Chapitre 51

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Mon téléphone sonne. Je me redresse sur mon coude.

-Mais qui c'est à cette heure-ci, grogne mon frère de très mauvaise humeur.

-Micke.

Il se redresse.

-Vite, déroche !

-Attend calme toi ! Je vais aller discuté tranquillement avec lui dans le jardin. Je te le passerais après.

-Trop tard, tu n'as pas décroché.

-Je vais le rappeler.

J'allais sortir mais il m'appelle.

-Prends ça, sors pas bras nus à une heure du matin.

-Merci.

J'enfile son gilet et descends doucement les escaliers. J'ouvre discrètement les baies vitrées du salon et sors. Je m'assois sur un transat et appuie sur son contact.

Conversation téléphonique :

-Allô ?

Je suis enfin soulagée d'entendre sa voix.

-Comment est-ce que tu vas ? Dis-moi que tu te sens mieux.

-Oui.

-Je suis rassurée... J'ai eu très peur.

-J'imagine.

-Tu es encore à l'hôpital ?

-Oui. Il me garde cette nuit puis je pourrais sortir demain dans la journée.

-Alors tant mieux. Tu pourras te reposer un peu chez toi.

-Non.

-Pourquoi ?

-Il faut qu'on se voit et qu'on discute tous les deux.

-Mais c'est impossible...

-Pourquoi ?

Sa voix me parvient avec une pointe de colère.

-Je suis en France, chez mes parents.

-En France ?! Chez tes parents ?! Tu m'fais marcher, c'est ça ?!

-Non non. Je suis arrivée en fin de matinée.

-Attends et tu comptais me mettre au courant quand ?!

-Hier soir. Au restaurant.

Il reste silencieux.

-Mais comme tu n'es pas venu et que nous n'avons plus beaucoup d'occasions pour discuter, je n'ai pas pus te l'annoncé.

-Tu pars malgré que je sois à l'hôpital ?!

-Crois-moi, je voulais tout annuler, mais Stefan a insisté pour que je rentre en France !

-Moi je me réveille, paumé dans une chambre d'hôpital avec de vagues souvenirs en tête et les gars de l'équipe, mais aucune Carmela ?! Nan ! Elle préfère se barrer en France pour sa famille ! J'en fais partie pourtant de ta famille ! J'suis ton p'tit-ami !

-Oh vraiment ?! De vagues souvenirs ?! Il ne fallait pas boire à cette stupide fête à cause de cette stupide victoire !

-Stupide victoire ?! J'te rappelle que c'est grâce à moi si l'équipe gagne et qu'on parle à nouveau de nos sports dans les journaux d'étudiants londonien ! Et franchement, tu es mal placé pour me parler d'alcool !

-Peut-être, mais ! Mais... Tu m'énerves ! J'te supporte plus !

-Et qu'est-ce que j'ai bien fait pour mériter ça ?! Moi, j'ai dû supporter des après-midi entières à te donner des cours de maths !

-Tu supportes avec moi ?! Mais et les autres alors ?! Tu ne dois pas les supporté ?! Il y a qu'avec moi que c'est insupportable ?!

-Eux au moins ils comprennent rapidement ! Ils ne mette pas dû temp comme toi ! C'est plus agréable ! C'est grâce à moi aussi si tes parents sont fiers de toi dans les matières scientifiques !

-Tu penses que sans toi mes parents ne sont pas fiers de moi, c'est ça, commençais-je la voix tremblante de colère, tu penses que grâce à toi ma vie est plus belle ? Tu penses que je vis mieux ? Ben détrompe Mickaël. Parce que c'est à cause de toi si je suis si mal depuis que je t'ai rencontré. Je ne veux même plus rentrer à Londres.

-Tu me laisses en plan ? Seul ? Alors que tu m'avais promis le contraire ?

-Oh, rassure-toi, tu n'es pas seul, toute l'école est avec toi. Tout le monde t'adore à nouveau. Et ça, je crois qu'c'est pas grâce à toi.

Fin conversation téléphonique.

Je lève les yeux au ciel et fixe ses points blancs complètement brouillés.

-Désolée Alonzo, tu ne lui parleras pas ce soir, déclarais-je en sentant sa main sur son épaule.

-J'ai bien compris. Dormons à la belle étoile sur les transats toi et moi.

*

Ce matin, je me réveille avec la peur d'allumé mon téléphone et de lire : "c'est fini entre nous".

-Bonjour.

Je tourne la tête.

-Hey, souriais-je, bien dormie ?

-C'est plutôt à moi de te demander ça.

-Très bien, je te rassure. Bon on se prépare pour aller chez le tatoueur ?

-Avec joie !

Nous nous levons et rentrons les couvertures ainsi que les coussins. Nous croisons nos parents dans la cuisine.

-¡Holà!

Je ne reçus aucune réponse. Ils tournent leurs visages vers moi.

-Qu'est-ce qui se passe ? Vous faites une tête d'enterrement.

-Tout va bien ?

-Ben oui papa mais ça à pas l'air d'être le cas pour vous.

Ma mère s'approche dans un timide sourire.

-Ce que l'on veut dire, c'est... Avec lui, tout va bien ? Hum... Micke ou Mickaël, c'est ça ?

-Ok. Vous m'avez entendu ?

Je les scrute tous les trois. Je détourne les yeux et monte les escaliers.

-Il y a toujours des hauts et des bas dans un couple. Vous êtes les premiers à nous le montrer. Alonzo, prépare toi.

J'entre dans la salle de bain et allume mon téléphone. Rien. Je me prépare, préoccupée par notre première réelle dispute. Dois-je faire le premier pas ? Dois-je l'appeler ou bien lui envoyer un message ? Je sers mon bandana rouge dans mes cheveux et laisse ma place une fois prête à Alonzo. Je descends.

-Carmela.

Je rejoins mon père dans le jardin. Il souffle la fumée de sa cigarette. C'est la seule chose qui , ne me manque pas chez Micke.

-Oui ?

Il me regarde un instant.

-Très joli tenue, complimente-t-il d'une voix neutre.

-Oh... Merci.

Sa manière de montrer ses ressenties est toujours aussi spéciale...

-Je t'ai demandé si tout se passait bien et tu m'as menti.

-Hum... Si si... Tout va bien. Il n'y a que quelques tensions avec lui, rien de bien grave.

-Simples tensions ? Vraiment ? Pourquoi pense-t-il alors que nous ne sommes pas fiers de toi sans lui ?

Sa révélation froide me glace le sang et me coupe le souffle.

-Non tu as dû mal entendre...

-Carmela !!

J'inspire de frayeur sous son ton coléreux. Je baisse les yeux comme je l'ai toujours fait. Et comme à chaque fois, je vais lui dévoiler la vérité mais je n'ai pas envie de lui donner raison.

"-Tu es sûr de vouloir partir si loin de nous ? Carmela, tu n'es encore qu'une petite fille naïve."

-Papa, ne t'occupe pas d'ça ! Ce sont mes histoires ! Je... Je suis assez grande pour régler mes problèmes sans ton aide ! C'est bien gentil de te soucier de moi, mais je me débrouille très bien toute seule ! Il est à l'hôpital et complètement perdu, il ne sait pas ce qu'il dit et ce qui se passe !
Je n'ai pas besoin d'entendre ta voix montée comme à chaque fois que je dois affronter un problème pour que tu me rappelles que je ne suis qu'une fille naïve !

Il reste silencieux. Son regard fixe le jardin. En dix-neuf ans, c'est bien la première fois que j'ose lui répondre ainsi. Mais je n'ai pas besoin d'avoir d'avantage de pression surtout de sa part. Qu'il reste froid et distant comme il l'a toujours été depuis que je suis petite !

-Carmela, reviens ici. Je n'ai pas fini.

-Comment le savoir aussi, soupirais-je exaspérée au fait qu'il ne laisse jamais rien paraître sur son visage.

Il tapote le bout orangé. La cendre s'écrase dans l'herbe.

-Tu as changé durant ton séjour.

-Tu trouves ?

-Mmh. Premièrement, jamais tu n'aurais parlé à une personne comme tu l'as fait au téléphone. Deuxièmement, mentir comme ça, est bien la première fois sous ce toit, et je ferais en sorte que ce soit la dernière fois. Et enfin, troisièmement, mise à part ton frère au tempérament difficile, personne d'autre ne m'a encore répondu de cette manière. Surtout à ton âge.

Je fixe mes pieds qui se frottent nerveusement l'un contre l'autre.

-La petite fille sensible et naïve à bien grandit. Elle a laissé place à une femme qui sait prendre ses décisions, gérée ses responsabilités et ne se laisse plus marché sur les pieds. C'est rassurant quand tu es loin de nous. Mais embêtant dans cette maison.

-Et pourquoi ?!

-Calme-toi.

-Oh... Oui pardon.

Il écrase son mégot dans le cendrier en verre et dépose ses yeux bleus dans les miens. Jamais je n'en verrais d'aussi beaux.

-Car tu grandit beaucoup trop vite pour moi. Je suis triste Carmela.

J'avale bruyamment ma salive sous ce hoquet de surprise. Mon père, triste ?

-Ça se voit... Pas vraiment. Même, pas du tout, avouais-je.

Il sourit en coin. Ça fait longtemps...

-Te rend-il heureuse au moins ? C'est tout ce qui m'importe. Je ne tolère pas le mensonge, souviens toi.

-Oui, quand tout va bien.

-Et quand tout va mal ?

-Tu vois bien qu'on se dispute.

-Seulement ?

-Comment ça ?

-Il ne se passe rien mis à part les disputes ?

-Où tu veux en venir ?

-Aux coups.

-Tu penses qu'il me frappe ?!

-On ne sait jamais.

-Eh ben tu sais maintenant que la réponse est négative, concluais-je sèchement.

Je rentre. Alonzo met sa veste. Nous montons dans la voiture. Mon père monte côté passager dans un grand silence.

-Dans quelle langue veux-tu qu'on l'écrive ? Français, anglais ou espagnol ?

-Anglais ?

-Ben oui. Je sais que l'anglais est une langue importante pour toi.

-Oh... C'est mignon...

Je suis attendrie par mon adorable petit frère.

-Mais pourquoi nous ne le faisons pas plutôt dans notre bonne vieille langue française ?

Jify : Mysterious Boy (Volume 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant