Partie 3

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Khoury à Dakar:

Voilà à peu près 3 ou 4 jours maintenant que je dormais dans cette maison en construction, franchement c'était très dur entre les cafards, les moustiques wokatouna ba sonou mais le plus important c'est que je me sentais en sécurité il n'y a pas trop de passage sur ce côté de la ville.
Mais malheureusement le propriétaire qui en passant est un bel homme, respectueux est venu m'informer qu'il allait recommencer la construction qu'il avait suspendue faute de moyens. Lol ! Il m'a juste dit d'une façon respectueuse et rafinée de foutre le camp je pense, je ne suis pas la plus intelligente mais ça je pense que je l'ai très bien compris.
Je le remercie d'abord de m'avoir accueilli et d'avoir été si courtois avec une si vulgaire fille sans toit.
Les remerciements faits, Je me retrouve à la rue. Toute seule.
C'est décidé ! Je ne dormirai pas aujourd'hui sans avoir trouvé du travail.
Après des heures et des heures de marche. Je me retrouve à contempler une belle et grande maison. Pourquoi ne pas aller demander s'ils n'avaient pas besoin d'aide ? Il faut avoir de l'audace des fois,
Je frappe à la porte avec beaucoup d'espoir. C'est une belle dame civilisée et souriante qui est venu m'ouvrir le portail. Elle était tellement belle et sentait le Gowé saff hummmm aka kham lou bakh.

-Bonjour madame, excusez-moi de vous déranger mais je suis là pour chercher du travail.

-Du travail ? Tu es trop petite pour ça ! Tu as quel âge ?

- En faite, toute ma famille compte sur moi, je dois aider mon père et mes frères qui sont restés au village et qui crois en moi. Je suis jeune mais je sais faire tous les travaux ménagers.

-Tu demandes combien par mois ?

- Pour l'instant un petit salaire m'ira. Je peux débuter ainsi et après on discutera. J'ai juste besoin d'un toit.

- D'accord viens, rentre.

Comment vous dire qu'en ce moment là, j'étais la plus heureuse du monde.
Je ne remercierai jamais assez cette femme. Tata Rose elle s'appelait.
J'occupais une des nombreuses chambres d'ami du rez-de-chaussée avec une autre domestique.

Tata Rose m'a expliqué mon travail qui était simple, comme il y a une autre femme pour la cuisine. Je ne devais faire que le ménage du 1er étage et de la terrasse: passer le balais, faire la poussière et passer la serpillière, je devrai aussi faire quelques courses rien de bien difficile, une fois que j'aurai pris mes empreintes ce sera très facile pour moi.
C'est étonnant quand même que seulement Tata Rose et son mari Mr Tidiane Touré habitent une si grande maison, je n'ai pas vu d'enfants ni de petits enfants c'est assez bizarre mais bon je ne m'attarde pas trop là dessus.

Mon travail était simple puisque j'avais l'habitude de travailler comme ça là-bas à Ronkh. Je mangeais bien et à ma faim et j'appelai des fois Tata Ndawa pour prendre des nouvelles de mon père et de mes frères et sœurs, il me manquait énormément.
Après un mois de goorgorlu, mon premier salaire arriva.
C'était 25.000f et ça me convenait bien pour l'instant je n'ai pas de problème avec ça.
J'ai demandé à Awa, l'autre domestique qui s'occupe de la cuisine de me montrer comment envoyer de l'argent à ma famille:

- Awa tu sais comment envoyer de l'argent à des proches ?

-Oui tu fais simplement un transfert Western Union, tu as un numéro de téléphone ?

-Non j'en ai pas.

-Prends le mien alors et tu as le numéro de celui à qui tu veux envoyer l'argent ?

-Non.

-Ah ! Dans ce cas ce ne sera pas possible.

-Ahhh siiii !
J'ai un numéro, donne moi une minute je te l'emmène.

Je vais chercher le numéro que ma tante m'avait remis pour le donner à Awa qui va se charger du reste.
Elle est vraiment gentille cette fille. Au début, elle a rigolé à l'entente de mon nom mais après elle s'est excusé en me disant que c'est original comme nom et que c'était la première fois qu'elle entendait ça.

Quelques minutes après, Awa m'expliqua que l'envoi est bien passé.
J'appelle alors mon père pour prendre de ses nouvelles.

-Allô pape ?

-Oui Khoury comment tu vas ?

-Je vais bien Alhamdoulilah et toi ?

-Akh mangui ni rek. Sama tension bé yegone fane yi niou guene. Mais Sant Yallah bou bakh.

-Ah lolou déh yeugoumako wone pape.
Tu as reçu l'argent ?

-Oui Dieuredieuf ma fille, je suis très content je te souhaite une longue vie, que Dieu te protège.

-Amine pape, nekkal si diam
Je te laisse avant mon patron ne se fâche.

-Waw wa keurgui yeup nio gui lay nouyou.

Je remets le téléphone avec les larmes qui coulent.
Ma famille ma manquent trop.
Ça fait maintenant des années que je n'ai pas revu ma mère et sa fille a besoin d'elle.
Awa m'a consolée du mieux qu'elle pouvait.
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Travailler dans cette maison est une vraie bénédiction.
Tata Rose était vraiment tellement gentille avec nous et nous considérait comme ses propres filles Machallah.
Je prie pour que dieu lui donne une longue vie. Son mari est souvent absent mais le peu de temps qu'on le voyait il nous donnait à chacune de l'argent de poche et nous augmenter  soit 10.000 ou 20.000 sur notre salaire. Je ne l'ai remercierai jamais assez.

Contrairement aux autres, moi je trouve que la vie à Dakar n'est pas aussi dure qu'on me l'avait décrite enfin un peu quand on ne connait personne. Mais de mon côté je ne peux dire que Alhamdoulilah je rends grâce à Dieu vraiment.
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Ce matin là, Je devais accompagner Awa pour les provisions du mois. À chaque fin du mois, l'homme de la maison nous remettait 80.000F pour acheter du riz, de l'huile, de la viande, du bon poisson, des épices et tout ce qui va avec bref la ration complète pour 25 jours au minimum.
Pour y aller, nous avons pris un bus qui était bombé de monde. Nous avions à peine de l'air pour respirer. En plus avec énormément de bouchons. Tchiey Yallah ! Des hommes ( des étudiants ne semble-t-il )
parlaient fort et riaient bruyamment dans le bus, le comble était qu'une odeur nauséabonde de transpiration, de cigarette et d'autres choses que je ne saurais dire se dégageait de leurs corps. Non mais quel calvaire ! De pikine au centre-ville ? Vous vous imaginez ? Supporter l'odeur des jeunes hommes et les rangsrangs du bus ! Olalaa.
Nous arrivons enfin au Marché Kermel où les mouches sont plus nombreuses que les personnes, winw winw boudoul diekh li ken khamoul loumou done nak.
Décidément ! Dakar n'a rien de l'Eldorado.
Moi je tenais juste le panier derrière Awa. J'avais seulement hâte de sortir de là, la partie consacrée aux poissons, aux fruits de mers et de leurs dérivés.
Mais cette dernière semblait plutôt à l'aise, elle avait l'air de s'y connaitre et se déambulait de gauche à droite sous ce chaud soleil, il faut croire qu'elle avait la volonté de m'énerver ce jour là.

"Plus jamais je ne t'accompagnerai au marché" lui avais-je dit.
Elle en a rigolé des semaines.

Je m'étais trouvé une confidente mais aussi une amie.
Je me rappelle qu'un jour nous sommes sorties en cachette pour aller regarder un Sabar offert par le SingSing rythme qui venait de la Médinaun autre quartier assez populaire de Dakar, ce jour là, j'étais tombé sous le charme de Alla tegueul la star du groupe de batteurs. Il est très élégant tei dafa meun loumouy deff nak, à dakar je n'y avais pas encore posé les pieds dans un Sabar mais le niveau est très élevé faut se l'avoir, fethie senegal la fek bakh. Après nous être bien amusé, à notre retour, Tata Rose nous attendait devant la porte de la maison. Elle a rien dit, elle a pas crié mais juste son regard a suffit pour que j'aille m'enterrer au fin fond de Thiaka Ndiaye tellement j'avais honte, nous étions rentrés vers 3heures du matin et nous avions tellement honte qu'on n'a pas mangé avec elle durant des jours...
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Pendant les week-ends, lorsque j'avais du temps libre, avec le petit téléphone Nokia 3310 que je me suis acheté la semaine dernière, je passais des heures à parler à ma tante Ndawa, à mon père, à Sidiya et à tous les enfants de la famille qui me racontait les nouvelles rumeurs et potins du village...

-Oui Dieuredieuf ma fille je te souhaite une longue vie, que Dieu te protège.

-Amine pape. Nouyoul ma nieup.

Khoury La Villageoise  TOME 1 {RÉÉCRITURE} Où les histoires vivent. Découvrez maintenant