19 - LA RÉVÉLATION

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 La nuit que nous venions de passer resterait à jamais inoubliable. Nous étions tous les deux aux anges. Samuel me regarda et me sourit.

— Habille-toi ! Il faut que je te montre quelque chose, s'exclama-t-il.

— Quoi, maintenant, en pleine nuit ?

— Oui, dépêche-toi.

Je sautai du lit et exécutai ses ordres pendant qu'il prit une couverture dans mon dressing.

— Où m'emmènes-tu ?

— C'est une surprise.

Il nous dirigea à travers les bois qui se trouvaient derrière la villa. Je ne me sentais pas très à l'aise. La dernière fois que j'étais allée aussi loin dans les bois, c'était ce fameux jour de pique-nique.

Au bout de quinze minutes, un immense endroit dégarni d'arbres apparut. La lune si blanche et si parfaite éclairait cette grande clairière.

Samuel m'entraîna au centre.

— Je dois t'avouer quelque chose, déclara-t-il. Mais surtout, promets-moi de ne pas me juger trop vite.

— D'accord, lui promis-je.

Il prit une grande inspiration.

— Parfois, la nature crée des choses qui sont bonnes ou mauvaises. Mais elles ont toujours un sens, un but. Elles ne sont pas là par hasard. D'un côté, il y a le bien, et de l'autre, le mal. Les choses sont faites ainsi, on ne peut pas les changer. (Il hésita à poursuivre.) Écoute, je t'aime, Anya, et ce que je m'apprête à te révéler pourrait t'effrayer. Alors, quelle que soit ta réaction, n'oublie pas ces mots : « je t'aime au plus profond de mon être, et quoi qu'il arrive, je ne te ferai aucun mal, du moins, pas volontairement ».

Ces mots sonnèrent comme du déjà-vu. Seulement là, ils avaient une autre signification pour moi.

Il recula de quelques pas, prit une autre grande inspiration et ferma les yeux pour se concentrer. De légers tremblements parcoururent son corps. Il ouvrit ses yeux, puis ses pupilles devinrent noires. Les vaisseaux éclatèrent et ses yeux s'injectèrent de sang. Il ouvrit sa bouche comme pour pousser un cri de douleur. L'intérieur de ses lèvres devint noir à son tour. Sa mâchoire se déforma et s'allongea. Ses tremblements s'intensifièrent et des cris sortirent du fond de sa gorge, comme un râle, alors que des veines se dessinèrent sur ses mains. Des ongles noirs triangulaires sortirent de l'extrémité de ses doigts, telles des griffes. Son pull se déchira dans le dos laissant ressortir sa colonne vertébrale. Ses pieds s'allongèrent au niveau de ses chevilles. La partie basse de son visage se transforma à nouveau. Son nez s'allongea et forma un museau. Des oreilles pointues remplacèrent les siennes et des poils longs recouvrirent son corps.

Cette tête étrange me regardait. Ses yeux brillaient d'un doré flamboyant. Il poussa un hurlement bien distinct cette fois-ci, un hurlement à glacer le sang. Ce loup immense s'adressait à la lune. Dans le clair-obscur, je distinguai ses longs crocs.

Il se tenait là, devant moi, impressionnant par sa hauteur. Mon cœur battait à tout rompre. Je ne pouvais que reculer devant ce tel spectacle. Il s'approcha de moi. Je décidai de me diriger vers le fond de la clairière en courant, mais en vain. Je me retrouvai plaquée au sol. En me retournant, le monstre me fixait du regard avec ses yeux dorés. De plus près, ils me parurent magnifiques. Ses pattes retenaient mes bras au sol d'une telle force que je ne pouvais plus bouger. En entendant ses grognements, je compris que c'était la fin. Il allait me dévorer. Mais la bête resta immobile. Finalement, elle n'avait peut-être pas l'intention de me tuer.

Les mots de Samuel me revinrent alors en mémoire. « Je t'aime au plus profond de mon être, et quoi qu'il arrive, je ne te ferai aucun mal, du moins, pas volontairement », « ce que je m'apprête à te révéler pourrait t'effrayer ». La scène qui venait de se dérouler devant moi prit un sens à ces mots. J'avais à présent compris leur signification. Une fois la peur dissipée, le loup retira ses pattes de mes bras et s'écarta.

AU-DELÀ DE LA LUNE - 1 : Songes (l'intégrale)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant