Chapitre 22 - partie 2

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Il inspecta le bracelet plus attentivement. « Ce sont des vrais. Tu l'as volé, c'est ça ? Attends que les agents l'apprennent — leur précieuse petite orpheline est une voleuse. Ils te renverront pour de bon cette fois. »
« Je ne l'ai pas volé. Il est dans ma famille depuis des années. Rends-le-moi. »
Zoey tendit la main pour attraper le bracelet, mais Stuart éclata de rire et le souleva hors de sa portée.
« Non. Je crois que je vais le garder encore un peu, dit-il. Tes jours sont comptés, Égarée. Retourne dans les rues d'où tu viens. »
Tout en jouant avec ses longs cheveux, Claudia prit le bracelet que tenait Stuart et l'examina. Elle sourit et le lui rendit. Puis elle se dirigea vers Tristan. « Tu la trouves toujours aussi géniale, Tristan ? On sait tous que c'est une menteuse, et maintenant on a la preuve que c'est aussi une voleuse. Comment peux-tu seulement l'apprécier ? »
Comme Tristan ne répondait pas, elle se détourna de lui, furieuse.
« Viens, fit Stuart en s'éloignant, allons montrer ça à l'agent Ward. Je suis sûr qu'elle adorera apprendre où nous l'avons trouvé. »
« Attends ! » Zoey fit un pas en avant. « Je te défie en combat singulier pour ce bracelet. Si tu gagnes, tu peux en faire ce que tu veux. Tu peux aller raconter à toute l'agence que je suis une voleuse. Mais si c'est moi qui gagne, tu me rends le bracelet. »
Le visage de Stuart se tordit de dégoût.
« Je ne vais pas me battre avec toi, l'Égarée. Je ne veux pas que tu m'approches. Je pourrais attraper des maladies de l'orphelinat dont tu sors. Les Originels ne se mélangent pas avec le petit peuple. »
« Qu'est-ce qui t'arrive ? le nargua Zoey. Trop fier pour te battre avec une fille ? À moins que tu aies peur que je puisse gagner ? J'ai combattu des gens bien plus grands que toi et j'ai gagné. Admets-le — tu as peur de moi — tu sais que je vais gagner. »
Elle jeta un coup d'œil à Tristan qui attendait, les bras croisés sur sa poitrine, le sourire aux lèvres. Elle lui sourit et surprit Claudia en train de les regarder.
Le rire de Stuart était glacial. « Tu ne gagneras pas. D'accord, ça marche, Égarée. »
Zoey lui adressa un petit sourire.
« Bien. Il y a un endroit parfait derrière l'Auberge des Pas Perdus. Là-bas, les agents ne nous verront pas. »
Elle ouvrit la marche et contourna l'auberge.
Stuart éclata de rire en se vantant de ce qu'il allait écraser l'Égarée. Il s'assurait que Zoey l'entende bien. Claudia sautillait à ses côtés, visiblement impatiente de voir Stuart les impressionner.
Zoey se campa sur ses jambes d'un air de défi, et elle leva les poings. Simon et Tristan se tenaient derrière elle.
« Tu vas le regretter, l'Égarée », fit Stuart. Il se dirigea vers elle et s'arrêta à quelques pas. « Je vais te renvoyer au centre médical. »
« C'est ce qu'on va voir. »
Stuart quitta sa veste et la tendit à Claudia, mais il garda le bracelet. Il le faisait tourner entre ses doigts. « C'est vraiment trop facile », dit-il.
Simon gloussa.
Stuart lui lança un regard. « Pourquoi tu ris, Brown ? Tu es content que je m'apprête à détruire ta seule amie ? »
Il rit et se tourna vers ses amis qui l'imitèrent dans une cacophonie de rires surjoués.
Simon poussa un soupir las. « C'est juste que — ça va être le plus beau jour de ma vie. »
Stuart baissa les yeux. « Qu'est-ce que tu veux dire ? »
Dans un rugissement soudain, le tonnerre éclata tout autour d'eux. Douze motards sortirent des bois. Leurs silhouettes vert émeraude brillaient sous le soleil et ils encerclèrent les apprentis. Malgré le froid, les petits hommes qui conduisaient les deux-roues n'étaient vêtus que de vestes et de pantalons de cuir, et des tatouages recouvraient la majeure partie de leur peau. Ils tournèrent autour des apprentis, qui toussèrent dans la fumée des pots d'échappement. Au bout de quelques tours, ils s'arrêtèrent et coupèrent les moteurs.
Les membres du groupe de Stuart s'éloignèrent lentement, en essayant de ne pas faire de gestes brusques. Ils étaient effrayés, et Zoey constatait avec ravissement que le beau visage de Claudia affichait un masque repoussant de terreur. Il lui allait comme un gant.
Un homme d'un mètre vingt de hauteur, avec un chapeau haut de forme vert et orange et des cheveux tressés, descendit de sa moto. Son long manteau de cuir vert se gonflait derrière lui comme une cape, tandis qu'il s'avançait vers Zoey et Stuart. Ses dents jaunes brillèrent lorsqu'il sourit à la jeune fille.
« Salut, Zoey. Ça fait bien longtemps qu'on ne s'est pas vus. »
« Salut, Rouille », fit Zoey. Son sourire s'élargit lorsqu'elle aperçut la mine abasourdie de Stuart. « Ça fait bien trop longtemps. Vous m'avez manqué, les gars. »
Rouille le Redoutable regardait fixement le bracelet que Stuart tenait à la main.
« Alors c'est toi le voleur, c'est ça ? dit-il en dardant sur lui un regard des plus noirs. Personne ne vole le gang des farfadets sans en payer le prix. Les gars ! »
Les onze autres farfadets sautèrent au bas de leurs engins et firent rouler leurs muscles de façon menaçante. Ils avaient l'air prêts à combattre.
Stuart recula lentement. « Je ne suis pas un voleur ! »
Rouille leva un sourcil. « Tu me traites de menteur ? » Il haussa furieusement le ton.
« Non — mais — mais ce n'est pas moi qui l'ai pris. »
« Alors qu'est-ce que tu as dans les mains, hein ? C'est mon bracelet, voilà ce que c'est. Il avait disparu ce matin, et mes espions m'ont dit que je le trouverais ici — avec le voleur qui me l'a dérobé. »
Stuart dévisagea Zoey en comprenant peu à peu qu'il venait de se faire piéger. Il tendit son doigt vers elle.
« Toi ! C'est toi qui m'as fait ça ! Tu as tout organisé ! »
Zoey haussa les épaules d'un air innocent. « Je ne sais pas de quoi tu parles. »
« C'est elle qui l'a volé, pas moi ! s'écria Stuart. Elle essaie de me piéger, de se venger de moi ! »
« C'est la première fois que je vois le roi mort de trouille comme ça, chuchota Simon pour que Zoey et Tristan soient les seuls à l'entendre. C'est comme si Noël était tombé à l'avance. Merci, Père Noël. »
« Je vous le répète. Je ne l'ai pas volé — c'est elle. » Stuart pointa le doigt vers Zoey. Une sueur froide coulait sur son visage. « Je le lui ai juste pris pour la dénoncer de l'avoir volé. »
« Vous entendez ça, les gars ? fit Rouille. Il essaie de rejeter la faute sur une fille pour sauver sa peau. Si ce n'est pas de la lâcheté, je ne sais pas ce que c'est. »
« C'est ridicule, cracha Stuart, je vais chercher l'agent Ward. »
Il fit un pas en avant, mais un farfadet chauve et couvert de cicatrices, au regard de tueur en série, lui barra la route. Il croisa ses bras sur son large torse musclé et secoua la tête.
« Je ne crois pas, dit Teigne le Balafré. Pas si tu tiens un tant soit peu à la vie. »
Rouille fit craquer ses doigts. « Tu sais quel sort nous réservons à ceux qui nous volent ? » demanda-t-il.
Il sourit. « Nous les mettons dans la Cage. »
« La quoi ? De quoi parlez-vous ? »
Stuart se retrouva soudain cerné par onze farfadets. « Arrêtez ça tout de suite ! Que croyez-vous pouvoir me faire ? Poussez-vous de mon chemin ! »
Un farfadet à la crête iroquoise verte agita un gros bâton dans sa direction. « Si tu bouges, j'te cloue, ptit gars », fit Gangrène le Cogneur.
Stuart regarda autour de lui, en proie à la terreur. Les minuscules hommes aux tatouages, piercings et armes menaçantes l'avaient encerclé. Il fixa Zoey et, pendant un instant, elle crut voir dans ses yeux un appel à l'aide silencieux. Mais comme elle ne répondait pas, il baissa les yeux et une lueur glaciale passa dans son regard.
« Je te hais », pesta-t-il.
« Et bien, au moins nous avons une chose en commun », répondit Zoey d'un ton tout aussi froid.
Rouille arracha le bracelet des mains de Stuart. « Je récupère ça, maintenant. »
Les farfadets lui lièrent les mains et les pieds et la panique de Stuart se mua en rage.
« Ne faites pas ça, siffla Stuart, le visage déformé. Zoey, dis-leur ! Dis-leur qu'on ne faisait que s'amuser. Dis-leur que c'est toi qui me faisais une blague à ta façon ! »
Zoey sourit calmement. « Oui, c'est une blague. À tes dépens, Leroy. »
« Non ! » Il se débattit sauvagement alors que Teigne le hissait sur sa moto.
« À l'aide ! Quelqu'un ! À l'aide ! À l'ai — »
Le Cogneur fourra un mouchoir dans la bouche de Stuart. « Bon sang, il a la langue bien pendue celui-là. Nous allons tellement nous amuser avec lui. Merci, Zoey. »
Zoey sourit aux farfadets. « Non, c'est moi qui devrais vous remercier. »
Elle jeta un coup d'œil à Stuart et baissa la voix. « Vous n'allez pas vraiment lui faire du mal, si ? »
Rouille lui fit un clin d'œil. « Bien sûr que non, nous sommes des farfadets civilisés après tout. » Il tapa dans ses mains. « Bon, les gars. On s'en va ! »
Le Cogneur laissa tomber son bâton et ouvrit grand les bras. « Viens nous faire un gros câlin. »
Elle éclata de rire et serra le farfadet dans ses bras. Elle sentit que quelqu'un, derrière elle, la prenait dans ses bras et elle baissa les yeux pour apercevoir Teigne, les yeux embués de larmes.
« Tu viendras nous rendre visite ? demanda-t-il d'une voix chevrotante. Tu nous manques, tu sais. Tu nous rappelles tellement ta mère. »
Il lâcha Zoey et se moucha bruyamment dans un mouchoir.
« D'accord, dit-elle. Promis. »
Le Cogneur essuya ses yeux contre sa manche, puis Gangrène et lui se dirigèrent vers leurs motos.
« À bientôt, Zoey. »
Leurs moteurs rugirent, et le gang des farfadets disparut dans la forêt. Stuart était emballé sur l'un des sièges et Claudia leur courait après en hurlant comme une furie. « Il faut que j'enregistre ça ! » Simon s'élança derrière le gang des motards en brandissant son téléphone portable.
Zoey sourit. Sa vengeance était superbe.
« Où vas-tu maintenant ? » demanda Tristan après un moment de silence.
Zoey poussa un profond soupir. « La direction m'attend. »
Tristan regarda derrière lui en direction de la forêt. « Je vais aller surveiller Simon pour m'assurer qu'il ne fait rien de trop stupide. On se voit plus tard. »
« Si je suis toujours là », dit Zoey d'un air un peu découragé. Elle tourna les talons et rebroussa chemin vers la ruche, avant de s'arrêter.
« Tristan ? » lança-t-elle.
« Oui ? » fit-il en se retournant.
« Je peux te demander quelque chose ? Je veux dire, si ce n'est pas trop personnel ! » Ses joues lui brûlaient et elle avait envie de se donner des gifles pour rougir aussi facilement.
« Bien sûr. »
« Quelle part de mystique possèdes-tu ? » Elle attendit, la gorge nouée.
Le fait qu'il ne lui réponde pas tout de suite la fit se sentir absolument ridicule. « Désolée, lâcha-t-elle brusquement. Je suis une idiote — ça ne me regarde pas — oublie ce que je viens de dire. »
Tristan sourit. « Tu en as mis du temps. J'attendais que tu me le demandes. »
Il marqua un temps de pause avant de répondre. « Ma mère est une Septième, mais mon père est un álfar — comme un elfe des montagnes, on va dire — avec la peau bleue. »
Zoey ne connaissait pas grand-chose à propos des elfes, à part ce qu'elle en avait lu. Les oreilles de Tristan n'étaient pas pointues, mais cela expliquerait ses pommettes saillantes et le bleu de ses veines et du halo qui l'entourait.
« Ils se sont rencontrés quand ma mère était en mission pour l'agence près des Apennins, en Suisse, poursuivit-il. Ils sont tombés amoureux, et on connaît la suite. »
Zoey se mordit la lèvre inférieure. « Alors comment fonctionne ton côté mystique ? Ta peau s'est illuminée de bleu et toutes ces veines ont recouvert tes bras — comment contrôles-tu ça ? »
« Et bien, je suis aussi humain que mystique. Les deux côtés font partie de qui je suis. La plupart du temps, je suis celui que tu as sous les yeux », répondit Tristan.
« Comme mon père, les elfes des montagnes ont une force supérieure à la normale. C'est une espèce d'adrénaline qui déferle dans mes veines et me donne une force équivalente à celle de trois hommes moyens. C'est latent en moi, jusqu'à ce que j'en aie besoin. Alors, ça se réveille. »
« As-tu des frères et sœurs ? »
« Oui, j'ai une petite sœur. Elle a huit ans. »
« Peut-elle faire la même chose que toi ? »
« Tu veux dire, est-ce qu'elle est aussi forte ? »
« Oui. »
Tristan eut un petit rire. « Oui, elle est comme moi. Elle est d'ailleurs très difficile à gérer en ce moment, je plains ma mère. »
Zoey regardait ses pieds. « Je t'envie. Ta famille a l'air géniale. J'aimerais en avoir une. »
Tristan prit la main de Zoey dans la sienne et la serra tendrement. « Tu en as une maintenant. L'agence est ta famille. »
Zoey plongea son regard dans les yeux sombres de Tristan, et le sang lui monta aux joues. Elle le détourna rapidement.
« Oui, tu dois avoir raison. » Elle retira sa main.

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