L'Institut pointe en face de moi, alors que je marche dans le sable caillouteux de la ville où vivent entassés les fonctionnaires de la République et les pauvres serviteurs qui se plient quotidiennement aux plaisirs des Seigneurs et riches hommes. Je me rends compte avec ce panorama que les livrets sur Draark ne mentaient pas : cette planète, du point de vue d'un Santarian, n'est pas vivable. Je ne saisis pas tout à fait pourquoi ils ont choisi de s'y installer, hormis pour la simple raison de l'expansion.
Je grimpe la mince pente qui me sépare de l'entrée, puis pénètre à l'intérieur. La nuit est pratiquement tombée et personne ne rode dans les couloirs, heureusement. Je dissimule néanmoins mon visage autant que je le peux en baissant ma capuche. J'avance vite et à pas feutrés. Je monte quatre à quatre les escaliers du hall central menant aux appartements de Priam. Je n'entends rien. Ni le bruit de mes pas, ni l'écho de ma respiration. Comme si quelque chose planait dans l'air et réduisait à néant tous les autres sons parasites.
Tout à coup, des questionnements m'assaillent. Que s'est-il passé pendant mon absence ? Le vieillard s'est-il inquiété pour moi ? Il a forcément dû soupçonner ma mort, puisque j'ai disparu un long moment. A-t-il pris le risque de me chercher ? J'espère que non ! Sinon les autorités se seraient doutés de la supercherie. Je n'ai point terminé les épreuves et en plus, je rentre les mains vides. Je ne peux pas me permettre d'être découverte maintenant !
Ainsi, j'atteins le bureau de Priam. Je toque une première fois. Aucune réponse. Je suppose qu'il s'est couché. Je toque une seconde fois et finis par forcer la porte, mais la poignée s'abaisse d'elle-même. Étrange qu'il n'ait pas verrouillé ses appartements.
— Priam ? appelé-je.
La pièce est plongée dans le noir. Les volets des fenêtres ont été clos, ce qui est inhabituel. Le Colonel adore les étoiles. Ils ne ferment jamais ses volets. Il passe souvent ses nuits à les observer. Du moins, il me le racontait dans ses lettres que je lisais en diagonal, ennuyée par ses discours inutiles.
— Vous êtes là !
Une voix rauque et gutturale provient de ma gauche. Je dégaine mon épée... Non, je ne la dégaine pas, puisque je ne la possède plus. Je grogne et me lance un juron intérieurement. Devrais-je retourner à l'armurerie ? Je repousse cette question et fais volte-face vers la personne dont je ne distingue que la silhouette. Instinctivement, je rapproche mes bras de mon corps et les lève en position de garde, prête à me défendre.
— Où est Priam ? exigé-je.
— Allume la lumière, Yurin !
Aussitôt dit, aussitôt fait. Alors que la pièce est désormais éclairée, je retiens un soupir, déjà désespérée. Fièrement, se dresse Yoreck, bras croisés sur son torse. A ses côtés, un homme plus grand que lui et surtout plus corpulent. Un gros balourd que je pourrais balayer d'un coup de pied rapide. Les deux acolytes m'observent avec des sourires en coin. Le plus belliqueux pouffe d'abord, et il s'esclaffe en me jaugeant de haut en bas. Je le dévisage en silence, réfléchissant à un moyen efficace de les mettre hors-service. Même son collègue le regarde curieusement à son hilarité soudaine. Un sourcil haussé, je m'interroge à propos de la pensée stupide qui le fait se gausser tel une vache en plein accouchement.
— C'était donc vous ! s'exclame-t-il en se calmant peu à peu. Je ne parviens pas à être surpris. C'était évident, après tout !
Il m'irrite déjà. Dans ma tête, je me vois lui saisir le col et le plaquer contre le mur, et le frapper à mort ne serait pas de refus.
— Tu vas devoir être plus clair. Qu'est-ce que tu racontes ? me contenté-je de questionner, les yeux plissés.
Son sourire goguenard s'étire de plus en plus.
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RAVAGEUSE (Tome 1)
Fantasy« Je fuyais cette vérité, mais je suis l'enfant du chaos et au chaos je dois retourner. » Elle est une jeune novice de la République Santaria, mercenaire pour subsister. Sa vieille connaissance et mentor, Priam, l'invite subitement à rejoindre l'In...