiens. »

Le cerveau d'Astrid s'est momentanément fait la belle, merci de réessayer plus tard.

« - Tu rêvasses ou quoi ?

- Hein ? Mais pas du tout...Dis Madeleine, tu ne trouves pas que Barth est bizarre aujourd'hui ? »

Elle se penche sur le côté, le dévisageant à son bureau, concentré comme jamais et hausse des épaules.

« - Je le trouve calme. Pourquoi ?

- Justement...C'est trop calme. C'est louche. Je suis sûre qu'il complote quelque chose.

- Ahahaha ! Tout de suite. Astrid, tu crois vraiment que Barth est dans ce genre-là ? »

Et toi tu oses vraiment me poser la question ?

Les conneries de Barth sont comme des feux de forêts : Elles se sentent à des kilomètres et là, je ne sais pas pourquoi, mais je redoute le pire venant de lui.

Après tout, cela ne m'étonnerait même pas.

« - Bon, je vais déjeuner, c'est l'heure. On se voit tout à l'heure, d'accord ?

- Pas de soucis, je ne vais pas tarder non plus. Je finis juste un truc. »

Pour une fois, je ne suis pas la première à m'en aller à midi. C'est rare que Madeleine me passe devant, mais je trouve une certaine occupation, voire même une forme de fascination, dans le fait d'observer Barth. Je ne sais pas ce qu'il fait très exactement, ni même ce qu'il pense, mais je crois que de le voir là, regardant à droite puis à gauche, m'amuse légèrement.

Décidant de le laisser à sa tâche du jour, peu importe ce qu'elle était, j'attrape mon sac à main et me dirige vers l'ascenseur, quand ce dernier se précipite pour me passer devant, appuyant sur le bouton de l'étage conduisant au toit de l'immeuble.

« - Hé ! Je descendais. Tu ne connais pas l'adage « Les femmes d'abord ? »

- Eh bien, maintenant, on monte. Et puis tu sais que cet adage date du Moyen-Age et que les seigneurs laissaient les femmes entrer en premier dans leurs suites au cas où il y aurait un assassin dissimulé ? Comme ça, la femme se faisait tuer en première ? Alors ? C'est toujours « les femmes d'abord » ?

- Tellement romantique...C'est fou !

- Ouais, je sais. Ça fait partie de mes nombreuses qualités. »

L'ascenseur monte et quand les portes s'ouvrent, Barth me tend son bras.

« - Si Madame veut bien se donner la peine...Le dîner est servi. »

C'est une blague, j'espère ?

À ma grande surprise, une nappe était posée au sol, retenue par 4 gros galets, un petit panier en osier en son centre et deux coussins.

« - Quand est-ce que...

- A chaque pause pipi ! Bon, on passe à table ? J'ai faim moi.

- Tu sais que tu es incroyable par moment ?

- Oh ! Astrid me ferait-elle un compliment ? Ai-je bien entendu ?

- Tais-toi un peu. J'espère que c'est bon au moins.

- Hé...Je suis aussi bon au lit qu'en cuisine !

- Je ne veux pas savoir...Tu veux me couper l'appétit ?

- Aller, viens. Je t'emmène. »

Bras dessus, bras dessous, le visage éclairé par un léger sourire amusé, il me dit alors

« - Aujourd'hui, c'est déjeuner en amoureux ! »

C'est n'importe quoi.

Et l'amour ça se mange ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant