Chapitre 4 ~ Effort vain

3.3K 535 49
                                    

Le problème chez les gens, quand il s'agit d'amour, c'est qu'ils ont tendance à s'attacher beaucoup trop à autrui et trop vite. Ils ne prennent pas le temps de se poser, de s'interroger et de se demander si vraiment cette personne vaut autant, si l'on peut sacrifier autant de temps pour elle.

Et inversement. Les gens en général ne se rendent pas compte du temps personnel qu'on leur consacre sous prétexte « qu'on les aime bien ». Je trouve ça ridicule.

Pourquoi ils restent éveillés jusqu'à des heures improbables la nuit juste pour discuter avec une personne qui s'en bat les cacahuètes d'eux ? Ah oui...C'est vrai. Parce qu'une phrase miteuse sur internet a dit « Les conversations tard le soir, ça fait tomber amoureux ». Dites-moi messieurs, dames...Vous avez trouvé l'âme sœur en discutant jusqu'à deux heures du matin ? Non ? Oh eh bien retournez dormir et arrêtez de sacrifier vos heures de sommeil pour ça ! Vous avez des mines horribles le lendemain. Je préfère encore voir le gars aux lunettes de soleil qui a trop bu, mais qui s'est amusé, que la fille déprimée qui a plus de cernes qu'un tube Nivea ne pourrait lui enlever parce qu'elle a passé toute la nuit à « discuter », « consoler », « réconforter » un gars qui s'en bats les mirabelles d'elle.

C'est comme, à chaque fois, à chaque « premier rendez-vous », on s'applique. Un peu comme un enfant en maternelle à qui on dit de ne pas dépasser quand il colorie : On se coiffe. On se maquille. On s'épile. On se fait les ongles. On s'habille comme jamais on ne s'habillerait en temps normal.

Mais pourquoi ? Pourquoi on fait ça ? Pourquoi on ment sur la marchandise comme ça ?

Au réveil, le maquillage aura coulé et on ressemblera à Marylin Manson.

Le brushing se sera fait la malle et on aura des allures de caniche.

Et les poils..Les poils mon dieu. On s'épilera les trois premiers mois et puis au bout d'un moment, on se précipitera vers l'être aimé en criant « Regarde ! Je ressemble à un cactus » et le tout avec un air fier.

Mieux vaut le cactus que Chewbacca, je l'accorde, mais tout de même.

Pourquoi se donner autant de mal ?

Surtout pour qu'au final, on nous sorte le fameux « Tu es comme une sœur pour moi » ou le « Je t'aime bien ». Ah les classiques ! Que dis-je ! Les incontournables phrases bateaux qui nous sauvent d'une relation à sens unique !

« - Astrid. »

Je finis mon article, cinq minutes.

« - Astrid !

- QUOI ?! »

Je manque de peu d'enfoncer mon crayon dans l'œil de Barth' tandis qu'il se penche juste au-dessus de moi avec son air mielleux. Le revoilà à l'assaut.

« - Je voulais juste savoir si tu n'avais pas des post-its en rab...Je n'en ai plus.

- Tu m'as prise pour la secrétaire peut-être ?

- Non, mais je sais que tu as toujours pleins de post-its de couleurs ! »

C'est pour mieux les coller sur ta face d'idiot quand tu dors la bouche grande ouverte.

« - Regarde dans le tiroir en bas à gauche. Il doit y en avoir. T'en a besoin pour quoi ?

- Je fais le tri dans mon courrier. J'ai certaines lettres...Elles sont...Spéciales. Vous êtes d'un compliqué vous les femmes.

- Barth ? Tu veux un conseil de femme justement ?

- Hmm ? Lequel ?

- Retourne à ton bureau avant que ma complication ne vienne s'emmêler.

- Tout de suite tu te sens visé ! Tu ne t'es jamais dit que tu étais peut-être à part ? Une sorte de perle rare ? Un joyau parmi les cailloux !

- Arrête ça.

- Mais je ne fais rien. Je ne fais que chanter tes louanges ô belle et merveilleuse Astrid. Femme à post-it ! »

Je ne sais pas si je dois le prendre pour un compliment celui-là.

« - Prends donc ce que tu veux et laisse-moi finir mon article, sinon je vais me faire taper sur les doigts.

- Si tu veux que ton preux chevalier t'aide en quoi que ce soit, surtout, n'hésite pas !

- C'est vrai ? Je peux tout te demander ?

- Tout ! Absolument tout !

- Absolument tout ? Sans limites, ni rien ?

- Je n'oserais t'imposer des limites à toi ô reine de mes journées !

- Parfait...Dans ce cas...Barth...

- Oui Astrid ? »

Il se penche vers moi s'attendant certainement à quelque chose de ma part quand je lui glisse :

« - Retourne à ton bureau. »

C'était facile.

« - Ce que tu peux me briser le cœur par moment.

- Je sais, aller, va. »

Cours, saute, vole !

Et ne reviens jamais.


Et l'amour ça se mange ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant